Aujourd'hui se déroulent des événements qui pourraient déterminer à long terme le sort de la communauté musulmane, soit presqu'un quart de l'humanité, a écrit hier le quotidien russe 'Nezavissimaïa gazeta'. Il y a quelques semaines, le mouvement terroriste connu comme l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) a proclamé la création d'un califat et nommé son leader: Abou Bakr al-Baghdadi, désormais calife Ibrahim. Formellement, il se présente comme l'héritier direct du prophète Mahomet et prétend à la loyauté de tous les musulmans. A la fin des années 1990 Oussama Ben Laden, leader d'une autre organisation extrémiste baptisée ensuite Al-Qaïda, avait déjà créé le Front international de lutte contre les croisés et les juifs, dont la mission principale était de rétablir un califat, c'est-à-dire regagner la gloire et la puissance d'antan du monde musulman. L'EIIL a été créé par des partisans d'Al-Qaïda en Irak après l'invasion américaine dans ce pays et la transmission du pouvoir à la majorité chiite, entraînant un changement brusque de l'équilibre des forces dans la région. Cela a provoqué l'exacerbation des divergences interconfessionnelles et interethniques, se traduisant ensuite par la montée du rôle de l'Iran et de l'organisation chiite libanaise Hezbollah qu'il soutient. L'invasion américaine en Irak a déclenché des conflits confessionnels et ethniques si dangereux que l'Etat irakien fut tout simplement incapable de les maîtriser. Et au final, nous assistons à une tentative de créer un nouveau califat de la Mésopotamie à la Méditerranée. En fin de compte l'Etat islamique, qui combattait jusqu'à présent uniquement en Syrie avec le soutien des tribus sunnites irakiennes et les anciens militaires de l'armée de Saddam Hussein, a soudainement lancé une vaste offensive sur les villes dans le nord et dans l'ouest de l'Irak. La progression rapide et la cruauté avec laquelle les extrémistes exécutent les militaires irakiens prisonniers et les habitants ont suscité la panique dans les rangs de l'armée irakienne. Des milliers d'habitants fuient les quartiers capturés, tandis que les islamistes instaurent leurs propres lois sur les territoires conquis. Sur la page personnelle du leader de l'Etat islamique sur les réseaux sociaux, il annonce que la prise du Koweït permettrait à ses camarades de se venger de l'Amérique. "Nous pourrons régler nos comptes avec l'Amérique. Nous ne pouvons pas les atteindre mais ils viendront à nous eux-mêmes, après l'attaque contre le Koweït où nous nous vengerons!" Aujourd'hui, en regardant derrière l'horizon, on prend conscience que le califat actuel représente une menace réelle non seulement pour les habitants des pays voisins, mais aussi pour toute la région, voire le monde. Manifestement, seuls des efforts communs pourraient permettre d'éradiquer cette tumeur terroriste qui progresse rapidement. Mais pour cela, les pays qui ont soutenu les islamistes doivent changer leur politique. Plus vite ils prendront conscience de cette vérité, moins il y aura de victimes.