Madjid Khelassi Mardi 18 Septembre 2012 Un décret présidentiel promulgué fin aout vient élargir« l'assiette »des bénéficiaires des titres officiels de voyage ou plus simplement du passeport diplomatique. Bienvenue dans l'Algérie de la geste facile et des diplomates par quintaux ! L'«assiette», (le mot n'est pas anodin) comprendra dorénavant les anciens chefs d'états ainsi que leurs descendants, ascendants et collatéraux directs... s'ensuit une liste plus longue qu'un jour sans pain des anciens serviteurs de la nation : premiers ministres, ministres, généraux, et autres. Bienvenue dans la république des copains qui s'octroient des privilèges impossibles sous d'autres cieux. Collatéraux directs ??? Avouons que la formule est très Faustienne ! Qu'a cela ne tienne ! L'Algérie aime récompenser les plus « méritants » de ses enfants ainsi que leur marmaille ascendante, descendante et même collatérale. C'est magique ! On se prendrait facilement à faire l'éloge du népotisme républicain ! La convention de Vienne qui définit les relations internationales stipule que l'immunité n'est offerte au détenteur que dans l'exercice de ses fonctions. Foin de tout cela, l'Algérie est souveraine voyons ! Et puis elle a le droit de faire tout pour ses enfants dut-elle enfreindre le droit international. Le passeport diplomatique, tramé aux enjeux de la survie politique, devient un vulgaire sésame du voyage facile. C'est le passeport pour l'envers de la plus noble des fonctions de la politique. Le procédé n'est pas nouveau dira-t-on. Déjà du temps de Boumédienne, Zeggar son émissaire permanent pour les Etats-Unis, voyageait sous le manteau... diplomatique. Mais là, le procédé devient un gimmick fidèle au déroulé de la farce. Passeport diplo... magique et mystificateur dira-ton. Restauration de l'autorité de l'état a dit le nouveau premier ministre ! Comment le pourra-t-il vu la puissance silencieuse des excès ! La promulgation d'un tel décret qui consacre la politique de l'obole, de l'offrande, rend la moindre tentative de restauration de l'autorité de l'état totalement impossible face a ces imprécations hallucinées. Elle consacre totalement la notion acéphale de l'état et de sa mission. Mais que tout le monde ne se rassure pas, le passeport diplo, est aussi un cadeau encombrant. Il peut-être remède et poison, potion de mort et philtre embaumant. Son ambivalence est soudaine et dévastatrice. Depuis Nezzar et son épisode helvétique, « l'intranquilité » habite sadiquement le passeport rouge. Descendants, ascendants et collatéraux directs... les fines nervures du népotisme consacre le charme vénéneux du tout permis pour certains. Le petit peuple, lui sera « biométrisé », et regardera (interloqué), se poursuivre la litanie des paradoxes. Il est depuis longtemps relégué au rang de voyeuriste non stupéfait. 500 ministres algériens vivent, habitent et travaillent à l'étranger avec le statut de bi-nationaux écrivait un confrère il y'a quelques semaines. Combien seront-ils les heureux détenteurs du nouveau P.D ? Des milliers quand on compte les enfants, petits enfants, nièces, neveux, ainsi que les cousins de « moul el bache ». Ce sera la pléiade des délirants sous valises diplomatiques, les voyages sans visa, le tour du monde en 80 heurts, la diplomatie expliquée aux collatéraux, et les voyages qui forment la genèse du n'importe quoi ! Alors ce passeport étendu à tous les « tab djnanhoum » et leurs rejetons est-il une ultime fantaisie d'un pouvoir qui prépare sa chute ailleurs ? Ou le fait du prince qui s'inspire plus de Machiavel que de Talleyrand ? La réponse est un retroussis oblique qui laisse pantois le plus futé de nos diplomates.