Dans une interview accordée à Europe 1 et TF1, le président syrien Bachar el-Assad a fustigé la politique extérieure de la France, qui selon lui, "consiste à soutenir les terroristes en Syrie". Fabien Namias, directeur de l'information d'Europe 1 et Michel Scott, éditorialiste chargé de l'actualité internationale à TF1, se sont rendus récemment à Damas pour interroger Bachar el-Assad sur la Syrie, le terrorisme et le rôle des pays occidentaux dans la politique syrienne. Autre sujet abordé, la place de la France et de François Hollande dans le conflit syrien. Dans son interview, le président syrien a fustigé les autorités françaises pour le soutien qu'elles apportent à ceux qui, selon Bachar el-Assad, ne sont rien d'autre que des terroristes. " La politique de la France, depuis le premier jour a consisté à soutenir les terroristes en Syrie, et est directement responsable des tueries dans notre pays ", a déclaré M. el-Assad. Le président syrien a présenté des arguments en faveur de cette opinion. Bachar el-Assad a rappelé l'intention de François Hollande de déclencher la guerre en Syrie il y a quatre ans. Il s'agit de la fuite d'un document " confidentiel défense " sur un projet de frappes françaises en Syrie en 2013, obtenu par des journalistes du Monde dans le cadre d'entretiens à l'Elysée avec M. Hollande. " Ce sont eux qui le disent. Je ne les accuse pas. Ils ont dit à plusieurs reprises avoir soutenu la guerre. François Hollande a même récemment déclaré que cela avait été une erreur de ne pas avoir déclenché la guerre en 2013. Ce sont eux qui ont dit qu'ils envoyaient de l'armement à ce qu'ils appellent des groupes "modérés", et qui sont en fait des terroristes. Ce sont eux qui l'ont dit, pas moi". Commentant la politique de François Hollande à l'encontre de la Syrie, Bachar el-Assad a égratigné au passage le chef de l'Etat français. " Je ne l'ai (François Hollande) jamais rencontré. Pour être franc, je ne me soucie aucunement de lui avec ses 11% de popularité, ce qui je pense s'appelle toucher le fond comme jamais aucun de ses prédécesseurs dans l'histoire de France ". Et d'ajouter: " En fait, il s'agit avant tout d'une affaire entre moi et les terroristes, et entre moi et quiconque soutient les terroristes ". La Russie respecte la souveraineté de la Syrie Selon le président syrien Bachar el-Assad, Moscou mène des opérations antiterroristes en Syrie tout en respectant la souveraineté de ce pays et le président russe Vladimir Poutine n'influe pas sur la prise de décisions en Syrie. Ce sont les Syriens qui prennent les décisions dans leur pays et non le président russe Vladimir Poutine. La Russie respecte la souveraineté de la Syrie, a déclaré jeudi à Damas le président syrien Bachar al-Assad. " En Syrie, c'est nous qui prenons les décisions. Quant aux autres pays, je ne peux parler en leur nom. Les Russes respectent notre souveraineté, à chaque étape qu'ils ont franchie, qu'elle soit d'ordre stratégique ou tactique, ce fut en coopération avec la Syrie. Ils n'ont jamais rien fait sans nous consulter ", a indiqué le dirigeant syrien à la radio Europe 1 et à la chaîne de télévision TF1. Selon lui, l'aide de Moscou a été cruciale dans l'affaiblissement des groupes terroristes Etat islamique (Daech) et Front al-Nosra en Syrie. " Il est certain que le soutien des Russes a été crucial dans l'affaiblissement de Daech et du Front al-Nosra parce que ces groupes s'étaient mis à s'entendre quand la coalition américaine a commencé ses attaques, sa campagne cosmétique. Et ils ont progressé jusqu'à ce que les Russes interviennent et les poussent à se rétrécir. C'est une réalité ", a noté le président al-Assad. Le président syrien a accordé cette interview au moment où des consultations multilatérales sur la paix en Syrie se déroulent à Astana, au Kazakhstan. Les consultations ont réuni mercredi les représentants des autorités et de l'opposition syrienne, ainsi que de la Russie, de l'Iran, de la Turquie, de la Jordanie et des Nations unies. D'après un participant aux consultations, les résultats de la séance programmée pour ce jeudi influeront sur le sort des négociations inter-syriennes qui débuteront le 23 février à Genève. Les consultations d'Astana s'inscrivent dans le prolongement des négociations tenues dans la capitale kazakhe les 23 et 24 janvier à l'initiative du président russe. Vladimir Poutine avait proposé de créer un terrain de discussions supplémentaires consacrées sur le processus de paix syrien et les présidents turc et kazakh avaient soutenu cette idée. Moscou veut dresser une carte des djihadistes La Russie plaide pour une meilleure coordination entre le gouvernement syrien, l'opposition modérée et les parrains d'Astana, à savoir elle-même, la Turquie et l'Iran. L'objectif est que tous combattent plus efficacement les djihadistes en Syrie. La Russie souhaite disposer au plus vite d'une carte relevant les positions de l'opposition modérée participant au processus de paix et celles des groupes terroristes. Ce document devrait être établi par l'ensemble des parties prenantes, a expliqué le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou lors de sa rencontre avec l'émissaire spécial du secrétaire général de l'Onu pour la Syrie, Staffan de Mistura. " Nous espérons qu'aujourd'hui (lors des négociations sur la Syrie à Astana), on pourra décider de dresser une carte unique de la Syrie et l'adopter. Cette carte devrait permettre de relever toutes les données soumises par l'opposition et le gouvernement syriens et de voir exactement les positions de l'opposition modérée qui respecte le régime du cessez-le-feu et les positions de ceux qui ne le font pas ", a indiqué le ministre. Par " ceux qui ne le font pas ", Sergueï Choïgou pense à Daech et A-Nosra, comme il le précise ensuite : " Ce qui est très important, c'est de marquer les positions des djihadistes de Daech et du Front Al-Nosra que nous continuerons à combattre ensemble avec l'opposition modérée et nos alliés, la Turquie et l'Iran ", a souligné le ministre russe de la Défense. Les troupes de Damas et l'opposition modérée respectent la trêve en vigueur depuis décembre dernier, a ajouté le ministre. Les efforts déployés par les pays médiateurs dans le conflit syrien ont contribué à mettre fin aux affrontements directs entre l'armée syrienne et l'opposition modérée, a déclaré aujourd'hui le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou à l'issue d'une rencontre avec Staffan de Mistura, représentant spécial du Secrétaire général de l'Onu pour la Syrie. " Nous espérons qu'il sera possible d'établir un dialogue constructif avec l'opposition. Finalement, ce qu'on a réussi à obtenir après le 29 décembre (l'instauration de la trêve, ndlr), ce qui règne aujourd'hui est bien meilleur que ce qui était observé auparavant ", a indiqué M. Choïgou. " Le nombre de pilonnages a considérablement diminué, les affrontements directs ont pris fin ", a-t-il poursuivi. Le cessez-le-feu entre Damas et l'opposition a été adopté fin décembre en vertu d'un accord conclu sous l'égide de la Russie et de la Turquie.