Bentley, Lamborghini, Maserati, Rolls-Royce… Tous les constructeurs de luxe ou presque annoncent un SUV. Tous, sauf McLaren, qui n'en a pas besoin pour être rentable. C'est un secret pour personne : les SUV ont le vent en poupe et assurent la rentabilité de nombreux constructeurs. Au point que la plupart des marques cèdent à la tentation, même si ce type de véhicule semble à l'opposé de leur image de bon goût ou de sportivité. Signe des temps, à peine la nouvelle Alpine A110 lancée, on parle déjà de lui adjoindre un dérivé surélevé, à condition que le succès de la berlinette soit au rendez-vous (lire notre article sur la stratégie d'Alpine). Il semblerait qu'aucune marque haut-de-gamme ou de luxe n'échappe à la tendance. Tel le village d'Astérix pourtant, McLaren résiste encore et toujours à l'envahisseur. Réapparue en 2010 sur le marché des voitures de route après une longue éclipse, la marque britannique annonce en effet ne pas vouloir recourir à ce type de véhicules. D'une part, et c'est également la raison avancée par Ferrari, un SUV ne cadrerait pas avec l'image de la marque. Aussi et surtout, le petit constructeur n'a pas besoin de cela pour être rentable. Chez McLaren, tout ou presque est fabriqué dans l'usine de Woking, située à une encablure du centre de recherche et développement ultra-moderne. De 1.500 voitures produites à l'année aux débuts du premier modèle, la MP4-12C, le chiffre a aujourd'hui grimpé en flèche pour frôler les 4.000 unités annuelles. Ce, grâce au lancement en 2015 d'un "petit" modèle, la Sport Series (570 S, 540 C et 570 GT), concurrent direct des Lamborghini Huracan et Ferrari 488 GTB. Il ne manque plus grand-chose pour atteindre la capacité maximale de l'usine, de 5.000 voitures par an. La nouvelle génération de Super Series, dont la première version est la 720 S récemment dévoilée au Salon de Genève, devrait combler l'écart, son déploiement n'étant pas terminé. Cette version est en effet la première d'une quinzaine de modèles annoncés d'ici à 2022, dans le cadre du plan Track22.
McLaren Automotive est rentable depuis 2013 McLaren suit donc avec rigueur et succès un business plan élaboré avant la crise et qui se révèle aujourd'hui justement calculé. Ce n'est qu'une question de mois avant que l'usine ne tourne à pleine capacité, et la division automobile est rentable depuis 2013. Nul besoin donc pour la marque de compromettre sa philosophie d'excellence technique et de performance avec un SUV, forcément moins efficace du fait d'un centre de gravité surélevé et de masses non suspendues plus importantes. Car la philosophie de McLaren semble trouver un écho auprès des clients. Une large majorité d'entre eux utilisent en effet leur auto sur circuit. Et une bonne part de ceux qui n'avaient pas l'habitude de limer la piste y viennent bien vite lorsqu'ils craquent pour une supercar du constructeur britannique. Témoin : ce client de P1 qui prend aujourd'hui des cours de drift avec un champion de la discipline ! Le paraître passe au second plan pour cette clientèle, qui semble attacher moins d'importance au logo qu'à la technologie. Voilà qui diffère de Bentley ou Ferrari, par exemple. Au contraire de cette dernière, qui a récemment annoncé ne plus vouloir produire de voitures roses pour des questions de bon goût, McLaren juge qu'elle n'a pas de rôle de "police du style" à jour. Toutes les extravagances sont permises, grâce au département MSO (McLaren Special Operations) qui peut réaliser de la simple série spéciale jusqu'au modèle totalement recarrossé. Qu'importe le style, du moment que l'auto est efficace : chez McLaren, le produit est plus important que son image. La question des performances est donc aussi cruciale que la rentabilité dans l'absence de SUV au sein de la gamme McLaren. Tout comme le choix de produire toutes les pièces en interne, y compris les plus insignifiantes comme les commodos. Aujourd'hui, seules les éléments en carbone sont encore fabriquées à l'extérieur, en Autriche. Mais plus pour longtemps, puisque McLaren annonce la construction d'une unité de production dédiée à Sheffield. Un moyen de plus de contrôler de A à Z avec un soin maniaque le moindre détail de ses autos pour offrir la meilleure performance possible. Puisque la clientèle s'y reconnaît, c'est tant mieux.