La Syrie a accepté, hier, le plan de paix présenté par l'émissaire des Nations unies et de la Ligue arabe, Kofi Annan, selon le porte-parole de ce dernier. La Ligue, réunie à Bagdad, devait également discuter du conflit mais ses dirigeants ne devraient pas exiger la démission du président syrien Bachar el-Assad, selon le ministre irakien des Affaires étrangères. Le porte-parole de Kofi Annan, émissaire de l'ONU et de la Ligue arabe pour la Syrie, a déclaré que Damas avait accepté le plan prévoyant notamment un cessez-le-feu des forces gouvernementales, une trêve de tous les combats deux heures par jour pour évacuer les blessés et fournir une aide humanitaire, et l'ouverture de pourparlers entre toutes les parties pour chercher une solution politique. Ahmad Fawzi a précisé que le gouvernement avait donné son accord dans une lettre adressée à l'émissaire de l'ONU. Les Nations unies estiment que la répression a fait plus de 8 000 morts depuis le début de la contestation à la mi-mars 2011. Le mouvement initialement pacifique s'est radicalisé face à la violence des forces de sécurité et a été rejoint par des déserteurs de l'armée. Le pays menace désormais de basculer dans la guerre civile. La Syrie, qui fait partie des 22 Etats membres de la Ligue arabe, n'a pas été invitée au sommet, qui s'achèvera demain avec la réunion des chefs d'Etat et de gouvernement. D'après le ministre irakien des Affaires étrangères Hoshyar Zebari, les dirigeants seront probablement d'accord sur une solution "faisable" pour mettre fin à la violence, mais "c'est au peuple syrien de déterminer son avenir, ce n'est pas à d'autres pays de dicter aux Syriens le genre de dirigeants qu'ils doivent avoir ou pas". "Je ne pense pas qu'il y aura un appel à la démission de Bachar", a-t-il ajouté. Le nouveau plan de sortie de crise serait donc similaire à celui présenté il y a quelques mois par la Ligue arabe, qui prévoyait un transfert pacifique du pouvoir du président Assad à son vice-président jusqu'à la tenue d'élections, selon M. Zebari. Le régime alaouite, qui affirme que l'opposition est manipulée par l'Occident et qu'il affronte un complot terroriste de l'étranger visant à déstabiliser le pays, a dénoncé les critiques de l'alliance panarabe concernant la répression. Le chef de la diplomatie irakienne a par ailleurs exhorté l'opposition syrienne à "s'unir avant tout", pour présenter un plan de paix commun. Il a précisé que les dirigeants de l'opposition seraient les bienvenus à Bagdad après le sommet pour discuter des options. L'Irak présidera alors la Ligue pendant un an. Pendant que la l'organisation régionale se réunissait à Bagdad, la Syrie restait en proie à la violence. L'Observatoire syrien des droits de l'Homme, basé à Londres, a déclaré que les forces de sécurité avaient tué au moins dix personnes, hier: quatre dans la province d'Idlib (nord-ouest), dont le chef-lieu du même nom a été récemment repris aux rebelles qui le contrôlaient depuis des mois, et six dans des faubourgs damascènes de Zabadani et Douma, ainsi qu'à Homs (centre), l'un des bastions de l'insurrection également, et dans la région de Deir el-Zour (est). Selon l'agence de presse officielle SANA, le président Assad s'est rendu, hier, à Homs, dans le quartier de Baba Amr repris à l'insurrection après un mois de siège et de combats qui ont fait des centaines de morts. Par ailleurs, deux responsables libanais de la sécurité, l'un de la police et l'autre de l'armée, ont déclaré sous couvert d'anonymat que des balles tirées lors de combats dans la zone de Machareaa al-Qaa, en Syrie, avaient traversé la frontière -mais pas des troupes. La réunion de la Ligue arabe à Bagdad est une bonne occasion pour l'Irak à majorité chiite de montrer qu'il a rejoint le monde arabe dominé par les sunnites après des années de guerre, de sanctions et d'occupation américaine -les dernières troupes de combat sont parties en décembre dernier. Mais les dirigeants arabes, qui se méfient des liens entre le gouvernement irakien à dominance chiite et l'Iran chiite, pourraient aussi profiter du dossier syrien -Damas et Téhéran étant alliés- pour tenter de forcer Bagdad à choisir son camp. M. Zebari a insisté pour sa part sur le refus de l'Irak de se mêler des affaires intérieures des autres pays. Mise en œuvre cruciale Selon son porte-parole, Kofi Annan a encore souligné que la mise en œuvre du plan de paix sera cruciale, non seulement pour les Syriens, mais aussi pour la région et toute la communauté internationale. "En même temps que les Syriens appliqueront leurs engagements, M. Annan va s'engager rapidement pour travailler avec toutes les parties afin que le plan soit appliqué à tous les niveaux", a affirmé Ahmad Fawzi. L'envoyé spécial conjoint de l'ONU et de la Ligue arabe exprime enfin son appréciation pour le large soutien international reçu pour ses efforts de médiation. Il appelle les pays clés à soutenir ce développement et à aider à garantir son application effective. Le plan Annan, approuvé le 21 mars par le Conseil de sécurité, préconise notamment la cessation de toute forme de violence armée par toutes les parties sous supervision de l'ONU, la fourniture d'aide humanitaire à toutes les zones affectées par les combats et la libération des personnes détenues arbitrairement. Kofi Annan souligne qu'il a besoin de l'aide de la Chine L'émissaire de l'ONU et de la Ligue arabe Kofi Annan a souligné à Pékin qu'il a besoin de l'aide de la Chine pour résoudre la crise en Syrie, lors d'un entretien avec le Premier ministre chinois Wen Jiabao. Je ne peux pas faire ce travail tout seul, j'ai besoin d'aide et de soutien, et de soutien et de conseils de pays comme le vôtre et c'est pourquoi je suis ici dans la capitale chinoise, a déclaré M. Annan, dont le plan de paix pour la Syrie a reçu le soutien de la Chine. Le chef du gouvernement chinois a pour sa part estimé que la déclaration de l'ONU appelant à la fin des violences, votée par Moscou et Pékin, reflétait le niveau élevé d'inquiétude et l'important consensus auquel est parvenu la communauté internationale sur la question syrienne. La Russie et la Chine, fidèles alliés de Damas, ont bloqué deux résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU condamnant la répression en Syrie. Ce double veto a été vertement critiqué, notamment par les Etats-Unis, l'Union européenne et l'Arabie Saoudite. Le chef de la diplomatie de Ryad a jugé que l'attitude de Moscou et de Pékin avait permis au régime de Bachar al-Assad de poursuivre les violences contre sa population. Mais Moscou et Pékin ont voté une déclaration (forme moins contraignante que la résolution) à l'ONU appelant à la fin des violences, exhortant Bachar al-Assad et ses opposants à appliquer immédiatement le plan Annan. Ce plan prévoit notamment un arrêt des violences par toutes les parties, l'acheminement de l'aide humanitaire et la libération de toutes les personnes détenues arbitrairement. Le gouvernement chinois soutient vos efforts de médiation en tant qu'envoyé spécial, a confirmé M. Wen à l'émissaire des Nations Unies, qui a rencontré plus tôt un vice-ministre chinois des Affaires étrangères, selon son porte-parole. La Chine appelle toutes les parties à coopérer avec M. Annan La Chine a appelé toutes les parties en Syrie à participer aux efforts de médiation de l'émissaire de l'ONU et de la Ligue arabe Kofi Annan, arrivé à Pékin après avoir obtenu à Moscou l'appui du président russe Dmitri Medvedev pour son plan de paix. Nous espérons que toutes les parties en Syrie pourront participer aux efforts de médiation de M. Annan, afin de créer les conditions d'un règlement politique de la question syrienne, a déclaré le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Hong Lei, lors d'un point de presse régulier. Pour la Chine toute action de la communauté internationale doit servir à faire baisser les tensions en Syrie, promouvoir le dialogue politique et résoudre les différends, ainsi qu'à maintenir la paix et la stabilité au Moyen-Orient, a encore dit M. Hong. Le départ d'Assad ne résoudra pas les problèmes, selon Medvedev Il est erroné de penser que le départ de Bachar el-Assad du poste présidentiel résoudra tous les problèmes en Syrie, a déclaré, hier, le président russe Dmitri Medvedev lors d'une conférence de presse à Séoul. "La société syrienne de par son caractère confessionnel et selon d'autres paramètres, est très complexe, et il serait absolument erroné d'estimer que le départ d'Assad permettrait de résoudre tous les problèmes", a indiqué le chef de l'Etat russe. "Les contradictions internes déchirant actuellement la société syrienne ne disparaitront pas avec le départ de telle ou telle personnalité politique. Tout le monde doit songer à ça, qu'il s'agisse de ceux qui évoquent la nécessité de remplacer immédiatement le régime ou de ceux qui s'en tiennent à des positions plus équilibrées", a ajouté le président russe. Le président Assad dans le quartier de Baba Amr à Homs Le président syrien Bachar al-Assad se trouvait, hier, à Homs (centre) où il s'est rendu dans le quartier de Baba Amr, un bastion rebelle pilonné pendant des semaines avant d'être repris le 1er mars par l'armée, a rapporté la télévision publique. En ce moment, le président Assad inspecte le quartier de Baba Amr à Homs, a indiqué la télévision ajoutant que des images de cette visite seraient diffusées. Baba Amr, ainsi que d'autres quartiers rebelles de Homs, ont fait l'objet de pilonnages incessants pendant des semaines par les autorités syriennes pour faire plier la contestation. Après la reprise par les forces gouvernementales le 1er mars de Baba Amr, assiégé pendant des semaines et ayant fait l'objet d'une crise humanitaire aiguë, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a négocié pendant plusieurs jours pour faire entrer dans ce quartier des aides urgentes. Deux journalistes étrangers, l'américaine Marie Colvin (Sunday Times) et le photographe français Rémi Ochlik, ont été tués le 22 février alors qu'ils se trouvaient avec d'autres journalistes dans une maison servant de centre de presse à Baba Amr.