Donald Trump a déclenché jeudi son offensive commerciale maintes fois annoncée contre la Chine qui s'apparente toutefois davantage à un avertissement qu'à des mesures immédiates pour répondre aux "pratiques déloyales" du géant asiatique. Le président américain a signé "un mémorandum ciblant l'agression économique de la Chine" et évoqué des mesures punitives contre des importations chinoises d'un montant pouvant atteindre "60 milliards de dollars" pour mettre un terme à ce qu'il affirme être la concurrence déloyale de Pékin et le vol de propriété intellectuelle. Plus tôt, ses conseillers économiques avaient parlé de "quelque 50 milliards". Quasiment simultanément, l'administration Trump a joué la carte de l'apaisement avec plusieurs de ses principaux alliés, dont l'Union européenne, l'Australie et la Corée du sud, en confirmant jeudi que ceux-ci seraient, comme le Canada et le Mexique, dans un premier temps exemptés des taxes sur les importations d'acier et d'aluminium promulguées le 8 mars. Pour ce qui est de la Chine, l'administration américaine n'a pas été d'une clarté absolue sur la nature exacte des montants évoqués: s'agit-il de la valeur des importations qui seront taxées ou bien du montant des taxes récoltées sur ces importations?
Haute technologie Le ministre du Commerce Wilbur Ross a lui expliqué qu'il s'agissait avant tout d'un "prélude à une série de négociations". Pour autant, cette annonce pourrait amorcer une guerre commerciale. "Nous exhortons les Etats-Unis à revenir sur leur décision (...) et à éviter de mettre les relations commerciales entre la Chine et les Etats-Unis en danger", a averti l'ambassade de Chine aux Etats-Unis dans un communiqué. "Si une guerre commerciale devait être initiée par les Etats-Unis, la Chine se battrait jusqu'au bout pour défendre ses propres et légitimes intérêts par tous les moyens nécessaires", a-t-elle prévenu. Concrètement, le président a chargé "le représentant au commerce (USTR) de publier une liste de produits et des taxes envisagées qu'il compte prendre dans les 15 jours suivant la signature du mémorandum", a précisé Everett Eissenstat, directeur adjoint du conseil économique national. Il s'agit par ce biais de compenser les gains obtenus par les Chinois grâce à des pratiques commerciales jugées déloyales. L'USTR, Robert Lighthizer, devra aussi "recourir au processus de règlement des conflits de l'Organisation mondiale du Commerce (OMC) pour s'attaquer aux pratiques discriminatoires dans l'octroi de licences par la Chine". M. Lighthizer a souligné que les mesures contre la Chine visaient en particulier à préserver le secteur des hautes technologies, jugé "la partie la plus essentielle" de l'économie américaine, à l'importance inégalée dans le monde, selon lui. "44 millions de personnes travaillent dans le secteur des hautes technologies (...) c'est véritablement le pilier de l'économie américaine à venir", a-t-il également réagi, s'exprimant après le président américain.
"Discrimination" Les Etats-Unis, dont la compétitivité dépend de leur capacité à innover, avaient ouvert en août 2017 une enquête au titre de l'article 301 de leur législation commerciale sur des violations supposées des droits de propriété intellectuelle. Washington s'inquiète en particulier du système de coentreprises imposé par Pékin aux entreprises américaines: en contrepartie d'un accès au marché chinois, ces firmes sont obligées de partager avec des partenaires locaux une partie de leur savoir-faire technologique. L'ambassadeur chinois Cui Tiankai a jugé "totalement infondées" ces accusations assurant que "les lois chinoises protégeaient les droits de propriété intellectuelle". "Je souhaiterais que les gens prennent conscience que la Chine et les pays en développement sont tout à fait capables d'innover. Ils (les Etats-Unis) ne devraient pas croire qu'ils ont le monopole de l'innovation et que toute autre personne ne fait que les voler", a-t-il poursuivi, estimant qu'il s'agissait d'une forme de "discrimination". Les Etats-Unis et la Chine sont aujourd'hui des partenaires commerciaux étroitement liés. Mais Washington déplore son colossal déficit commercial (375,2 milliards de dollars en 2017) avec Pékin. Donald Trump a répété jeudi avoir demandé aux plus hauts représentants chinois "de réduire, immédiatement, ce déficit de 100 milliards de dollars". "Le mot-clé est réciproque", a-t-il insisté tout en précisant que la Chine était un pays "ami". Pékin pourrait en rétorsion viser des produits agricoles américains comme le soja, le sorgho et le porc d'élevage. Robert Lighthizer a de son côté expliqué que les produits chinois visés par ces nouvelles taxes le seraient en fonction d'un algorithme permettant de détecter les marchandises subventionnées. Dans ce dossier, les Etats-Unis cherchent enfin à obtenir l'appui de leurs autres partenaires commerciaux. "C'est un problème qui concerne le monde entier, tous ceux qui commercent avec la Chine le rencontrent", a estimé Peter Navarro, le conseiller en matière commerciale de Donald Trump.
La Chine contre-attaque La Chine a dévoilé vendredi une liste de droits de douane qu'elle pourrait imposer sur des importations de produits américains représentant 3 milliards de dollars, en rétorsion aux sanctions commerciales annoncées par Washington. "La Chine n'a en aucun cas peur d'une guerre commerciale", a averti le ministère chinois du Commerce dans un communiqué, après avoir publié une liste de représailles potentielles aux mesures américaines. Les sanctions annoncées par le président américain Donald Trump ont fait plonger les places boursières chinoises vendredi à l'ouverture, Hong Kong plongeant de plus de 3% tandis que Shanghai abandonnait 2,80%. La liste chinoise vise des produits tels que le vin, les fruits et la viande de porc. Ces droits de douane seront institués si Pékin ne parvient pas à une solution négociée avec les Etats-Unis, a précisé le ministère. Donald Trump a déclenché jeudi son offensive commerciale maintes fois annoncée contre la Chine. Il a signé "un mémorandum ciblant l'agression économique de la Chine" et évoqué des mesures punitives contre des importations chinoises d'un montant pouvant atteindre "60 milliards de dollars" pour mettre un terme à ce qu'il affirme être la concurrence déloyale de Pékin et le vol de propriété intellectuelle. Plus tôt, ses conseillers économiques avaient parlé de "quelque 50 milliards". En réponse, Pékin a publié une liste de 128 lignes tarifaires (catégories de produits), divisée en deux groupes. Le premier groupe de produits, comprenant 120 lignes tarifaires, sera taxé à 15%. Il s'agit de produits tels que fruits frais, vin, éthanol, ou ginseng, autant de marchandises qui ont représenté près d'un milliard de dollars d'importations en Chine en 2017. Le deuxième groupe, qui comprend le porc et l'aluminium recyclé, sera taxé à 25%. Ce groupe ne comprend que huit lignes tarifaires, mais correspondant à près de 2 milliards de dollars d'importations l'an dernier, a expliqué le ministère du Commerce. La liste ne comprend cependant pas le soja, que les Américains ont exporté en Chine à hauteur de 14 milliards de dollars l'an dernier. Si ce produit devait être visé, les conséquences pourraient être graves pour les agriculteurs américains, particulièrement dans les Etats ayant soutenu Donald Trump lors de l'élection présidentielle de 2016. Pékin "appelle les Etats-Unis à répondre au plus vite aux inquiétudes de la Chine" afin "d'éviter de causer du tort à l'ensemble de la coopération" entre les deux pays, avertit le ministère. Pékin se dit prêt par ailleurs à déclencher une procédure contre les mesures américaines auprès de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).