Les chômeurs viennent de commencer à se faire entendre. C'est la catégorie des plus précaires, qui ne résiste que grâce à la solidarité familiale. Y a-t-il plus marginalisés, plus exclus que les chômeurs ? Sommes-nous dans une situation où les chômeurs sont les plus écoutés ? L'UGTA défend les travailleurs, et comprend parfois le cas où il y a des compressions des personnels, car il y en a eu par milliers. Des entreprises fermées, des travailleurs compressés. Combien d'emplois à durée indéterminée, combien à durée déterminée et combien de chômeurs ? la nécessité de mettre le pays à l'abri d'une explosion socialo-politique et dont certains disent que celle-ci pourrait s'élargir et s'approfondir, des actions pouvant redonner l'espoir sont une urgence. Les syndicats prennent la défense des manifestants et tout le monde oublie qu'une part importante des manifestants est constituée par des chômeurs. Il est quand même paradoxal que les partis politiques ne développent pas de discours sur le chômage, sur l'emploi, alors que ce sont pratiquement les personnalités réputées non partisanes et qui avaient exercé des missions de pouvoir qui en parlent le plus. Passe pour les partis de l'Alliance qui peuvent affirmer que ce que fait le gouvernement représente leur stratégie en la matière. Les partis de l'opposition n'en parlent même pas, sauf pour dire que la politique mise en œuvre ne réussira pas. Cependant, ils disent tous que la priorité est celle de la mise en œuvre d'une politique très active d'aide au petites et moyennes entreprises. La catégorie des populations qui n'accède pas à un emploi plus particulièrement stable et qui pourrait sortir d'une certaine façon de la précarité si elle pourrait y accéder n'est pas intégrée dans les négociations ou plutôt les rencontres tripartites. Quand nous critiquons l'action économique du gouvernement, et il faut bien sûr critiquer, la question se pose de savoir quels seraient les repères doctrinaux qui baliseraient ces critiques. Par rapport à quel système économique faudrait-il formuler des critiques, ou des évaluations. Comment faire fonctionner une politique économique libérale dans un pays pas tout à fait prêt à entrer dans un environnement international de forte concurrence, préserver nos chances de disposer d'une industrie nationale dans un contexte où le processus de privatisation ne va pas emprunter une voie à grande vitesse ? Autant de questions qui mériteraient bien des réponses de la part de ceux qui aspirent à accéder au pouvoir pour appliquer leur programme économique. Comment la faire fonctionner notre économie quand celle-ci se trouve encore sur la passerelle qui rejoint les deux rives, celle de l'économie dirigée de laquelle nous nous éloignons laborieusement et celle de l'économie de marché qui est encore difficile à atteindre dans le court terme. Les réformes économiques globales et l'adaptation des mentalités participent de cette transition. Les syndicats existants parlent de pouvoir d'achat lié aux salaires, tandis que l'organisation syndicale liée aux partis du pouvoir parle plutôt du pouvoir d'achat à approcher globalement, ce qui est normal, car les prix en sont une composante. Quel syndicat pourra défendre les chômeurs ? De toute façon, les émeutes autour de revendications socioéconomiques et non pas du tout politiques, sont à prendre au sérieux car elles ne concernent pas que le pouvoir d'achat quand l'écoute n'est pas au rendez-vous. Pourquoi ne devrait-il pas arriver que des manifestants chômeurs amènent les autorités et parmi elles, les plus hautes, à recevoir les plaignants et à engager le dialogue, ou plutôt les négociations, autour de propositions à étudier en vue de trouver des solutions concertées sur une nouvelle politique de création d'emplois ? N. B.