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Il était une fois……L'Ecole Nationale Polytechnique
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 19 - 03 - 2014

Professeurs et étudiants tirent la sonnette d'alarme
El Watan le 19.03.14
«L'Algérie est parmi les rares pays où toute compétence ou institution qui serait capable de produire des futurs cadres est pratiquement inhibée». C'est avec amertume et rage que le Pr Nabil Mameri, de l'Ecole nationale polytechnique (ENP), lance son SOS.
Enseignant au Département de génie de l'environnement de cette école, il s'insurge contre ce qu'il appelle «la programmation du démantèlement de cette institution de production de matières grises.» Le Pr Mameri, à l'instar de nombre d'autres professeurs de la doyenne des écoles algériennes, n'a pas hésité à qualifier la situation qui prévaut au niveau de cette institution de «pourrissement voulu». Mais que se passe-t-il donc à Polytech ? «Il se passe que tout d'abord il n'est pas normal qu'on désigne comme directeur de cette école un nouveau maître de conférences n'ayant aucune expérience dans le domaine, mais surtout n'ayant aucun projet de développement pour une institution de l'envergure de Polytechnique, ce qui n'est pas du tout conforme à la règlementation», explique le Pr Mameri, qui enseigne dans cette école depuis 1987.
Selon lui, le directeur en question, Mohamed Debyeche, a un grade académique de maître de conférences classe A. «Ce monsieur-là a été nommé par arrêté présidentiel, c'est pour cela qu'on vous dit qu'il avait des ramifications qui le mettent hors de portée de la réglementation», indique-t-il. Mme Nadia Abdi, elle, professeur à l'ENP depuis 1986 et faisant partie de la toute première promotion en génie de l'environnement en Algérie, rapporte, de son côté, que «ce qui se passe au niveau de cette école dépasse tout entendement, et ce, allant du vol de matériel appartenant à l'école aux menaces, intimidations et ségrégation, en passant par le blocage non justifié de projets de fin d'étude et de post-graduation.» Elle explique, tout d'abord, que le directeur en question a été nommé à ce poste par le mensonge. «On nous avait menti. On nous avait dit que c'était un professeur, ce qui est archi-faux», dénonce-t-elle.
En effet, des professeurs, des doctorants et des étudiants de cette école ont fait allusion aux «amitiés de M. Debyeche avec Saïd Bouteflika, le frère de l'actuel chef de l'Etat, ainsi qu'avec le frère de l'ancien ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Rachid Herraoubia». «Il est bien épaulé par ceux qui l'ont placé à la tête de notre école. Il fait donc ce qu'il veut dans l'impunité la plus absolue», soutient le Pr Abdi, et au Pr Mameri de renchérir : «il se comporte comme un pacha dans sa propriété privée.» Nos deux professeurs expliquent alors que le directeur a eu recours à la guerre des clans en constituant le sien parmi «ceux qui acceptent de marcher dans la combine afin d'écraser ceux qui les dérangent» parce que soucieux de l'avenir des étudiants et du devenir de l'ENP.
Vol, intimidations et zizanie à l'ENP
Toutefois, le grade académique de M. Debyeche n'est pas seul en cause. Selon plusieurs enseignants et étudiants rencontrés à l'ENP, la gestion de plus en plus chaotique de l'école, le climat délétère qui y règne, la disparition du matériel, l'inexistence d'investissements pour le renouvellement des vieilles installations ainsi que, selon le Pr Mameri, nombre d'«actions incompréhensibles de nos responsables à tous les niveaux», sont vivement décriés. Ainsi, on fait état de la disparition et de la dégradation de matériel appartenant aux laboratoires de l'école.
En effet, le 3 octobre 2012, une lettre signée par les membres de la Commission de réforme et adressée au directeur de l'ENP a fait état de dégradation et de disparition de certains matériels. «Au lieu de se limiter à l'enlèvement des équipements réformés, elle (l'entrerpise chargée de la récupération des équipements réformés, Ndlr) a procédé au sectionnement et à la dépose de gros câbles d'alimentation basse tension après les avoir mis hors tension à partir de l'armoire dont la serrure a été forcée. Un certain nombre de disjoncteurs et des petites armoires électriques ont été aussi enlevés», lit-on dans le texte de la lettre dont El Watan étudiant détient une copie.
Une telle situation n'a, hélas, pas été sans engendrer la rupture d'alimentation d'environ une dizaine de laboratoires, ce qui a entraîné des retards dans la programmation des travaux pédagogiques (TP) dans certaines parties du Département de génie chimique. La Commission de réforme a également attiré l'attention du directeur sur la disparition de deux compresseurs en état de fonctionnement, enlevés par l'entreprise en question alors qu'ils ne faisaient pas partie du matériel proposé à la réforme. Sans langue de bois, le Pr Mameri, lui, parle carrément de vol : «Le matériel de l'ENP a été volé par le premier responsable de l'école. Il s'agit du patrimoine de cette école, et donc c'est un patrimoine de l'Etat qui a été volé.»
Le 27 janvier 2013, le Pr El Hadi Benyoussef, alors membre du Conseil d'administration représentant le Département de génie chimique adresse une lettre au président du Comité d'éthique et de déontologie de l'ENP, attirant son attention sur «un incident grave qui s'est produit lors de la session ordinaire du Conseil d'administration de l'ENP tenue le 23 janvier 2013», et présidée par le représentant du ministère de l'Enseignement supérieur, M. Bouhenna. Lors de cette session, le Pr Benyoussef a rappelé au directeur de l'école le courrier, resté sans suite, qui lui a été adressé par les responsables du Département de génie chimique concernant l'enlèvement sus-mentionné des deux compresseurs. «En guise de réponse, j'ai eu droit à une réaction violente consistant en une tentative d'agression physique et menaces de la part du secrétaire de séance, censé ne pas participer aux débats, sans que le directeur de l'école réagisse. De plus, le secrétaire de séance s'est permis de porter un jugement de valeur sur l'ensemble des enseignants de génie chimique en affirmant qu'ils feraient mieux de faire leur travail que de s'occuper de la réforme des équipements», peut-on lire dans le texte de la lettre.
Les enseignants ne doivent-ils donc pas se soucier de la préservation du patrimoine de leur école ? Protéger ses moyens et appeler à une meilleure gestion ne fait donc pas partie de leur travail ? Toujours est-il qu'en l'absence de toute réaction de la part des responsables de l'école, les enseignants de l'ENP ont adressé une lettre au ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, dans laquelle ils demandaient des «sanctions exemplaires sévères pour bannir définitivement ce type de comportement et rétablir l'honneur de notre collègue bafoué en Conseil d'administration placé sous l'autorité de votre représentant.» Le 21 janvier 2014, les Prs Abdi et Mameri adressent un courrier au directeur de l'école, dans lequel ils s'insurgent, entre autres, contre «l'illégalité et la non-application de la réglementation relative à l'élection des comités scientifiques de département». Une irrégularité dans le processus électoral imposé par ledit directeur, qui a été précédemment constatée par la directrice de la post-graduation, le Pr Rebah, qui l'a invité à réorganiser les élections.
Racisme quand tu nous tiens !
Il se trouve, en effet, que M. Debyeche, oublieux de son devoir de mener à bien la gestion d'une école aussi prestigieuse que l'ENP, fait dans le clanisme et tente de monter un groupe d'enseignants contre un autre. «Il a bien réussi, puisque ses protégés gravitent autour de lui et bénéficient de tous les avantages», dira le Pr Mameri. Ce dernier, avec le Pr Abdi, ont dénoncé le fait que le directeur incite au remplacement de leurs collègues «sur la base de fallacieux arguments tels que : ‘‘C'est une équipe de Kabyles''». Des documents à la disposition d'El Watan étudiant révèlent que «cet argument a même été exposé par le Pr Kerbachi au Comité d'éthique et de déontologie de l'ENP», alors que le Pr Mameri soutient que le directeur lui-même lui a dit une chose pareille.
L'école serait-elle donc devenue un lieu de ségrégation par excellence ?... Il paraît, en effet, mais pas seulement : outre les Prs Abdi et Mameri, d'autres professeurs, dont Hocine Grib, professeur en électrochimie et le Pr Madani Derouich parlent de comportements qui vont carrément à l'encontre du bon sens et évoquent «une rétention scientifique qui est en train de se commettre» puisque le directeur de l'ENP n'a pas hésité à recourir, selon les même professeurs, aux menaces. «Nous ne sommes même pas étonnés de vos menaces écrites, suite au dépôt des dossiers des projets du Comité national d'évaluation et de programmation de la recherche universitaire (CNEPRU) pour lesquels nous avons eu recours à un huissier de justice faute de pouvoir les transmettre par le biais de la voie hiérarchique», est-il mentionné dans la lettre.
Dans cette dernière, on lit également que le directeur de l'ENP, «pour se venger», a monté «contre le Pr Mameri une soi-disant affaire de harcèlement» d'une collègue suite à l'évaluation scientifique de la thèse de doctorat encadrée par cette dernière. Une triste affaire qui a bien pu finir dans le sang, puisque le mari de la collègue en question «a menacé d'attenter à la vie du Pr Mameri à l'arme blanche», des menaces auxquelles le directeur de l'ENP n'a pas réagi. Le hic, c'est que le directeur a décidé de ne plus accuser réception ni de donner suite aux courriers qui lui sont adressés par «des professeurs et des doctorants qui ne lui plaisent pas». Saisissant la tutelle par courrier, les Prs Abdi et Mameri ont expliqué que «suite au refus de réception de la réponse aux courriers du directeur de l'ENP», ils s'étaient vu obligés de «faire appel, une fois de plus, aux services d'un huissier de justice» pour faire valoir leurs droits et leur «refus de travailler dans l'illégalité et les menaces de mort».
Favoritisme pour les uns, blocage pour les autres
Concernant le volet scientifique, rien ne va plus aussi à l'ENP, du moins pour ceux qui ne sont pas dans le cercle des favoris du directeur. «Comment expliquez-vous que des thèses d'étudiants encadrés par les protégés du directeur sont soutenus sans avis du comité scientifique ni critique, pendant que des doctorants encadrés par nous — qui sommes taxés de l'équipe des Kabyles — sont continuellement maltraités et leurs projets bloqués sans un motif valable ?». Mme Ouiza Kitous, maître de conférences, voit sa soutenance bloquée depuis... 2008, juste parce que son directeur de thèse n'est autre que le Pr Mameri. Ce dernier a d'ailleurs adressé, en date du 26 juillet 2012, une lettre ouverte au président de la République dans laquelle il le sollicite pour mettre fin à «cette hogra et à ce règne de la médiocrité flagrants».
Selon Mme Kitous, qui ne sait plus à quel saint se vouer, le 2 juillet 2008, un conseil scientifique du Département de génie de l'environnement de l'ENP, composé des membres du Laboratoire des sciences et techniques de l'environnement (LSTE) et du Laboratoire de biotechnologie et génie des procédés (BioGep), a procédé, une première fois, à l'évaluation de ses travaux de recherche en vue de l'obtention du diplôme de doctorat d'Etat.
Cette évaluation a été sanctionnée par un avis favorable sans qu'aucun procès-verbal ne soit rédigé. En octobre 2008, les membres du LSTE convoquent un Conseil scientifique avec la participation de la directrice adjointe chargée de la recherche et de la post-graduation, elle-même membre du LSTE, pour transformer l'avis initial en un avis défavorable. Quoique le dossier présenté remplissait l'ensemble des critères requis pour l'organisation d'une soutenance, Mme Kitous et son directeur de thèse s'étaient pliés aux recommandations du Conseil scientifique, et la production scientifique de la thèse a été augmentée.
Le Pr Mameri a mentionné dans sa lettre qu'«avec ces nouveaux éléments, le dossier de soutenance de Mme Kitous a été réintroduit le mois de mars 2012. Il est apparu lors du Conseil de département du 10-04-2012, une fois de plus, une volonté de nuisance et de blocage pour des raisons non fondées en exigeant le retrait d'une partie de la thèse par trois enseignants de rang magistral et un maître de conférences B (MCB) du laboratoire LSTE». Pour quel motif ? Selon Mme Kitous, on l'a tout simplement accusée de plagiat. Reprendre son propre thème soutenu pour l'obtention d'un magistère et l'enrichir avec d'autres articles relève-t-il donc du plagiat ? Qu'en est-il dans ce cas-là du système pyramidal ? Quoique cela relève des prérogatives du directeur de thèse, et alors qu'il a été prouvé que les travaux de Mme Kitous mis en cause sont la propriété intellectuelle de cette dernière, et bien que quatre enseignants de rang magistral se soient prononcés favorablement à la soutenance, «la présidente a considéré une égalité des voix en tenant compte de la voix d'un MCB non habilité encore à siéger dans les jurys ou d'encadrer un magister».
La règlementation n'est-elle pas, dans ce cas-là, bafouée et d'une manière flagrante ? Mme Kitous, qui a saisi à plusieurs reprises toutes les instances, à savoir le Conseil scientifique de l'école, la direction de l'école, le Comité d'éthique et de déontologie ainsi que le ministère de l'Enseignement supérieur, ne se voit toujours pas rétablie dans ses droits. Pire, un inspecteur du ministère, qui l'a reçue dans son bureau plus d'une fois, a fini par jeter l'éponge en lui disant simplement : «ça me dépasse. Votre directeur a beaucoup d'amis.»
Cependant, ces blocages sans raisons ont fait d'autres victimes. Il s'agit de MM. Farouk Bouhezila et Mourad Behloul. Pour le premier, enseignant à la Faculté de biologie de l'université de Bab Ezzouar et doctorant à l'ENP, encadré par les Prs Mameri et Lounici, il s'est inscrit en 2007 pour soutenir son doctorat. En 2011, toutes les conditions en vue de cette soutenance étaient réunies. Preuve en est, il a eu l'avis favorable du Conseil de département en 2012, et quelque deux mois plus tard celui de l'école. Malgré cela, son travail a été bloqué et il n'a toujours pas soutenu. «On ne comprend plus rien. Je ne sais pas pourquoi ce blocage. Tout ce que je sais, c'est que ça joue négativement sur le moral et la santé», déclare M. Bouhezila qui dit être loin de voir le bout du tunnel.
M. Behloul, lui, est maître-assistant classe A à l'université Abderrahmane Mira de Béjaïa, et doctorant à l'ENP. «J'étais surpris quand le Conseil scientifique du département (CSD) de génie de l'environnement s'est tenu à un avis défavorable qui m'a été avisé sans aucune justification», explique-t-il alors que le PV du CSD, reçu en janvier dernier, mentionnait que M. Behloul n'était pas «recevable en l'état, un rapport sera transmis à la post-graduation».
Ayant demandé à la présidente du Conseil les raisons d'un tel blocage, le doctorant n'a reçu aucune explication outre celle que ses directeurs de thèse, en conflit avec cette dernière, étaient absents. Est-ce donc une raison pour bloquer un travail de recherche de longue haleine, dont des articles ont été publiés dans des revues de renommée mondiale ? «J'ai demandé audience au directeur de l'ENP, mais il n'a même pas daigné me recevoir. C'est de la hogra pure et simple», s'indigne-t-il, la rage au cœur et la mort dans l'âme. L'ultime solution pour lui était de saisir la tutelle en envoyant un courrier au ministre. «Depuis, j'attends toujours une réponse qui amènerait une solution à mon problème», conclut M. Behloul, déchiré entre l'espoir et la résignation. «Si on n'a pas assisté à ce CSD, c'est tout simplement parce qu'on refusait son illégalité. Toutefois, on fait tout pour bloquer nos doctorants», indiquent les Prs Abdi et Mameri qui affirment être décidés à aller jusqu'au bout pour soutenir leurs doctorants. «On n'a pas le droit de jouer comme cela avec l'avenir des autres», estime le Pr Grib.
Et du côté des étudiants ?
Si on excuse l'expression, le moral des troupes est au plus bas. L'inquiétude, la peur et l'amertume sont visibles sur les visages. Et quand ils en parlent, on comprend l'ampleur de ce qui prévaut à l'ENP et ses retombées sur les étudiants. «Il y a comme une guerre des clans en haut dont nous sommes les victimes malgré nous. Les étudiants en souffrent énormément. Vous avez des enseignants qui, parfois, se disputent même devant les étudiants. On ne veut pas se mêler de leurs problèmes, mais quand cela affecte notre cursus et notre avenir, on doit bien faire quelque chose», témoigne un jeune étudient en 4e année en génie de l'environnement, qui se dit outré par les comportements de ceux qui sont censés être les piliers de cette prestigieuse école.
«Ce n'est pas normal qu'en 4e année un planning défini des cours de mastère ne soit pas encore arrêté simplement parce qu'il y a des enseignants qui se moquent pas mal de ce planning», confie son camarade, qui ajoute qu'à cause de cela et d'une foultitude d'autres problèmes, le Département de génie de l'environnement est devenu très mal vu. «On doit se battre pour nos droits. On appartient à une école qui forme l'élite de l'Algérie, et on est censés sortir de cette école fiers et en bombant le torse. Mais là, on n'est pas très optimistes. Jugez-en : on arrive, on trouve des enseignants grincheux de la dispute de la veille, qui, parfois, traitent les étudiants très mal. Aujourd'hui, les étudiants se plaignent de cela et ouvertement», rapporte le premier étudiant.
«Il y a de sérieux problèmes dans cette école. Il y a un matériel de recherche qui a été volé, ce qui veut dire que nous, étudiants, ne trouvons pas de matériel pour faire nos travaux. Des projets de fin d'études et de post-graduation ont été bloqués, ce qui nous inquiète au plus haut degré. Quand on voit de pareilles choses, on ne peut pas ne pas nous inquiéter pour notre avenir», confie une étudiante que la peur de ne pouvoir suivre un cursus normal ne quitte plus. D'autres étudiants ont également manifesté leur ras-le-bol et dénoncent le fait d'être ainsi pris en tenaille dans cette guéguerre des enseignants. La tutelle, elle, est aux abonnés absents, puisque des doctorants censés soutenir leur thèse depuis des années traînent toujours à cause de ce qu'ils qualifient d'un «abus d'autorité». Mais en compromettant l'avenir de ces étudiants, n'est-ce pas l'avenir de l'école qui est compromis ? N'est-ce pas l'école elle-même qui risque de disparaître ? L'avenir nous le dira. En attendant, les professeurs sus-cités appellent le nouveau Premier ministre par intérim, Youcef Youcefi, un ancien de l'ENP, à agir pour sauver cette dernière.
Un climat de terreur
En effet, outre les doctorants qui ne savent plus à quel saint se vouer pour débloquer leur situation et pouvoir, enfin, soutenir les étudiants vivent dans un vrai climat de terreur. Tous les étudiants avec qui nous avons pris attache, soit une quinzaine, ont refusé de nous donner leurs noms ou même leurs prénoms. Ils ont été jusqu'à refuser qu'on utilise des initiales. «On risque des représailles de la part de certains enseignants qui ne sont pas du tout pédagogues, pour ne pas dire autre chose. Ce n'est pas qu'on soit lâche, mais on a peur pour notre avenir», indique l'un d'eux. «Il faut vivre et subir ce que nous vivons et subissons pour comprendre cela», ajoutent-ils. Le Pr Mameri, lui, explique que certains enseignants «sont bien capables de saquer les étudiants, de leur donner de très mauvaises notes juste parce qu'ils ont parlé aux journalistes. Déjà que quand ils voient que des projets de fin d'études et post-graduation sont bloqués mine de rien, sans que la tutelle ne réagisse !». Pire que cela, certains parlent d'un projet mené en catimini pour démanteler l'ENP et accaparer ainsi du foncier. Est-ce donc le règne de la terreur dans une école jadis des plus prestigieuses de toute l'Algérie ? Est-ce le règne en toute impunité des nababs ? (M. S.)
L'ENP
Doyenne des écoles algérienne, l'Ecole nationale polytechnique a été créée en 1925 sous le nom de l'Institut industriel d'Algérie. Cet institut ouvre officiellement ses portes en octobre 1926. Fermé à cause de la Seconde Guerre mondiale, il a été rouvert en octobre 1956 sous le nom d'Ecole nationale d'ingénieurs d'Algérie. En octobre 1963, cette dernière a été transformée en Ecole nationale polytechnique par arrêté ministériel du 25 juin 1963, afin de former des techniciens supérieurs destinés aux grands services publics et aux entreprises industrielles et de travaux publics. L'institut a été transformé en Ecole nationale polytechnique en octobre 1963. De ses différents départements de Sciences fondamentales, électronique, génie électrique, génie industriel, génie mécanique, génie civil, génie chimique, génie de l'environnement, génie minier, métallurgie, hydraulique, sont sortis plus de 10 000 ingénieurs. (M. S.)
Meriam Sadat


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