Le gouvernement, coordonné par le Premier ministre Ahmed Ouyahia, serait-il devenu encombrant pour le président Bouteflika qui, samedi, à l'occasion de la finale de la Coupe d'Algérie de football, a préféré plutôt se distinguer dans une proximité exclusive avec l'armée ? Sofiane Aït-Iflis – Alger (Le Soir) – À ce niveau de responsabilité politique, le geste et le comportement, nécessairement éloignés de l'attitude dilettante, sont forcément significatifs. Accomplis publiquement et face aux caméras, ils se veulent messages. À décoder, bien entendu. Alors quel message le président Bouteflika a-t-il voulu délivrer ce samedi, depuis l'arène olympique du 5-Juillet où les préposés à l'accueil, à son arrivée, étaient les hauts galonnés de l'Armée nationale populaire, à l'exclusion des membres du gouvernement ? À l'évidence, le président Bouteflika, de moins en moins visible publiquement, voudrait attester que, contrairement à ce que la vox populi a dû colporter, sa présidence ne souffre aucune mésentente avec l'institution militaire. Soit, mais pourquoi ce rappel, s'il en est, de ce que les amours avec l'armée n'ont pas subi d'altération au fil des onze années de règne se trouvet- il accompagné d'une démarcation, au demeurant fortement suggérée, du staff gouvernemental ? Car, il faut le dire, le président Bouteflika a, ce samedi, tordu le coup à la tradition. Des us, disons protocolaires, qui veulent qu'à l'occasion, le ministre à charge du secteur des sports ou, à tout le moins, le président de la fédération, soit aux côtés du président à qui échoit l'honneur de remettre le trophée à l'équipe victorieuse. Or, ni Hachemi Djiar, ni Mohamed Raouraoua, respectivement ministre de la Jeunesse et des Sports et président de la Fédération nationale de football (FAF), n'ont joui samedi de l'insigne honneur de se tenir aux côtés du président Bouteflika. Le reste du gouvernement, à sa tête le Premier ministre Ahmed Ouyahia, a été pareillement tenu à bonne distance du président. Pour d'aucuns, le protocole ainsi marqué souligne une bouderie présidentielle à l'endroit du gouvernement. En droite ligne de cette assertion intervient, on l'aura deviné, cette extrapolation qui propose un remaniement gouvernemental auquel Bouteflika réfléchirait très sérieusement. Les mémoires retiennent encore que le président Bouteflika avait déjà eu par le passé à adopter un comportement similaire à l'encontre de l'exécutif. Un comportement qui devait se solder, on se rappelle, par le débarquement d'Ahmed Ouyahia alors chef du gouvernement et la promotion de Abdelaziz Belkhadem. Le Premier ministre ou, à tout le moins, certains ministres, doivent-ils déjà préparer leurs valises ? On ne saurait s'autoriser une quelconque affirmation, même si la rumeur à propos de remaniement ministériel s'est déjà fait vieille. Depuis quasiment décembre 2009, période à la quelle le président Bouteflika présidait le dernier conseil des ministres. Bientôt un semestre que ce conclave au sommet ne s'est pas tenu, et cela, inéluctablement, n'est pas resté sans susciter le commentaire et la conjecture. La plus répandue des supputations a consisté à convaincre de ce que le président Bouteflika, faute de pouvoir agir, étant donné des rapports de force qui lui étaient défavorables, s'obligeait à garder le gouvernement. Mais, ce samedi, le président Bouteflika a travaillé à donner un coup de balai à ces supputations. Nulle partie, a-t-il voulu montrer, n'entravait son action. Autrement dit, c'est un acte délibéré que d'avoir gardé le gouvernement inchangé. Auquel cas, on serait tenté de comprendre qu'il tenait la perspective éloignée en raison des séparations douloureuses que cela supposait. À prendre en compte ce que l'actualité consigne comme scandales économiques et affaires scabreuses, ce seraient des ministres se recrutant dans le cercle de ses amis proches qui feraient les frais du remaniement gouvernemental. Cependant, en différant sa décision, le président accumule le temps perdu. Une année après sa réélection pour un troisième mandat consécutif, le président Bouteflika reste toujours peu entreprenant, laissant grossir l'image d'un pays à l'arrêt. S. A. I.