L'Union européenne (UE) et ses Etats membres doivent condamner la répression, la violence et la persécution policière pour des raisons politiques ainsi que la torture et les traitements inhumains et dégradants que les forces de sécurité marocaines infligent aux manifestants pacifiques de la contestation populaire dans le Rif, ont exigé les participants à la conférence-débat organisée mardi à Bruxelles en soutien au soulèvement populaire dans cette région. "Il faut que l'UE arrête d'ignorer les revendications des mouvements politiques", a déclaré le député européen Miguel Urban Crespo, initiateur de la conférence, jugeant le moment "opportun" de faire pression sur l'UE pour qu'elle use des outils dont elle dispose afin d'amener le Maroc à respecter les droits de l'homme. Faisant le parallèle avec le conflit au Sahara occidental, cet eurodéputé a dénoncé "les faveurs politiques" dont a bénéficié le Maroc auprès de l'UE, notamment dans le cas du conflit au Sahara occidental, affirmant que l'Union doit se conformer à l'arrêt de la Cour européenne de justice (CJUE) qui a conclu en décembre dernier que les accords UE-Maroc ne sont pas applicables au Sahara occidental. Lors de cette conférence organisée au Parlement européen, l'eurodéputé Florent Marcellesi a déploré la position de l'UE par rapport au mouvement de contestation populaire qui agite le Rif marocain depuis plus de 7 mois, regrettant que l'Union n'ait "rien fait" pour protéger les manifestants. "L'UE n'a rien fait, encore moins Mogherini, pour exiger une solution à ce conflit et dénoncer la réponse, par la répression, du régime marocain aux revendications légitimes des manifestants", a-t-il regretté, faisant remarquer que l'UE aurait pu activer une clause sur le respect des droits de l'homme figurant dans l'accord d'association UE-Maroc. Soulignant la nécessité de "dénoncer ce qui se passe dans le Rif", ce député européen a annoncé la visite au Maroc, la semaine prochaine, d'une délégation de la commission des Affaires étrangères (AFET) au Parlement européen qui "évoquera, à coup sûr, avec les autorités marocaines la question du Rif". Il a assuré, en outre, les militants du mouvement "Hirak" participant à l'évènement de son "soutien total" et de celui de tous les députés "Vert" au Parlement européen sur lesquels le mouvement "peut compter" pour faire connaître leur combat. La journaliste espagnole, spécialiste des droits humains, Patricia Campelo a observé "le même "modus opérandi" au Rif et au Sahara occidental pour réprimer des manifestants pacifiques qui continuent à occuper la rue", citant les nombreuses violations des droits de l'homme dans les deux cas, les disparitions forcées et le refoulement des journalistes pour que le régime marocain puisse "poursuivre sa politique de répression à huis-clos". Du jamais vu depuis plus de 15 ans Lina Charif, membre du comité de soutien au Hirak à Lille et membre fondateur de la coordination européenne de soutien au Hirak a assuré que plus de 500 rifains sont arrivés en Espagne en l'espace de deux semaines, fuyant la répression policière qui s'est abattue sur la région. "Du jamais vu depuis plus de 15 ans", a-t-elle déclaré, soulignant que ces rifains, accusés de séparatisme, se sont réfugiés en Espagne où ils ont demandé l'asile politique. Lina Charif a exhorté, à ce titre, l'UE à utiliser les accords qui la lie au Maroc pour faire pression sur le régime afin qu'il libère les prisonniers politiques. "Il est temps que la communauté internationale fasse quelque chose" pour la population du Rif, a-t-elle encore estimé. L'avocat Abdessadek El Bouchtaoui, en charge du cas des détenus, a dénoncé les arrestations "arbitraires" des militants du mouvement Hirak et des citoyens ayant participé aux manifestations pacifiques, ainsi que les conditions de leur détention, affirmant que les détenus "ont été torturés et maltraités" malgré la ratification par le Maroc des conventions internationales comme la convention contre la torture. Il a exhorté, à l'occasion, l'UE à inscrire la question du Rif à l'ordre du jour de son dialogue politique avec le Maroc et à faire pression sur le régime pour la libération de tous les prisonniers politiques du Rif, et pour que cette politique de répression cesse. Depuis le vendredi 26 mai, une vague de répression, accompagnée par des arrestations massives, s'est abattue sur la ville d'Al-Hoceïma en particulier, et s'est étendue à d'autres parties du Rif. Le journaliste marocain Fahmi Labib a exprimé, de son côté, son "indignation" et sa "révolte" après la publication d'une vidéo du leader du mouvement Hirak Nasser Zefzafi "presque nu". "Cette vidéo nous rappelle la prison d'Abou Ghreib. C'est une atteinte à la dignité humaine", s'est-il insurgé.