Au moment où certains estiment que l'état actuel du marché ne justifie pas l'effondrement des cours de pétrole, le gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Laksaci, a mis en garde contre les effets de la persistance de la baisse des cours du pétrole sur la capacité financière de l'Algérie à résister aux chocs sur la balance des paiements extérieurs. En présentant un rapport sur les tendances financières et économiques du pays devant les membres de l'Assemblée populaire nationale (APN), M. Laksaci a tenu à préciser que "Les réserves de change actuelles permettent à l'Algérie de faire face aux chocs sur la balance des paiements extérieurs à court terme, mais cette capacité à résister aux chocs se dissipera vite si les cours du pétrole restaient à des niveaux bas pendant longtemps".
D'ailleurs question chiffres, la balance des paiements globale a dégagé un déficit de 1,32 milliard de dollars au premier semestre de 2014 contre un excédent de 0,88 milliard de dollars à la même période de 2013. Quant aux réserves officielles de change, elles se sont contractées à 193,269 milliards de dollars à fin juin 2014 après une progression à 194 milliards de dollars à fin 2013. Et comme les prix du baril de pétrole continuent leur chute, beaucoup de pays qui ont fondé leur économie sur la production de pétrole sont aujourd'hui contraints à la dévaluation ou à des coupes budgétaires pour endiguer les pertes importantes que la chute du baril fait peser sur les recettes fiscales. La preuve, vendredi dernier, lors d'une réunion du gouvernement, le Premier ministre russe Dmitri Medvedev, a décidé de limiter les dépenses à 90% de ce qui est inscrit dans la loi de budget pour 2015. En d'autres termes, le Premier ministre russe a donc demandé aux ministères de réduire de 10% les dépenses budgétaires prévues l'an prochain, les revenus pâtissant de la crise ukrainienne et de la chute des cours du pétrole. En novembre dernier, le ministre des Finances Anton Silouanov avait estimé que la Russie pourrait perdre 40 milliards de dollars par an à cause des sanctions et jusqu'à 100 milliards de dollars à cause de la baisse des cours du pétrole, qui s'est depuis nettement accentuée. Par contre, au début du mois de décembre en cours, le ministre des Finances, Mohamed Djellab, a indiqué que la chute des prix du pétrole n'aura pas, à court terme, un grand impact sur l'économie algérienne. Sur le court terme, cet " optimisme " se justifie par un niveau de réserves de change conséquent (195 milliards de dollars) qui couvre trois ans d'importation de marchandises. Il y a aussi une autre soupape de sécurité qui est la possibilité pour le gouvernement de piocher dans le Fonds de régulation des recettes (FRR), dont le niveau est de 5.000 milliards de dinars (plus de 48 milliards d'euros) pour couvrir le déficit. Le ministre des Finances, Mohamed Djellab, a assuré, que l'Algérie s'est préparée au choc des prix du pétrole. Il a rappelé que l'Algérie a choisi d'appliquer des politiques de prudence depuis plus d'une décennie, en anticipant le paiement de sa dette extérieure, en constituant des réserves de change et un fonds de régulation des recettes et surtout en se basant sur un prix de référence du baril de pétrole à 37 dollars pour l'élaboration de ses lois de finances. Selon le ministre, ces dispositions permettent à l'économie algérienne de supporter les chocs induits par la baisse des prix du pétrole alors que le niveau le plus bas depuis 5 ans a été atteint hier avec un baril à 70 dollars. Djellab a également soutenu qu'aucune incidence financière n'est à craindre pour les dépenses publiques, notamment celles engagées au titre des investissements dans les secteurs vitaux comme l'agriculture, la santé, l'éducation et l'habitat. Le ministre reconnaît toutefois qu'aucun pays ne peut prétendre échapper à un tel impact qui se répercutera forcément sur le pouvoir d'achat, mais que chacun répondra selon ces capacités, ajoutant que dans le cas de l'Algérie, le gouvernement prend en compte l'ensemble des scénarios. Enfin le secrétaire général de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) Abdallah al-Badri, a éstimé, avant-hier que l'état actuel du marché ne justifie pas l'effondrement des cours de pétrole. "L'offre et la demande ont connu une hausse légère qui n'explique pas cet effondrement de 50%" des prix depuis la mi-juin, a déclaré M. al-Badri à la presse en marge d'une conférence à Dubaï, intitulée "Arab Strategy Forum". Si cette chute se poursuit, poursuit-il, cela signifiera que "la spéculation contribue fortement à pousser les prix à la baisse". Le secrétaire général de l'Opep a rappelé, par ailleurs, que le plafond de production de l'organisation n'a pas changé depuis 10 ans, à quelque 30 millions de barils (mbj), alors que les pays producteurs non membres de l'Opep ont augmenté de quelque six (6) mbj supplémentaires leur offre sur le marché, contribuant ainsi à la chute des cours.