De notre bureau de Bruxelles, Aziouz Mokhtari A Saint-Pétersbourg, Macron a donné l'impression de vouloir sortir la France du désastre diplomatique dans lequel Sarkozy et Hollande l'ont enfoncée... Les Allemands et l'Union européenne attendent des actes... Est-ce la fin du «en-même-temps»... Au sein de l'Union européenne, l'Allemagne n'a pas peur de croiser le fer avec les USA et à plusieurs niveaux - Iran - Syrie - relations avec la Russie — Jérusalem - Corée du Nord - et sur, évidemment, la guerre commerciale contre Bruxelles décidée par Trump. La France de Macron hésite, se cherche, tente le «en-même-temps» cher au Président français. Le «en-même-temps» finira, sans doute, dans les oubliettes et on n'en parlera plus. A Moscou, avant-hier, Macron a reçu un cours magistral de la part de Poutine en matière de relations internationales. Peu bavard, succinct, esprit de synthèse accompli, le Président russe a, lors de la conférence de presse des deux hommes à Saint-Pétersbourg, clarifié en peu de mots la position de son pays. «On ne sort pas de l'Accord sur le nucléaire iranien», «la solution en Syrie ne peut être que politique», «la Corée du Nord a accompli des pas intéressants vers le dégel avec les USA, dommage que la rencontre entre Trump et Kim n'ait pas pu se dérouler» ... A sa suite, Macron, a pris la parole. Discours fleuve. Sans doute pour marquer la rupture avec l'héritage désolant de François Hollande sur, notamment, la Syrie. Sur ce dossier, le Président français a opéré une véritable révolution en interne. A la française. Plus question pour Paris d'exiger «le départ de Bachar» et «Ennosra ne fait pas du bon boulot (dixit Laurent Fabius, ex-ministre des AE et actuel président du Conseil constitutionnel)... Macron a semblé en Russie redonner de l'honneur à la diplomatie de son pays en sollicitant le soutien russe pour être réadmis en pays omeyyade. Hollande a déglingué les intérêts français là-bas à cause de son alignement, tête baissée et sans demander son compte, sur Israël et Washington... Sur le nucléaire iranien, Macron joue encore de sa partition préférée «nous restons dans l'Accord», mais il faut «l'élargir». A Saint-Pétersbourg, il a dit ne pas vouloir «l'élargir», mais «le compléter». Cependant, tout le monde a compris. La France ne trahira pas dans ce cas d'espèce. Les phrases longues et pompeuses sont destinées à l'opinion française, c'est tout, et pour que les médias lourds — tous aux ordres — puissent déblatérer sans conséquence. Poutine, prudent, a tout de même pris soin de faire redire à Macron son engagement sur l'Accord avec l'Iran. Le Président français a compris et a clarifié son propos sans «en-même-temps». A Berlin, on a poussé un ouf de soulagement. Les Allemands, exécutif politique et hommes d'affaires, soupçonnent la France de combiner quelque chose de pas bon du tout. Depuis les attaques frontales de Trump contre l'Europe, Paris, il est vrai, répond mais pas «fermement», selon l'Allemagne. Pire ! Dès que des actes concrets sont proposés pour riposter à la guerre déclenchée par l'Amérique pour mettre hors circuit commercial et politique l'UE, les Français tergiversent, grenouillent, font volte-face, privilégient les postures et se débinent, la peur au ventre. Lorsqu'il y a deux semaines, les Allemands ont osé poser le problème du «parapluie de défense américain», c'est-à-dire l'Otan, en France, silence total. Alors que l'Allemagne voulait aller jusqu'à défier l'Amérique sur l'importance — ou pas — pour l'Europe d'une alliance atlantique toute dédiée aux Etats-Unis d'Amérique... A Saint-Pétersbourg, Macron paraissait courageux et plein d'allant. Il a même fait référence à de Gaulle, à l'histoire de l'amitié entre la France et la Russie et plusieurs autres choses encore. Les Russes, les Allemands, les Japonais, les Chinois, les Iraniens attendent de voir... La France depuis Sarkozy et Hollande n'inspire pas confiance. Alors là, pas du tout ! A Bruxelles, les commissaires européens qui ne peuvent pas grand-chose sans une entente franco- allemande ont suivi, bien sûr, attentivement les propos de Macron au pays de Dostoïevski, mais eux aussi préfèrent attendre. Les dégâts collatéraux du «en-même-temps» sont beaucoup plus graves que l'on croyait... A. M.