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De la fièvre politicienne à la sérénité de la langue maternelle
Publié dans Le Soir d'Algérie le 19 - 02 - 2018


, linguiste (*)
La Journée internationale de la langue maternelle n'est pas loin de fêter ses 20 ans, ce 21 février 2018. «La diversité linguistique et le multilinguisme comptent pour le développement durable» est le thème de cette année, selon l'Unesco, qui précise : «C'est important de promouvoir cette diversité car nous existons à travers nos langues. C'est grâce à elles que nous pouvons nous exprimer, communiquer, participer à la vie sociale et publique, et transmettre d'une façon pérenne les savoirs, les connaissances et les cultures.»
J'attendais cette journée anniversaire pour intervenir — avec un peu de recul — sur les questions linguistiques en Algérie telles qu'elles ont pu occuper le devant de la scène médiatique. En somme, quelques semaines après le déferlement — souvent à l'emporte-pièce — des propos tenus çà et là par nos compatriotes amazighophiles. En effet, les perspectives qui s'ouvrent pour la langue amazighe sont à saluer et à encourager. Par contre, il faudrait scruter avec vigilance la nature chauvine et exclusive des discours qui ont accompagné cette fièvre récemment. Les réseaux sociaux ont même libéré une parole xénophobe que rien ne justifiait.
D'ailleurs la population non berbérophone a su sérénité garder, un peu pour se réjouir d'un acquis démocratique bien mérité. Là est l'important. Cela étant dit, je souhaiterais attirer l'attention de nos compatriotes berbérophones sur le fait que la revendication d'une généralisation obligatoire de tamazight est à la fois antidémocratique et contre-productive. J'ai pu lire qu'un des arguments est que l'arabisation a bien été obligatoire et généralisée... pourquoi pas tamazight ? En somme il faudrait utiliser les mêmes démarches contre-nature pour se faire admettre ? Utiliser la torture parce que l'on a été torturé ? Mais un tel débordement passionnel cache quelque chose de plus pernicieux : le déni de la derija ou maghribi... sous prétexte que tout ça c'est de l'arabe !
Et bien non ! le maghribi n'est pas de l'arabe pas plus que l'hébreu n'est de l'arabe ou que le syriaque est de l'arabe.
Le maghribi est une forme contemporaine du néo-punique qui a su emprunter à la langue du Coran ce qui lui manquait pour remplir certaines fonctions de communication ou de formation (le fiqh, la jurisprudence, etc.).
Quant au reste, ce sont les structures syntactiques et lexico-sémantiques du néo-punique qui ont réussi à se pérenniser tout en évoluant dans une aire arabophone, il est vrai. Et ce substrat, il est au moins aussi ancien que celui du berbère (près de 3000 ans).
Rien ne prouve que les peuplades ayant donné vie à nos contrées étaient en totalité berbérophones à l'arrivée des Phéniciens.
Par contre la langue phénicienne finit par évoluer au contact des langues parlées dans ce nord de l'Afrique et ce n'est pas l'influence du berbère qui est la plus prégnante dans l'évolution de la langue jusqu'à sa forme punique, cet ancêtre du maghribi.
Hormis quelques postulats assertifs et non contrôlés — y compris par des historiens, par ailleurs sérieux —, aucune preuve n'a jamais été apportée. Nous ne disposons que de deux éléments matériels attestant d'une présence, bien que non exclusive, de berbérophones dans cette région : (1) des traces archéologiques et (2) des locuteurs natifs qui ont réussi à perdurer. Les inscriptions en tifinagh, peu nombreuses, il faut le dire, existent mais leurs découvertes sont dans des localisations très circonscrites (essentiellement des poches dans la Numidie et l'actuelle Libye). Cela étant dit, il existe bel et bien des isoglosses berbérophones çà et là, dans le territoire algérien.
Par contre, les inscriptions puniques ont fleuri sur tout le bassin méditerranéen ; voire jusqu'à Agadir, sur les bords de l'Océan. Et les locuteurs maghribiphones (80% ne serait pas exagéré) sont localisés dans tout le territoire.
Pour faire court, disons que l'on ne peut réécrire l'histoire pour satisfaire une pulsion. Il faut tout simplement parvenir à s'admettre.
Or, les maghribiphones sont purement rejetés par cette vision exclusive de tamazight. Dans le meilleur des cas, on les assimile à cet arabe, langue d'Etat et langue du monde arabe ; or, le punique a été la langue hégémonique de l'Afrique du Nord avant même que naisse l'arabe, cette langue issue du Coran.
Le fait est que, de nos jours, l'Algérie est une synthèse d'histoire dont nous sommes les héritiers. Qu'on le veuille ou pas, nous ne sommes que les relais de ces valeureux ancêtres qui ont pris les armes pour que ce pays accède à une vie souveraine et prospère. En fin de course, nous sommes un peuple multilingue. Voilà tout !
Alors inscrivons-nous dans cette dynamique internationale de reconnaissance et de protection des langues natives (tamazight et maghribi, pour ce qui nous concerne). Il ne servirait à rien de tenter de tenir en tenaille le maghribi (entre la fosha et tamazight) pour espérer l'étouffer. Rien ni aucune force politique au monde ne sont parvenus à étouffer une langue native. Et le berbère est bien placé pour le savoir. N'est-ce pas ? Alors ce n'est pas le moment de verser dans le glottocide !
La scolarisation des premières années est à localiser dans ce chemin tortueux situé entre des désirs idéologiques, d'une part, et une réalité anthropo-linguistique bien têtue, de l'autre. Et, de manière à la fois incontrôlable et contre-productive, l'enfant algérien se voit appréhendé dans son être pour apprendre :
à s'inscrire en «autre-que-soi» ;
à «dé-parler» pour «apprendre à parler» ;
à déconstruire ses représentations
et, enfin ;
à s'excentrer.
Pourtant l'avenir se dessinerait clairement si un sursaut de sagesse salvateur venait à poindre: un bilinguisme positif permettant aux amazighophones d'utiliser leur langue ainsi que l'arabe ; d'une part, et, d'autre part, les maghribiphones d'utiliser leur langue ainsi que l'arabe. Tout le monde s'y retrouvera et les langues étrangères verraient leur enseignement largement facilité. Dans un tel cas de figure, nous serions en cohérence avec les recommandations de l'Unesco qui, sans relâche depuis la fin des années 50, rappelle le poids de la langue maternelle dans le cursus scolaire pour s'assurer de la réussite.
A. E.
* Auteur de Le maghribi, alias ed-derija (la langue consensuelle du Maghreb), Editions Franz-Fanon, Alger


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