Le Quotidien d'Algérie Les applaudisseurs des célèbres généraux visibles réprimés par les créatures de ces mêmes généraux !? Avant, les choses étaient claires pourtant. A partir de 1992, un monde manichéen fut créé sur mesure par et pour les généraux « célèbres » (pour être célèbres, ils sont célèbres). Ce monde surréaliste et dantesque, fut admiré, approuvé et considéré véridique et factuel par les bien-pensants et les gardiens de la laïcité et de la démocratie francophile, visibles ou invisibles fussent-ils. A l'époque, les journaux qui ont continué à paraître sous le règne direct des généraux, reprenaient à leur compte et répandaient, à tout-va, la nature de ce monde simple et dichotomique : les généraux supportés par tout le pays contre le monstre islamiste. Le peuple devait savoir que les généraux célèbres (par leur délicatesse et leurs antécédents révolutionnaires…) étaient en train de défendre l'ordre républicain menacé par le tsunami électoral des islamistes qui ont failli envahir tout le pays. Pour la réussite de cette mission, les intellectuels et les journalistes laïques, ont déployé toute leur énergie et tout leur talent pour présenter à ceux qui veulent les entendre, une réalité conforme aux allégations de nos célèbres généraux. Le fait que les admirateurs de ces généraux ne prononcent pas des mots comme « dictature militaire », « répression féroce », « exécutions extrajudiciaires », « 250 mille morts et 10 000 disparus », « camp de concentration », « des millions de déplacés », etc., dans leur « œuvre littéraire» montre bien quelle alliance contre nature a été scellée . Ces intellectuels ont jonglé avec les mots pour travestir graduellement une réalité à laquelle ils n'avaient aucun accès direct vers celle qui satisfait la politique de l'armée et justifie sa prise du pouvoir. Cela importait peu du moment que cet exercice servait leur propre vision du monde. Ainsi, le combat à mort auquel se livraient les généraux et les islamistes allait devenir, par la magie de la culture laïque, un combat entre un peuple et des terroristes. C'est donc un combat légitime dont la cause est noble; le peuple est obligé d'y adhérer et d'aduler ses sauveurs en casquettes. Les choses étaient claires, limpides et entendues : l'Algérie se divisait entre l'armée et son peuple d'un côté et de l'autre côté les horribles islamistes, dont les terroristes étaient les honorables représentants. Les admirateurs inconditionnels des généraux putschistes ont de tout temps défendu, bec et ongles, l'éradication pure et simple de l'islamisme politique alors que celui-ci venait de remporter des élections libres et démocratiques; de tout temps, ils ont défendu les génocidaires contre les tentatives d'immiscions des instances internationales dans les carnages et les crimes de guerre dont les casquettes visibles et célèbres sont soupçonnées d'être les commanditaires et se dressent toujours contres la presse internationale qui, à l'occasion de rebondissement de certains dossiers sécuritaires, fait de telles insinuations. Ils leur ont de tout temps rendu les honneurs et les hommages et n'ont pas tari d'éloges pour ces sauveurs dont les mains ruissellent de sang. Mais pourquoi alors certains viennent-ils aujourd'hui se plaindre de répression et dénoncer les casquettes « invisibles » ? Ces dernières ne sont-elles pas une création de casquettes visibles sinon leurs alter ego? La nuance qu'ils font ne trahit-elle pas un désarroi profond et une amertume du caractère hideux de leurs héros en képi? Monsieur, vous vous indignez contre la perquisition de l'ordinateur de votre fils chéri, et vous restez de marbre devant la disparition de 10 000 Algériens dont les parents et proches souffrent le martyre en vivant avec l'illusion de leur retour. Pour ces gens-là et pour le reste de l'Algérie, ce que vous cachez jalousement et ce que recherchent stupidement vos détracteurs invisibles ou visibles est la dernière de leur souci.