L'ancien ministre algérien de l'Energie, Nordine Ait-Laoussine, a estimé mardi dernier à Paris que l'indexation des prix du gaz sur ceux du pétrole, une politique suivie depuis des années par l'Organisation des pays exportateurs (Opep), est un choix éprouvé qui nécessite une "actualisation" par rapport aux "réalités" du marché. Lors d'une déclaration faite à l'APS, en marge du 18e sommet international du gaz et de l'électricité qui se tient dans la capitale française, M. Ait-Laoussine a jugé que " pendant très longtemps, nous avons utilisé cette indexation. C'était dans nos intérêts et nous n'étions pas les seuls. Aujourd'hui, ce principe est abandonné de plus en plus parce que les réalités du marché aujourd'hui ne sont plus les mêmes ". Selon les prévisions du président du sommet et président de Nalcosa, une société de conseil en énergie basée à Genève, il arrivera un moment où des partenaires sur le marché énergétique "se débarrasseront de cette indexation". Il a ajouté à cet effet que " je ne vois pas notre pays être parmi les rares à vendre son gaz sur la base de l'indexation sur le pétrole ", suggérant qu'un " jour, on actualise, un petit peu notre politique ". A la question de savoir quel "mécanisme" de substitution pourrait intervenir en la matière alors que les prix du gaz continuent de connaître des disparités à travers le monde, l'ancien responsable Aval du groupe Sonatrach a suggéré une "formule dynamique hybride" qui, selon lui, permettrait de passer progressivement de la formule actuelle à une autre qui "reconnaisse de plus en plus les réalités du marché". "L'idée est d'indexer, en partie, les prix du gaz sur ceux du pétrole et, en partie aussi, sur ce qu'on appelle les prix postés (hub)", a-t-il expliqué, ajoutant que "se cantonner dans une position rigide ne sert pas aujourd'hui des pays comme le mien (l'Algérie, ndlr)". Il a déclaré en outre, qu' " il est juste que les marchés gaziers européen et asiatique se sont développés à partir de contrats internationaux de fourniture de gaz à long terme, structurés pour garantir le financement des investissements de l'ensemble de la chaîne gazière, du producteur au consommateur ", tout en se demandant si on pouvait prendre le risque de "fragiliser" les bases de ce modèle, qui ont fait leur preuve et assuré dans la sérénité le développement à grande échelle de l'industrie mondiale et du commerce international du gaz en assurant la sécurité énergétique à long terme. Il a rappelé que le pays occupe la 5e place mondiale en matière de liquéfaction du gaz naturel et contribue à hauteur d'environ 15% de la demande gazière de l'Union européenne. Par ailleurs, il dispose d'une capacité totale d'exportation par gazoduc de plus de 52 milliards de M3/an. Un autre sujet a été abordé lors de cette rencontre. Il s'agit de l'importance de développer les gaz de schiste. M. Ait Laoussine a annoncé qu' " on ne peut pas continuer à exporter de gaz naturel sans développer les gaz de schiste ". Pour sa part, le président du sommet et président de Nalcosa, la consommation nationale en gaz "continue de grimper au top que nous avons connu ces dernières années, c'est-à-dire un des taux les plus élevés au monde, et si on veut continuer à remplir notre capacité d'exportation pour laquelle on a investi des milliards de dollars, le conventionnel ne suffira pas à faire face aux deux". Il a fait également savoir que " c'est l'un ou l'autre choix. Si on ne commence pas à exploiter le gaz de schiste, autant commencé à réduire les capacités d'exportation, pour que nos enfants puissent avoir du gaz naturel ". Il est à rappeler d'autre part que le 17 septembre dernier, le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, a affirmé que le développement des hydrocarbures non conventionnels, notamment le gaz de schiste, est un projet "incontournable" pour l'Algérie. Il a déclaré dans un discours lu en son nom par un de ses conseillers à l'ouverture d'une rencontre sur les gaz non conventionnels que " dans notre stratégie, les projets d'hydrocarbures non conventionnels s'inscrivent comme des projets incontournables ". L'Algérie a donné en 2013 le feu vert à l'exploitation du gaz de schiste après l'amendement de la loi sur les hydrocarbures. Elle disposerait, selon des chiffres officiels, de réserves estimées à 600 trillions de m3 de gaz de schiste après études sur 180.000 km² de terrain et avec un taux de récupération de 20%, selon des chiffres officiels. Ce chiffre, s'il était confirmé, représenterait quatre fois les réserves conventionnelles actuelles de l'Algérie, selon les mêmes sources. Le pays possèderait alors un des plus importants gisements du monde alors qu'il est déjà un grand producteur de gaz conventionnel, qui fournit près de 12% du marché européen, et de pétrole. Le Sommet international du gaz et de l'électricité est une conférence organisée chaque année à Paris depuis 1996 par IFP Training, filiale de l'Institut Français du Pétrole, la revue spécialisée Pétrostratégies et l'IFP Energies nouvelles, organisme public de recherche, d'innovation et de formation dans les domaines de l'énergie, du transport et de l'environnement.