Wall Street a traversé sereinement la première hausse des taux de la Réserve fédérale (Fed) de l'année, de nouveaux records ayant porté le Dow Jones au seuil des 20.000 points cette semaine, et n'attend guère de bouleversements à l'approche des fêtes. Lors des cinq dernières séances, l'indice vedette Dow Jones Industrial Average a pris 0,44% à 19.843,41 points, le Nasdaq, à dominante technologique, perdu 0,13% à 5.437,16 points et l'indice élargi S&P 500 reculé de 0,06% à 2.258,07 points, signant tous des records en début de semaine avant de légers retraits. "La semaine était beaucoup plus intéressante que ce que l'on aurait pu penser !", a résumé Gregori Volokhine, de Meeschaert Financial Services. Principal événement économique de la semaine, la Fed, la banque centrale américaine, a relevé ses taux et resserré ainsi sa politique pour la première fois depuis un an, mais cette décision avait entièrement été anticipée par les marchés. "Cela n'a rien d'évident de relever les taux, mais la Fed s'en est bien sortie pour préparer les esprits", a expliqué Tom Cahill, de Ventura Wealth Management. De fait, après avoir un peu flanché juste après cette décision, Wall Street s'est vite remise et c'est surtout le communiqué de la banque centrale qui a retenu l'attention, sans que les investisseurs s'affolent de voir la Fed afficher son intention de mener trois nouvelles hausses en 2017. "C'est anecdotique qu'elle prévoie deux ou trois hausses de taux l'an prochain, puisque ses prévisions ne se sont jamais révélées exactes", a minimisé M. Volokhine. Chiffres de la croissance "La Fed a quand même envoyé des messages relativement fort... Mais pas dans le sens que l'on croit", a-t-il enchaîné. Selon lui, en relevant à peine ses prévisions sur l'économie, la banque centrale a affiché une attitude très prudente, alors que nombre d'investisseurs semblent parier sur une accélération de la croissance grâce aux mesures de relance et aux baisses d'impôts promises par le futur président américain, le républicain Donald Trump. "Donc, ce ne sera pas une Fed très active, ce qui va un peu dans le sens de M. Trump: si elle était trop agressive, elle contrecarrerait l'idée de faire accélérer l'économie", a conclu M. Volokhine. "Cela arrange tout le monde." Le programme de M. Trump, dont l'élection début novembre a fait flamber la Bourse, reste donc largement à l'esprit des investisseurs, qui ne semblent guère décidés à tempérer leur enthousiasme à environ un mois de la prise de fonction du nouveau chef d'Etat. "Mais ce qui est étrange, c'est que les analystes de Wall Street ne ressentent pas cet amour pour Trump", s'est étonné dans une note Nicholas Colas, de Convergex. Il remarquait que le ton et les prévisions des experts était bien plus prudent que l'attitude des investisseurs, face aux incertitudes sur la nature du plan de relance promis par M. Trump ainsi qu'aux risques représentés par le renforcement massif du dollar ces dernières semaines, encore accentué par la décision de la Fed. "La Bourse américaine va plus loin que les attentes des analystes et il n'y a pas à s'en préoccuper pour le moment", a avancé M. Colas, soulignant que ce type d'emballement se produisait cycliquement en Bourse. Les principaux rendez-vous économiques de l'année étant passés, les observateurs s'attendent tout de même à un peu d'accalmie, même si une nouvelle -et dernière- estimation de la croissance américaine du troisième trimestre, jeudi, sera cruciale pour dresser un dernier portrait de l'économie américaine pré-Trump. "Dans l'ensemble, c'est une semaine plutôt légère en indicateurs", a jugé M. Cahill. "La performance de la Bourse a été impressionnante, donc je pense qu'elle ne bougera plus beaucoup, que ce soit en hausse ou en baisse." "Il y a des prises de bénéfices parmi les secteurs qui ont été forts et il n'y a vraiment rien d'inquiétant", a expliqué Michael James, de Wedbush Securities. Ainsi le secteur financier a reculé comme les banques membres du Dow Jones Goldman Sachs (-1,69% à 238,90 dollars) et JPMorgan Chase (-1,23% à 84,94 dollars). Ce secteur a beaucoup monté depuis l'élection de Donald Trump avant de bénéficier d'un coup de pouce supplémentaire avec la décision de la Réserve fédérale américaine (Fed) mercredi de relever ses taux, assortie de prévisions pour un rythme légèrement plus rapide du resserrement monétaire en 2017. Comme quatre fois par an, ces mouvements en séance ont été accentués par un effet calendaire, de nombreuses options sur les indices et sur les actions des entreprises arrivant à expiration ce vendredi. Les investisseurs détenant ces options doivent rééquilibrer leurs portefeuilles au moment du dénouement de ces options, ce qui génère de la volatilité dans les deux sens, a indiqué Michael James. Oracle chute Le conglomérat industriel Honeywell, qui a livré vendredi une prévision financière 2017 prudente n'en a pas trop souffert et a avancé de 0,03% à 116,36 dollars. Le groupe informatique Oracle, spécialisé dans les logiciels et services à destination des entreprises, a chuté de 4,31% à 39,10 dollars. Il a annoncé un net recul de ses bénéfices au deuxième trimestre de son exercice décalé 2016/17, alors que l'activité a stagné. Dans le même secteur, Adobe Systems a reculé de 1,50% à 103,52 dollars après avoir fait part de résultats trimestriels mitigés. Le groupe internet Yahoo, au centre de spéculations sur les chances de succès d'un rachat de ses activités de coeur de métier par le géant des télécoms Verizon (+0,89% à 52,27 dollars) annoncé cet été mais non encore finalisé, a pris 0,52% à 38,61 dollars. Le laboratoire pharmaceutique américain Gilead (-1,92% à 74,10 dollars) a été condamné mercredi par un tribunal à verser 2,5 milliards de dollars à son concurrent Merck (+0,11% à 62,44 dollars) dans une affaire de brevet portant sur un de ses médicaments destiné à traiter l'hépatite C. Gilead a annoncé vouloir faire appel de cette décision. La place tokyoïte finit au plus haut depuis un an L'indice Nikkei de la Bourse de Tokyo a aligné vendredi sa 9e séance positive, une série inédite depuis fin mai 2015 qui l'a porté au plus haut depuis un an, sur fond de repli du yen après la réunion de la Fed. A l'issue des échanges, le Nikkei des 225 valeurs vedettes a gagné 0,66% (+127,36 points) à 19.401,15 points, son niveau le plus élevé depuis le 8 décembre 2015 (19.462,60 points). Sur l'ensemble de la semaine, la hausse est de 2,13%. L'indice élargi Topix de tous les titres du premier tableau a pour sa part progressé de 0,52% (+7,95 points) à 1.550,67 points. La banque centrale américaine a, comme prévu, procédé mercredi à un relèvement minime des taux d'intérêt et a surtout signalé prévoir un rythme légèrement plus rapide du resserrement monétaire en 2017, ce qui a déclenché un bond du billet vert. "Le yen s'affaiblit à une telle vitesse qu'il semble que les investisseurs anticipent déjà trois hausses de taux l'an prochain", a commenté pour l'agence Bloomberg News Juichi Wako, analyste de Nomura Holdings. "Si le taux de change actuel se maintient", c'est de bon augure pour les résultats financiers des entreprises japonaises, a-t-il ajouté. Le billet vert a aussi été soutenu par de solides statistiques américaines: activité manufacturière, inscriptions hebdomadaires au chômage et inflation. Super Mario n'enflamme pas Nintendo Sur le front des valeurs, Nintendo a chuté de 4,24% à 26.405 yens, malgré l'arrivée sur iPhone de son héros Super Mario, un tournant stratégique pour le pionnier des jeux vidéo. Des informations ont fait état de téléchargements massifs de Super Mario Run dans plusieurs pays, mais des analystes se sont inquiétés du choix par Nintendo d'une version complète payante. Ce modèle pourrait rebuter certains joueurs quand on constate le nombre impressionnant de jeux non payants disponibles sur les mobiles. Le titre de son partenaire DeNA, impliqué dans le développement de ce divertissement, a également décroché, de 6,78%, à 2.857 yens. Dans le secteur électronique, Sony a reculé de 0,77% à 3.347 yens et Panasonic de 0,88% à 1.291,5 yens, tandis que Kyocera a pris 1,98% à 5.921 yens. Du côté des constructeurs automobiles, la tendance a été contrastée: Toyota a stagné (-0,01% à 7.155 yens) mais Mazda a augmenté de 1,86% à 2.053,5 yens. Nissan a progressé de 0,99% à 1.167,5 yens alors que son P-DG Carlos Ghosn s'est montré confiant pour 2017, lors d'une table ronde avec la presse, même s'il s'attend à beaucoup de volatilité sur les marchés en cette année marquée de nombreux changements politiques aux Etats-Unis et en Europe. Les titres financiers ont quant à eux été recherchés: Mitsubishi UFJ Financial Group a avancé de 1,73% à 768,1 yens, Mizuho de 2,18% à 224,3 yens et Sumitomo Mitsui de 0,80% à 4.730 yens. A noter enfin, l'action Fujifilm a cédé 0,24% à 4.441 yens au lendemain de l'annonce d'un accord de rachat d'une importante filiale du laboratoire pharmaceutique Takeda, Wako Pure Chemical.