Encore dans les mémoires, la décennie rouge ou noire n'a pas eu assez d'espace littéraire ni même assez d'analyse, permettant de comprendre comment une contrée souveraine a basculé dans une longue nuit d'horreur.Pas beaucoup de littérature, hormis les romans de Leila Aslaoui et quelques récits fictifs. à l'époque on parlait de littérature de l'urgence, mais ce mot semble tout à fait surfait, parce qu'il n'existe pas de littérature d'urgence si l'on conçoit qu'il ya des plumes prestes et d'autres qui ne le sont pas. Voilà donc deux naissances toutes fraîches chez Barzakh édition : "à fleur de silence" et "Apprendre à vivre ensemble". Coédités avec l'ONG italienne, le CISP (Comité international de soutien aux populations), le premier signé Anaïs Pachabezian et préfacé Maïssa Bey, rassemble un tas de photographies témoignant de cette période, tandis que le second est une réflexion menée sur la base d'enquêtes qu'à dirigées Ghania Mouffok . Pour la mémoire, contre l'oubli, ses deux ouvrages présentés la semaine dernière chez Chihab, c'est pour dire le traumatisme et ses séquelles chez ces nombreux Algériens ayant vécu l'innommable et qui restent depuis murés dans le silence. Conçues à la demande du Cisp, une Ong italienne installée en Algérie depuis 1999, les deux publications se veulent un hommage aux personnes disparues, assassinées par les terroristes et s'inscrivent dans un "processus de mémoire afin de prévenir contre le danger de l'amnésie". Comment guérir des blessures causées par la violence terroriste? Comment rétablir la cohésion au sein d'une société meurtrie? Comment se reconstruire, "se réconcilier" et pouvoir enfin dépasser ses traumatismes, après de telles épreuves? Les deux livres tentent d'apporter des réponses à tous ces questionnements, à travers des photographies, des témoignages et des analyses sur l' "après-terrorisme". Une petite maison devenue grande Barzakh publiait récemment, un ouvrage collectif sous le titre, "Alger quand la ville dort ". Dans cet ouvrage il y a "Le Minotaure 504" de Kamel Daoud, fait rare, ce texte a été sélectionné en avril dernier par la très selecte institution du Goncourt pour le prix Goncourt de la nouvelle 2011. Dans la liste, il y a six ouvrages et parmi eux, il y cette signature algérienne, Kamel Daoud. En septembre dernier, Sofiane Hadjaj et Selma Hellal, les fondateurs de Barzakh, étaient les heureux élu de la Fondation Prince Claus pour la Culture et le Développement. Une fondation princière des Pays-Bas qui existe depuis 1997 et qui félicitait en 1999 avec le même prix, le dramaturge et comédien Fellag exilé en France depuis cette date. L'ambassade des Pays-Bas à Alger, avait annoncé cette bonne nouvelle, puis le 17 décembre 2010, les fondateurs de Barzakh se sont rendus à Amsterdam pour recevoir le trophée de 100.000 euros des mains de la noblesse hollandaise. La cérémonie a eu lieu au Palais Royal à Amsterdam en présence notamment de la Reine Beatrix, du Prince Willem Alexander, de la princesse Maxima, du Prince Constantijn et du secrétaire d'Etat Ben Knapen. Dans son allocution, le Prince Friso qui a longuement justifié ce trophée pour des éditions qui ont " créé un espace de liberté en Algérie, permettant ainsi un épanouissement de la Culture et l'ouverture de débats sur des sujets complexes et importants. " L'ambassade des Pays-Bas à Alger avait expliqué que cet hommage à la maison d'édition Barzakh est mérité car "Barzakh a donné une forme concrète aux voix algériennes, pour avoir ouvert un espace de réflexion critique tellement nécessaire sur les réalités algériennes, pour avoir construit une passerelle entre des langues et des cultures différentes, et pour avoir rompu de manière créative la menace d'isolation culturelle du pays". Une autre cérémonie en l'honneur des lauréats sera également organisée à l'ambassade des Pays-Bas à Alger en janvier 2011. Il faut savoir que ce prix est décerné chaque année à des artistes, des intellectuels et des organisations culturelles d'Afrique, d'Asie, d'Amérique latine et des Caraïbes. Ses activités et rencontres consistent en conférences, séminaires, cours, réunions et expositions, est-il précisé sur le site de la fondation. La Fondation soutient des livres et des magazines dans diverses disciplines culturelles. Prestigieux prix donc qui aiderait sans doute les éditions Barzakh à publier davantage et à consolider un nom dans le monde très compliqué de la chose livresque. Spécialisées dans la littérature contemporaine, ces éditions ont toujours misé sur des écrivains qui sont plus ou moins reconnus dans l'Hexagone à l'exemple de Maïssa bey dont certains romans notamment "Bleu blanc, vert " sont enseignés au lycée français Descartes de Ben Aknoun, mais aussi de vrais talents contestataires à l'exemple de Mustapha Benfodil dont son succulent "Archéologie du chaos amoureux " a été publié chez eux. Avec la Khadramania du début 2000, Barzakh lançait un projet assez imitateur qui voulait que de jeunes scribes se penchent sur des récits policiers. à cette époque, l'inspecteur Llob de l'hégémonique Yasmina Khadra a eu un succès si foudroyant qu'il devenait contagieux même si on n'y comprenait rien.