La proclamation d'un mini Etat d'Al Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) aux portes Sud de l'Algérie est à craindre. La nébuleuse d'Aqmi soutenue par le leader touareg islamiste Iyad Ag Ghaly, à la tête du mouvement islamiste Ansar Dine, s'apprête à instaurer un émirat dans cette région sensible et à appliquer la charia (loi islamique) dans cette ville historique. Trois chefs d'Aqmi se sont emparés de la ville malienne de Tombouctou, à 800 km au nord-est de Bamako, à savoir Abou Zeid, Mokhtar Belmokhtar et Yahya Abou Al Hammam. La proclamation d'un mini Etat d'Al Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) aux portes Sud de l'Algérie est à craindre. La nébuleuse d'Aqmi soutenue par le leader touareg islamiste Iyad Ag Ghaly, à la tête du mouvement islamiste Ansar Dine, s'apprête à instaurer un émirat dans cette région sensible et à appliquer la charia (loi islamique) dans cette ville historique. Trois chefs d'Aqmi se sont emparés de la ville malienne de Tombouctou, à 800 km au nord-est de Bamako, à savoir Abou Zeid, Mokhtar Belmokhtar et Yahya Abou Al Hammam. La politologue Louisa Ait Hamadouche, enseignante à la faculté des sciences politiques et relations internationales d'Alger, répond à nos questions et nous livre son analyse sur la situation qui prévaut dans la région du Sahel. Midi Libre : Quelle peut être la stratégie de l'Algérie face à cette nouvelle situation au Mali ? Louisa Aït Hamadouche : Je crois d'abord que l'Algérie peut profondément regretter et condamner l'escalade au Mali, mais ne peut pas en être surprise, car l'ensemble de sa stratégie régionale et de ses prises de positions récentes étaient autant de sonnettes d'alarme. Je pense notamment aux mises en garde quant à la gestion militarisée du conflit libyen qui ont valu à l'Algérie des critiques extrêmement dures. L'Algérie avait raison. Je suppose donc que ce scénario a été intégré par les responsables algériens et des stratégies de riposte ont été planifiées. De mon point de vue, l'Algérie maintiendra sa politique qui est la sienne depuis la deuxième révolte des touareg de 1990, à savoir la médiation. Mais pour cela, vous devez avoir deux parties, définies, aux objectifs établis et négociables. Aussi pourrait-elle favoriser en premier lieu la réhabilitation d'un pouvoir central capable de négocier. Compte tenu de la faiblesse de la junte et de la façon dont le coup d'Etat a eu lieu, c'est peut-être la partie la moins difficile puisque Amadou Sanogo a déjà amorcé un processus de négociation politique avec les partis maliens. Le plus dur concerne la rébellion marquée par son hétérogénéité et ses connexions radicales et criminelles. Il n'est pas exclu que le MNLA et Ansar Dine entrent en guerre de position, compte tenu de leur rivalité. Mais des négociations-marchandages ne sont pas exclus, compte tenu du profil et du parcours de Iyad Ag Ghali. Quels peuvent être les atouts de l'Algérie, dans ce cas de figure ? L'Algérie possède un atout : elle connaît bien les acteurs et peut enclencher une diplomatie parallèle, celle des réseaux, qui est sans doute le meilleur moyen d'obtenir des résultats. Au niveau macro, et à moyen et long termes, on ne sortira pas de la logique des accords d'Alger, car dans le cas contraire, il faudra s'attendre à l'implosion du Mali. Peut-on s'attendre à voir une intervention militaire menée par les pays de la région ? Je doute très fortement qu'une intervention militaire soit la solution à la confusion actuelle. Car il s'agit bien d'un conflit interne, dans lequel il n'existe pas deux parties, bien délimitées, des bons et des méchants si vous me permettez l'expression. En plus, intervenir contre qui ? Si vous déclarez la guerre à la junte au pouvoir, vous risquez soit l'effondrement total du peu d'institutions qui fonctionnent encore au Mali, ou le resserrement des rangs des militaires, faisant front contre un ennemi extérieur. En parallèle, vous donnez aux mouvements touareg des idées, comme par exemple traverser le fleuve Niger et marcher vers Bamako. Deuxième hypothèse, vous lancez une intervention contre la rébellion sous l'égide de la lutte contre le sécessionnisme et le terrorisme. Dans ce cas, vous pouvez déclencher une solidarité régionale ethnique et donc une réaction hostile des Touareg des pays limitrophes. Autre élément, les Touareg ne forment pas un bloc monolithique, et sont perméables à des infiltrations terroristes. Or, en cas d'intervention militaire, vous risquez de multiplier par 10 le nombre de MUJAO et autres adeptes plus ou moins crédibles d'Al Qaida. Supposons que toutes ces objections soient effacées et qu'une intervention soit lancée. Quelle est la stratégie de sortie ? Car il ne s'agit pas d'envoyer des troupes et d'espérer que les choses se calmeront comme par magie. Le revers c'est souvent l'enlisement et la création d'une situation encore plus grave que la précédente et les exemples sont légion avec des armées autrement plus aguerries que les troupes de la région ! Et puis, voyez la Somalie, où la configuration sociétale et géographique croise en plusieurs points celle du Mali. L'option militaire n'a fait que complexifier un conflit qui n'était déjà pas simple à l'origine. L'Algérie optera-t-elle pour le choix militaire, compte tenu des développements de la situation ? A tous ces éléments, je dirais qu'il n'est pas dans la tradition de notre pays d'intervenir militairement dans un conflit interne sans l'aval explicite du Conseil de sécurité et sans le recours au chapitre 7 de la charte des Nations unies. Je vois mal, l'Algérie revenir sur ce principe après l'avoir défendu à son corps défendant sur le cas de la Libye. Et si vous pensez au structures mises en place par les pays du champ, je ne crois pas qu'elles soient destinées à ce type d'action et je n'imagine pas du tout le Niger, en supposant qu'il en ait les moyens, prendre part à une opération coercitive de peur de voir une déliquescence sécuritaire gagner sa partie septentrionale. Idem pour la Mauritanie. La politologue Louisa Ait Hamadouche, enseignante à la faculté des sciences politiques et relations internationales d'Alger, répond à nos questions et nous livre son analyse sur la situation qui prévaut dans la région du Sahel. Midi Libre : Quelle peut être la stratégie de l'Algérie face à cette nouvelle situation au Mali ? Louisa Aït Hamadouche : Je crois d'abord que l'Algérie peut profondément regretter et condamner l'escalade au Mali, mais ne peut pas en être surprise, car l'ensemble de sa stratégie régionale et de ses prises de positions récentes étaient autant de sonnettes d'alarme. Je pense notamment aux mises en garde quant à la gestion militarisée du conflit libyen qui ont valu à l'Algérie des critiques extrêmement dures. L'Algérie avait raison. Je suppose donc que ce scénario a été intégré par les responsables algériens et des stratégies de riposte ont été planifiées. De mon point de vue, l'Algérie maintiendra sa politique qui est la sienne depuis la deuxième révolte des touareg de 1990, à savoir la médiation. Mais pour cela, vous devez avoir deux parties, définies, aux objectifs établis et négociables. Aussi pourrait-elle favoriser en premier lieu la réhabilitation d'un pouvoir central capable de négocier. Compte tenu de la faiblesse de la junte et de la façon dont le coup d'Etat a eu lieu, c'est peut-être la partie la moins difficile puisque Amadou Sanogo a déjà amorcé un processus de négociation politique avec les partis maliens. Le plus dur concerne la rébellion marquée par son hétérogénéité et ses connexions radicales et criminelles. Il n'est pas exclu que le MNLA et Ansar Dine entrent en guerre de position, compte tenu de leur rivalité. Mais des négociations-marchandages ne sont pas exclus, compte tenu du profil et du parcours de Iyad Ag Ghali. Quels peuvent être les atouts de l'Algérie, dans ce cas de figure ? L'Algérie possède un atout : elle connaît bien les acteurs et peut enclencher une diplomatie parallèle, celle des réseaux, qui est sans doute le meilleur moyen d'obtenir des résultats. Au niveau macro, et à moyen et long termes, on ne sortira pas de la logique des accords d'Alger, car dans le cas contraire, il faudra s'attendre à l'implosion du Mali. Peut-on s'attendre à voir une intervention militaire menée par les pays de la région ? Je doute très fortement qu'une intervention militaire soit la solution à la confusion actuelle. Car il s'agit bien d'un conflit interne, dans lequel il n'existe pas deux parties, bien délimitées, des bons et des méchants si vous me permettez l'expression. En plus, intervenir contre qui ? Si vous déclarez la guerre à la junte au pouvoir, vous risquez soit l'effondrement total du peu d'institutions qui fonctionnent encore au Mali, ou le resserrement des rangs des militaires, faisant front contre un ennemi extérieur. En parallèle, vous donnez aux mouvements touareg des idées, comme par exemple traverser le fleuve Niger et marcher vers Bamako. Deuxième hypothèse, vous lancez une intervention contre la rébellion sous l'égide de la lutte contre le sécessionnisme et le terrorisme. Dans ce cas, vous pouvez déclencher une solidarité régionale ethnique et donc une réaction hostile des Touareg des pays limitrophes. Autre élément, les Touareg ne forment pas un bloc monolithique, et sont perméables à des infiltrations terroristes. Or, en cas d'intervention militaire, vous risquez de multiplier par 10 le nombre de MUJAO et autres adeptes plus ou moins crédibles d'Al Qaida. Supposons que toutes ces objections soient effacées et qu'une intervention soit lancée. Quelle est la stratégie de sortie ? Car il ne s'agit pas d'envoyer des troupes et d'espérer que les choses se calmeront comme par magie. Le revers c'est souvent l'enlisement et la création d'une situation encore plus grave que la précédente et les exemples sont légion avec des armées autrement plus aguerries que les troupes de la région ! Et puis, voyez la Somalie, où la configuration sociétale et géographique croise en plusieurs points celle du Mali. L'option militaire n'a fait que complexifier un conflit qui n'était déjà pas simple à l'origine. L'Algérie optera-t-elle pour le choix militaire, compte tenu des développements de la situation ? A tous ces éléments, je dirais qu'il n'est pas dans la tradition de notre pays d'intervenir militairement dans un conflit interne sans l'aval explicite du Conseil de sécurité et sans le recours au chapitre 7 de la charte des Nations unies. Je vois mal, l'Algérie revenir sur ce principe après l'avoir défendu à son corps défendant sur le cas de la Libye. Et si vous pensez au structures mises en place par les pays du champ, je ne crois pas qu'elles soient destinées à ce type d'action et je n'imagine pas du tout le Niger, en supposant qu'il en ait les moyens, prendre part à une opération coercitive de peur de voir une déliquescence sécuritaire gagner sa partie septentrionale. Idem pour la Mauritanie.