Le premier ministre espagnol José Luis Zapatero est à Alger, depuis hier, en compagnie de quelques ministres, qui composent son staff gouvernemental. Une visite qui coïncide avec celle de M. Thierry Breton, ministre français de l'Economie, des Finances et de l'Industrie. Ce n'est certainement pas, par hasard, que ces personnalités sont au même moment en Algérie. La manne financière dont jouit l'Algérie depuis l'envolée du pétrole, fait d'elle aujourd'hui une destination par excellence pour les diplomaties occidentales. Les opportunités des affaires qu'offre actuellement le marché algérien en pleine croissance et mutation, sont une aubaine pour les économies européennes qui subissent aujourd'hui des crises générées principalement par la mondialisation. Tentant de schématiser ce défilé de la France et l'Espagne vers l'Algérie, on remarque clairement l'existence d'un chassé croisé entre Paris et Madrid par rapport notamment à la question du partenariat et de coopération dans les domaines : économique, énergétique, industriel , diplomatique et même sécuritaire. La visite de M. Thierry Breton revêt un intérêt particulier, dans la mesure où la France est le premier fournisseur de l'Algérie avec 22% de parts de marché en 2005, devant l'Italie, l'Allemagne et les Etats-Unis. Un accord, pour la promotion des investissements français en Algérie, a été signé à l'occasion de cette visite. Cet accord va cadrer les opérations de promotion de l'investissement français en Algérie, avec notamment une rencontre annuelle entre les ministres des Finances des deux pays. Alger n'a cessé de critiquer la " frilosité des investisseurs " français, mais Paris estime que les choses ont changé et que les opérateurs français ont noué " des partenariats emblématiques " et disposent " d'investissements structurants dans tous les secteurs de l'économie algérienne " : agro-alimentaire, pharmacie, automobile, hôtellerie, grande distribution, services financiers. Selon les chiffres français, la France est au 2e rang des investissements directs étrangers (IDE) en Algérie, après les Etats-Unis, et au 1er rang des IDE hors hydrocarbures. Pour revenir au partenariat énergétique , parmi les quatre accords signés, lundi à l'issue de la visite de M. Thierry Breton, figurent notamment l'un sur la vente par Sonatrach d'un milliard de m3 de gaz par an à Gaz de France (GDF) , à travers le futur gazoduc Algérie-Espagne Medgaz, et l'autre sur la réservation par la Sonatrach d'une capacité de regazérification d'un milliard de m3 par an sur le terminal de Montoir dans la bassin parisien. L'arrivée simultanée de M. Zapatero et de M. Thierry Breton, à Alger, s'explique en partie en rapport au partenariat dans le secteur gazier . L'Espagne est approvisionnée à hauteur de 60% de sa consommation énergétique par l'Algérie. La visite de M. Zapatero, à Alger, est la troisième du genre, depuis qu'il occupe le poste de président du Gouvernement espagnol. Parmi les projets stratégiques entre les deux pays figure le projet " Medgaz ", le gazoduc qui relie Beni Saf à Almeria et qui va servir à approvisionner l'Europe d'une capacité de 8000 millions de m3 pendant deux années. A l'instar de la coopération énergétique entre l'Algérie et l'Espagne, existe aussi le secteur des transports, comme vient l'attester, le récent retour de la compagnie aérienne Ibéria, à Alger, après une absence d'une dizaine d'années. Le marché algérien, très porteur, suscite un intérêt particulier auprès des PME espagnoles. Pour relever la densité de la coopération économique algéro-espagnole, la Confédération des PME, catalane Pimec, avait appelé, récemment, à "l'ouverture d'un consulat d'Algérie à Barcelone pour propulser les relations économiques algéro-catalanes". Sur un autre registre on peut citer les transports ferroviaires et urbains, trains de banlieue et réseaux routiers. Le secteur de la chimie et du tourisme sont également les plus attractifs pour les opérateurs espagnols. Quant au domaine énergétique, une dizaine de projets sont en cours de concrétisation, menés par de grandes compagnies espagnoles. Notons également que l'Espagne a réitéré son soutien aux réformes adoptées par le gouvernement algérien et le processus de privatisation qui, selon les experts ibériques, exerçait déjà un certain attrait auprès des opérateurs espagnols. On citera l'entreprise espagnole Fertiberia, intéressée par l'achat des entreprises de production d'engrais, celle-ci est déjà entrée dans le capital de deux filiales du groupe public Asmidal, alors que la firme PMS lorgne sérieusement, vers le secteur des détergents qui semble être un domaine plutôt insuffisamment pourvu. La France et l'Espagne ne doivent certainement pas ignorer que l'Algérie est parmi les pays, les mieux lotis, ces deux dernières années pour attirer les investisseurs étrangers. Avec une part de 4,3% contre 3,1% en 1990, l'Algérie a occupé, en 2005, la 9e position dans le classement des pays arabes destinataires d'investissements directs étrangers (IDE). L'Algérie est à la 9e position en 2005 sur 22 pays arabes, après l'Arabie saoudite, l'Egypte, les Emirats arabes unis, le Maroc, la Tunisie, le Liban, Bahreïn et la Syrie. La France et l'Espagne ont aussi sollicité ouvertement la coopération algérienne dans le domaine de la lutte contre l'émigration clandestine maghrébine et surtout subsaharienne. Les trois parties en discutent déjà dans le cadre des réunions des 5+5. Les ministres de la Défense des 5+5 se sont déjà réunis, il y a deux jours à Paris, en plus de la conférence ministérielle des 5+5 qui a débuté, hier en Espagne, et qui aborde les questions liées à la gestion concertée des flux migratoires.