Face à la flambée des prix du carburant à la pompe, les Américains cherchent un bouc émissaire sur qui rejeter la responsabilité de cette calamité qui perturbe profondément leur train de vie.Tous, qu'ils soient politiciens ou simples citoyens, ont vite fait de désigner le coupable idéal de cette flambée dont le niveau se rapproche chaque jour de celui du record de 2008. Mettant en cause tantôt les spéculateurs, tantôt les révoltes et l'instabilité auMoyen-Orient,les Américains assistent, désemparés, à la montée rapide des prix de l'essence à la pompe, en passe de battre le record de l'été 2008. A la fin de la semaine dernière, vendredi soir, les prix moyens de l'essence avaient dépassé un dollar le litre, en s'établissant à 4,2 dollars le gallon (3,78 litres) dans l'Etat de Californie et à 4 dollars le gallon à New York, selon les chiffres de l'Automobile club américain (AAA) et du bureau des statistiques du ministère des transports. Dans la capitale fédérale, certaines stations du centre- ville affichaient 4,99 dollars le gallon. En général, le gallon d'essence valait 50 cents de plus qu'il y a une semaine et un dollar de plus qu'il y a un an. Le dernier record à la hausse date de juillet 2008 où le prix de l'essence avait atteint 4,11 dollars en moyenne sur le territoire national. Ce niveau des prix à la pompe est toutefois sans rapport avec celui pratiqué en Europe où le litre d'essence, très taxé, a récemment atteint le record en France, par exemple, de 1,53 euro le litre. Pour un gallon d'essence (3,78 litres), les Européens paient encore plus du double que les Américains, soit 5,78 euros ou 8,40 dollars. Au pays de la voiture toute puissante, les automobilistes américains cherchent un bouc émissaire. Selon un sondage publié vendredi, 36% d'entre eux voient dans les mouvements sociaux au Moyen-Orient la cause de la flambée des prix tandis que 33% blâment l'avidité des compagnies pétrolières aux Etats-Unis. Quelque 11% estiment que c'est la faute du président Barack Obama alors que 6% rejettent la responsabilité sur le Congrès. Les opinions divergent suivant les orientations politiques: 44% des démocrates accusent les spéculateurs de faire flamber les prix, comme l'a suggéré le président Barack Obama, tandis que 37% des républicains expliquent la hausse par les manifestations au Moyen-Orient. "Le problème est que le pétrole est vendu sur ces marchés mondiaux et que des spéculateurs et des gens misent sur les futurs cours et cela provoque une hausse importante des prix", a déclaré pour sa part le président Obama. Le département de la justice a même ordonné jeudi dernier une enquête pour déterminer s'il y avait fraude ou entente dans cette flambée des prix. "Les Américains en ont gros sur le cœur à propos de l'essence", a résumé Lee Miringoff, directeur du Marist College Institute for Public Opinion qui a réalisé ce sondage pour le groupe de presse McClatchy. L'enquête réalisée auprès de 1274 personnes du 10 au 14 avril montre aussi qu'une majorité d'automobilistes (55%) a changé sa façon de rouler, soit en empruntant davantage les transports en commun, soit en ayant recours au covoiturage. La croissance de la consommation américaine de pétrole, dont 75% est utilisé pour les voitures et le trafic aérien, devrait ralentir à +1,1% en 2011 au lieu de +2% en 2010, prévoit l'Energy Information Administration.Tout est bon pour utiliser jusqu'à la dernière goutte d'essence et de plus en plus d'automobilistes tombent en panne d'essence sur les routes américaines attendant le dernier moment pour refaire le plein. Ainsi le Club automobile de Californie du Sud à Los Angeles (AAA), où l'essence est la plus chère du pays, a noté qu'au cours des trois premiers mois de 2011, ses dépannages pour panne d'essence avaient augmenté de 13%. Triple A dépanne ainsi 16 000 automobilistes à sec chaque mois ces temps-ci, selon les révélations de la porte-parole de l'organisation, Marie Montgomery, rapportées par les agences de presse. "L'addition est tellement douloureuse à la pompe qu'on ne cesse de retarder le moment de faire le plein et on n'arrive pas à destination", commente-t-elle.