Les exportations chinoises ont subi une baisse inattendue en avril alors que les importations progressaient pour la première fois en cinq mois, dressant un tableau mitigé pour l'économie chinoise à la veille de la reprise des négociations commerciales entre Pékin et Washington. La publication mercredi des chiffres mensuels de la balance commerciale a été en grande partie éclipsée par le regain de tension entre les Etats-Unis et la Chine alors que les deux plus grandes puissances économiques mondiales semblaient proches de la conclusion d'un accord commercial. Les négociations reprennent au niveau ministériel à Washington jeudi et vendredi et Pékin devrait s'efforcer d'éviter une hausse des tarifs douaniers annoncée pour vendredi par le président Donald Trump. Alors que les investisseurs espéraient voir les données du commerce extérieur confirmer les récents signes de stabilisation de l'économie chinoise, les données des douanes montrent que les exportations ont diminué de 2,7% en avril par rapport au même mois de l'an dernier. La banque ANZ estime que 80% de cette baisse est due à une chute des livraisons aux Etats-Unis et ajoute que les exportations de produits technologiques ont continué de pâtir du ralentissement de la demande mondiale pour les smartphones et autres appareils électroniques. Les analystes interrogés par Reuters anticipaient au contraire une progression de 2,3% des exportations après un important rebond en mars (+14,2%), que plusieurs observateurs avaient expliqué par des facteurs saisonniers et exceptionnels. "Les perspectives chinoises en matière d'exportations sont difficiles. Si Trump met à exécution ses dernières menaces tarifaires, nous pensons que cela pourrait amputer la croissance des exportations de deux à trois points de pourcentage", écrivent les analystes de Capital Economics dans une note.
Un signe d'amélioration de la demande intérieure "Même si un accord de dernière minute est conclu cette semaine pour éviter de nouveaux droits de douane, les faibles perspectives de croissance mondiale signifieront probablement que la croissance des exportations restera contenue." Les importations chinoises, elles, ont dépassé les attentes en avril avec une croissance de 4,0% en rythme annuel, leur première hausse depuis novembre, alors que le consensus Reuters les donnait en repli de 3,6% après une baisse de 7,6% en mars. Ce chiffre suggère une amélioration de la demande intérieure, soutenue par les mesures de relance mises en oeuvre depuis l'an dernier par Pékin. Les importations de cuivre, métal très utilisé dans la construction et l'industrie manufacturière, ont notamment rebondi mais elles restent en baisse sur un an. Les principaux partenaires commerciaux de la Chine, ses grands fournisseurs comme Caterpillar et les investisseurs suivent de près les données chinoises pour voir quand les mesures de soutien commenceront à porter leurs fruits. Pour Tang Jianwei, économiste chez Bank of Communications à Shanghai, la Chine sera perdante quelle que soit l'issue de son bras de fer avec les Etats-Unis. "Si les négociations commerciales échouent, tant la demande extérieure qu'intérieure pourrait être affectée. Et s'il y a un accord, la Chine devra augmenter ses importations en provenance des Etats-Unis, ce qui réduira son excédent commercial et donc la contribution du commerce extérieur à sa croissance", explique-t-il.
Une incitation au compromis pour Pékin? L'excédent commercial chinois est ressorti à 13,84 milliards de dollars (12,36 milliards d'euros) en avril, alors que les économistes tablaient en moyenne sur un montant de 35 milliards de dollars. L'excédent bilatéral avec les Etats-Unis, sujet sensible à Washington, s'est accru à 21,01 milliards de dollars contre 20,5 milliards en mars. Les importations chinoises en provenance des Etats-Unis ont chuté de près de 26% tandis que les exportations vers ce pays reculaient d'un peu plus de 13%. Certains analystes pensent que la récente amélioration des indicateurs économiques tant chinois qu'américains a pu amener les deux parties à durcir leurs positions après des mois de progrès des discussions quand les perspectives économiques semblaient plus délicates. La Chine a publié des indicateurs étonnamment robustes pour le mois de mars mais les premières données d'avril sont moins fringantes, suggérant que la deuxième économie mondiale peine à retrouver son rythme de croisière. Les enquêtes dans le secteur manufacturier, en particulier, montrent que la demande ne se redresse que très lentement en Chine comme à l'international, relançant le débat sur le degré de soutien que Pékin doit accorder à l'économie sans risquer un nouvel emballement de la dette. "Le niveau des exportations chinoises vers les Etats-Unis va aussi inquiéter le pouvoir chinois, surtout avec le risque potentiel d'escalade de la guerre commerciale", observe Nick Marro, analyste à l'Economist Intelligence Unit. "Ces données donnent un caractère d'urgence aux négociations de cette semaine et pourraient pousser la Chine à rechercher plus activement un compromis malgré sa réticence passée à négocier sous la menace."