Depuis quelque temps, il est question, dans de nombreux discours politiques, et autres tribunes, de l'avènement d'une deuxième République en Algérie. En plus d'être une sorte de mimétisme, plaqué sur une certaine Veme République, de l'autre côté de la Méditerranée, ce concept semble un peu naïf, lorsqu'il n'est pas tout à fait subversif. Naïf parce que ceux qui en usent et abusent, souvent de bonne foi, un peu pour conjurer la médiocratie actuelle, croient que cette deuxième république qu'ils appellent de leurs voeux cristallisera tout ce qui aura manqué au régime actuel, en matière de démocratie, de séparation des pouvoirs, de lutte contre la corruption généralisée et tant d'autres vertus qui manquent cruellement au système politique qui est le nôtre. Mais ce carré triangulaire, qu'on nous ressasse à volonté, n'est pas toujours aussi naïf qu'il peut nous paraître. Dans la bouche de certains, ou sous leur plume, c'est un outil de manipulation, et surtout de blanchiment. Parce qu'en fait, lorsqu'on admet la nécessité d'aller vers une deuxième république, on reconnait de facto qu'il y en a eu une première. Un truisme. C'est donc reconnaître à une sordide oligarchie, à une junte, à un régime fondé sur des consensus mafieux, d'avoir été une république. Or, en Algérie, et ce n'est un secret pour personne, y compris pour ceux qui tiennent le pays, la République n'a jamais existé que dans les en-tête officiels, et sur les frontispices des façades de pseudo institutions. Dans la réalité, pour dire les choses crûment, nous sommes passés de territoires colonisés par une puissance étrangère, à pays colonisé par une junte, puis par une oligarchie, et bientôt par une famille. La République est le concept le plus large d'un territoire qui appartient au peuple qui l'habite sans appartenir à quiconque, et dont le gouvernement qui gère ce pays, est désigné par ce même peuple, par la voie d'un suffrage libre et honnête. L'Armée de la République, souvent désignée sous les vocables de « Grande muette », parce qu'elle n'a aucun droit de parole dans le débat démocratique, est l'émanation de la force du peuple, chargée de le défendre et de défendre l'intégrité du territoire, sans aucun droit d'ingérence dans la décision politique. Le gouvernement de la République n'est ni héréditaire, ni transmissible par l'appartenance à un clan donné, ni par quelque lien que ce soit. La République est démocratique par essence, puisque c'est le peuple qui dispose de la totalité du pouvoir, et qui le délègue aux représentants qu'il s'est choisi. Donc, dire d'un pays qu'il est une République démocratique est un pléonasme. Lui rajouter le qualificatif de populaire en fait un double pléonasme. Il aurait suffi de désigner le pays sous la dénomination de République Algérienne. On ne martèle pas ce qui est évident et manifeste. Donc, pour en revenir au titre de ce billet, la question est de savoir si l'Algérie est une République. Si nous répondons oui, et que nous souhaitons néanmoins en modifier des dispositions constitutionnelles fondamentales, alors nous pourrons parler de deuxième république. Si nous répondons que l'Algérie n'a jamais été une République, mais une odieuse oligarchie, alors nous devrons aspirer à l'avènement d'une première République Algérienne et non à celui d'une deuxième.