La Chine et les Etats-Unis étaient mardi plus proches que jamais d'une guerre commerciale, Pékin promettant des "représailles" après des menaces la veille de Donald Trump d'imposer de nouvelles taxes prohibitives sur les produits chinois importés. La tension commerciale inquiétait les places boursières mondiales, particulièrement en Chine, où Shanghai a clôturé en repli de près de 4%, à son plus bas niveau depuis septembre 2016, tandis que la Bourse de Shenzhen, deuxième place de Chine continentale a chuté de 5,77%. M. Trump a demandé lundi au représentant américain au commerce Robert Lighthizer "d'identifier 200 milliards de dollars de biens chinois en vue de tarifs supplémentaires de 10%". Il entend ainsi compenser les mesures de rétorsion "inacceptables" prises par Pékin face à une première série de taxes américaines décidées vendredi. Et le président américain pourrait aller encore plus loin: il taxera 200 milliards de dollars de biens supplémentaires "si la Chine augmente à nouveau ses tarifs douaniers" en réaction. Ces mesures pourraient porter à 450 milliards la valeur des produits chinois taxés -- soit la grande majorité des importations venues de Chine. "Ces pratiques de pression extrême et de chantage s'écartent du consensus auquel les deux parties sont parvenues à maintes reprises durant leurs consultations" ces dernières semaines, a dénoncé le ministère chinois du Commerce mardi, dans un communiqué. "Si les Etats-Unis perdent le sens commun et publient une liste (de produits visés), la Chine se verra dans l'obligation d'adopter une combinaison de mesures quantitatives et qualitatives en forme de représailles énergiques", a-t-il mis en garde. En annonçant vendredi des droits de douane de 25% sur 50 milliards de dollars d'importations chinoises, pour compenser selon lui le vol par la Chine de technologies et de propriété intellectuelle américaines, Donald Trump avait déjà prévenu: si Pékin venait à répliquer, il imposerait des droits de douanes additionnels. Une menace à laquelle le géant asiatique était resté sourd puisqu'il avait annoncé dans la foulée qu'il imposerait des taxes à l'identique sur des marchandises américaines.
'Pas énormément d'options' "Des mesures supplémentaires doivent être prises pour encourager la Chine à changer ses pratiques déloyales et à ouvrir son marché aux biens américains", a justifié lundi soir Donald Trump dans un communiqué. "Cette escalade dangereuse est l'ultime rappel que le Congrès doit intervenir et exercer son autorité sur la politique commerciale", a fustigé dans un communiqué la National Retail Federation, un lobby américain de la distribution. Environ 455 000 emplois américains sont menacés par les dernières mesures punitives contre la Chine, a calculé la NRF, qui estime qu'une autre conséquence va être une hausse du prix des produits de base. En 2017, les Etats-Unis ont exporté pour 130,4 milliards de dollars de marchandises vers le géant asiatique, deuxième puissance économique mondiale. Ils ont importé dans le même temps 505,6 milliards de biens chinois, selon les statistiques du département du Commerce. Soit un déficit de plus de 375 milliards. Donald Trump entend forcer Pékin à réduire le déficit commercial des Etats-Unis de 200 milliards de dollars. "La Chine n'a pas énormément d'options. Car elle importe peu des Etats-Unis et n'a pas davantage de marchandises à taxer", estime Christopher Balding, économiste à l'Ecole de commerce HSBC à Shenzhen (sud de la Chine). "Elle peut lancer des enquêtes sur toutes les entreprises liées aux Etats-Unis, mais cela ne ferait que donner raison à Trump. A bien des égards, la Chine n'a pas beaucoup de force de frappe en matière de représailles".
Inquiétudes aux Etats-Unis "Les relations commerciales entre les Etats-Unis et la Chine doivent être bien plus équitables", a martelé lundi Donald Trump, qui a imposé dès fin mars des taxes de 25% sur l'acier et de 10% sur l'aluminium chinois, également au nom de la défense de la sécurité nationale. Les annonces de vendredi ont mis fin à une trêve entre les deux premières puissances mondiales, qui avait été annoncée le 19 mai à la suite d'âpres discussions entre de hauts responsables chinois et américains, d'abord à Pékin puis dans la capitale américaine. L'administration Trump doit en outre publier d'ici le 30 juin des mesures de restrictions aux investissements chinois. Aux Etats-Unis, la politique commerciale américaine suscite des inquiétudes chez les agriculteurs susceptibles d'être les plus durement touchés par les mesures chinoises. Les secteurs automobile et aéronautique redoutent eux aussi les conséquences de ce conflit.