En décidant du déclenchement de la lutte armée, le premier novembre 1954, le FLN, expression de la volonté de tous les militants nationalistes révolutionnaires, répondait à l'attente des masses populaires dont il fallait tout naturellement guider le combat. Devenues incapables de se renouveler et d'ouvrir de nouvelles perspectives, les anciennes formations politiques, enlisées dans des querelles stériles ou des actions inopérantes, étaient du même coup éliminées. Les conditions de la lutte allaient être particulièrement difficiles car le pays était une colonie de peuplement et le colonialisme français le considérait comme la pièce maîtresse de son empire. Compte tenu des caractéristiques de ce système colonial total et totalitaire et également du fait de le peuple, sur qui pesait le poids d'une intolérante oppression, se sentait dans son ensemble concerné, il faillait gagner dans le combat libérateur toutes les énergies susceptibles d'être mobilisées. Le combat étant national, les choix de caractère idéologique n'étaient pas pris en compte de manière explicite et les rangs du FLN et de son fer de lance, l'ALN, étaient ouverts à tous ceux qui adhéraient aux nouvelles formes de lutte, quelle que fût leur origine sociale ou leur ancienne appartenance politique. Cette démarche, qui a permis de préserver l'unité du peuple dans la lutte et de réaliser, ainsi, sur le plan stratégique, une condition essentielle du succès, devait tout naturellement permettre la naissance et le développement de multiples contradictions. Cependant, la participation massive des paysans qui ont supporté l'essentiel du poids de la guerre de Libération, leur large prédominance avec celle des travailleurs dans les rangs du FLN et de l'ALN ont conféré à la Révolution un caractère populaire et social prononcé. Ce facteur historique a favorisé la maturation des choix et le développement d'un puissant courant révolutionnaire qui, à chacune des étapes cruciales traversées par la Révolution, a permis de résoudre les conflits inévitables au bénéfice des masses populaires. Il est bien certain qu'à travers son histoire, le peuple algérien a accompli des tâches difficiles et glorieuses. La rétrospective de cette histoire, montre que le peuple a toujours réussi dans les luttes qu'il fallait mener à la fois contre le colonialisme français et pour la reconstruction du pays. Au premier novembre 54, ce qui est apparu avec une évidente clarté, c'est la prise de conscience d'un noyau de nationalistes décidé à enclencher la guerre de Libération, seul moyen d'arracher la souveraineté du pays. La mobilisation des Algériens autour du Message de Novembre 54, l'engagement irrévocable contre la politique d'expansion de la France coloniale, qui foule aux pieds le droit du peuple à son existence, à sa souveraineté, à son indépendance, ont été le mot d'ordre général de cette résistance à contrecarrer le but de l'occupation basé sur la terreur, les massacres des gens inoffensifs mais aussi de piller les richesses du pays. Le 8 Mai 1945 fut un moment qui s'inscrit dans cette longue histoire de la résistance nationale à la domination coloniale, une histoire faite de sang et de sacrifices, depuis l'épopée de l'Emir Abdelkader jusqu'au combat armé et victorieux de Novembre 54. La confiance en soi du peuple et en la génération de 1954, a été le gage de son inéluctable victoire. L'unité des Algériens, que la cause anti-coloniale pouvait espérer marquer des victoires importantes contre l'une des armées les plus équipées de l'Europe et du monde, a été l'autre ferment de cette résistance. Pendant 132 ans de son histoire, le peuple algérien n'avait cessé de vivre pour refuser et combattre un appareil installé par un Etat étranger défendu par une armée d'occupation et une administration coloniale. Cette présence étrangère et surtout coloniale représentait pour chaque Algérien des instruments d'oppression et de répression, un système d'exploitation des ressources naturelles du pays et de sa force de travail qu'il était obligé de vendre à un vil prix pour survivre. L'ALN sur les champs de bataille et l'action politique et diplomatique menée par le FLN au niveau national et international, ont brisé tous les scénarios mis en œuvre par la IVe République française. Le gouvernement de Paris a paniqué jusqu'au 5 juillet 1962 devant la détermination des Algériens à arracher leur liberté. Les caractéristiques de la nation algérienne, partie intégrante du monde arabe auquel la rattachent les liens de la langue, de la religion et de la culture, les solidarités forgées dans le passé, les aspirations d'avenir à édifier en commun, ont contraint l'occupant à reconnaître que l'Algérie n'est pas une création récente. Les traits les plus saillants de la nation algérienne remontent à l'antiquité : avec l'islam s'est constituée l'unité culturelle autour de la culture arabe qu'a choisi le peuple et qui trace son évolution, que le colonialisme n'est pas parvenu à effacer. Les structures de l'administration coloniale, leurs implantations, à travers le pays, les formules vainement essayées pour mieux contenir l'évolution de la société, visaient à nier jusqu'à l'existence de l'Algérien en tant qu'homme appartenant à une civilisation porteuse d'un message universel et aspirant intensément à reprendre son rôle dans le concert des nations. Les différentes périodes de l'histoire de l'Algérie ont constitué un creuset où se sont fondus intimement les brassages ethniques, les apports de toutes sortes, comme les créations nouvelles du génie national, tout cela pour aboutir à une expression originale de la personnalité arabo-musulmane du peuple et à une conscience claire de son espace géographique. Par ses origines comme par ses objectifs, l'administration coloniale était animée et inspirée dans son action quotidienne par des hommes et des principes législatifs ou réglementaires qui n'avaient rien à voir avec la réalité du pays et son histoire. Les contradictions inévitables que comportait cette situation ne pouvaient que déboucher sur une action improvisée au fil du temps et tentant à chaque période de trouver les moyens de bloquer toute évolution positive de l'Algérien tant sur le plan économique et social que sur le plan politique. La survie de l'Algérie pendant la domination coloniale est le résultat de luttes incessantes qui aboutirent à la reconquête de la souveraineté nationale. La Révolution de Novembre 54 constitue pour le peuple algérien un acquis majeur et un moment privilégié de sa grande histoire ; grâce à cette résistance et à sa victoire, la Nation maîtrise aujourd'hui les moyens concrets de son évolution. Aujourd'hui, les historiens honnêtes reconnaissent que le peuple algérien, à travers sa guerre de Libération Nationale, a écrit l'une des pages les plus glorieuses du combat de l'homme pour sa dignité et son droit au progrès. Un million et demi d'Algériens ont payé de leur vie, la victoire de leurs idéaux. En ce premier novembre 2010, le peuple algérien, en rendant hommage à ses chouhada, se doit de se remémorer tout ce qu'a été, à travers leurs innombrables actes d'héroïsme individuel et collectif, la foi en la patrie et en son avenir, tout ce qui a été la force de l'attachement aux principes de justice et de dignité.