Des astrophysiciens accusent Loth Bonatiro de «tentative démagogique grossière» et de lancer épisodiquement de «pseudo-controverses ineptes qui sont autant de distractions malvenues et basées sur la provocation et le sensationnalisme de personnes à l'ego démesuré». M. Kebci - Alger (Le Soir) - Une vingtaine d'astrophysiciens, d'astronomes et de cosmologistes ont jugé utile de mettre fin à ce qu'ils estiment n'être qu'une «pseudo-controverse» lancée récemment par Loth Bonatiro au sujet de la durée du jeûne, lui qui soutient que les Algériens jeûnaient 40 minutes supplémentaires. Dans un long communiqué rendu public, hier, ces professeurs, dont nombre officient ici en Algérie, au niveau du Craag et d'universités aux côtés d'autres exerçant à l'étranger comme Nidhal Guessoum, astrophysicien de l'université américaine de Sharjah, aux Emirats arabes unis, Dr Abderahmen Zoghbi, astrophysicien de l'Université de Michigan, aux Etats-Unis d'Amérique, ont tenu à démentir les déclarations «scientifiquement invalides, en plus de constituer une action irresponsable» de Bonatiro. Une réponse qu'ils jugent opportune et nécessaire au vu, selon eux, de «l'ampleur prise par la controverse sur la place publique et la désinformation massive menée à travers des médias complaisants faisant dans le sensationnel». Pour les signataires de cette réplique, la table des horaires de prières et calendrier utilisés par le ministère des Affaires religieuses est établie chaque année par un groupe d'experts astronomes du Craag (Centre de recherche en astronomie, astrophysique et géophysique) utilisant des règles standard de calcul, les «mêmes que celles utilisées depuis des décennies et elles sont consensuelles de par le monde musulman», tiennent-ils à préciser. Une table qui sert également de «calendrier hégirien évolué, basé sur des critères astronomiques de visibilité du croissant et non seulement sur la simple occurrence de la conjonction lunaire», ajoutent-ils. Et d'accuser Bonatiro de vouloir «prendre otage toute la science astronomique», lui qui prête au département que dirige Mohamed Aïssa, de vouloir «sciemment tromper les Algériens en produisant ces fausses tables en opposition avec les horaires vrais». Des «erreurs remontant à l'indépendance et qu'il met sur le compte d'un astronome amateur qui en a établi les règles et que nous avons hérité aujourd'hui». Une «pure calomnie», estiment-ils puisque ces règles de calcul ont été établies par l'astronome musulman bien connu El-Birouni, dont notamment la règle des 18° d'élévation angulaire du soleil sous l'horizon qui permet de calculer les horaires de la prière de l'aube (fadjr) et donc de l'imsak, et celle de la nuit (isha) et qui constituent les principaux points de contention que certains gens soulèvent concernant la table». Et de rappeler à juste titre que ces règles de calcul ont «une continuité historique, les mêmes que celles utilisées, à quelques différences près ici et là, par tous les autres pays musulmans», accusant Bonatiro d'avoir non seulement «un problème avec les horaires de prières des Algériens depuis l'indépendance, mais bien aussi avec tout le monde musulman». Allant au fond de la polémique, ces universitaires affirment que «l'obscurité complète, correspondant à la disparition de la lueur crépusculaire, est définie précisément en astronomie par le crépuscule astronomique (ou aube astronomique pour le matin)». Ce qui se produit, ajoutent-ils, «lorsque le soleil se trouve en deçà de la ligne des 18° sous l'horizon et que toute illumination du ciel même indirecte a disparu, et à ce moment-là sous des conditions idéales, on peut voir les étoiles les moins lumineuses. C'est le même critère utilisé aujourd'hui de par le monde musulman avec très peu d'exceptions». Concernant l'argument avancé par Bonatiro selon lequel lors de la sortie de la prière du fadjr à La Mecque le ciel est déjà lumineux alors que chez nous c'est toujours l'obscurité complète, ils estiment qu'«en plus de ne point constituer de démonstration scientifique, cette «preuve» «est d'une fausseté patente comme les visiteurs des lieux saints peuvent facilement en témoigner». Ceci en plus du fait qu'elle est en «contradiction directe avec nombre de hadiths du Prophète disant précisément le contraire, dont le fameux hadith de sayyeda Aïcha sur le sujet». Affirmant que la vraie raison pour laquelle l'obscurité règne encore lors du fadjr est la «non-occurrence de conditions idéales d'observation par des observateurs casuels», les rédacteurs dudit communiqué soutiennent que «seules des conditions d'observation avec horizon Est complètement dégagé, nuit sans lune, loin des agglomérations, d'absence de concentration substantielle d'aérosols dans l'air, et bien sûr des conditions météo idéales, permettent de voir cette lueur aurorale». Et d'ajouter que la «présence de nos jours de pollution lumineuse produit un faible halo lumineux qui diminue fortement le contraste sur la ligne d'horizon». Quant à l'accusation portée par Bonatiro que les astronomes algériens confondent avec leurs calculs le pseudo-fadjr (al-fadjr al-kadhib) qui correspond astronomiquement parlant à la lumière zodiacale, avec le vrai fadjr (l'aube), elle est aussi «absurde que prétendre qu'une cuisinière ne saurait distinguer la semoule de la farine», affirment-ils. Suffisant pour conclure que les horaires dans la table du ministère des Affaires religieuses et préparés par les astronomes du Craag sont «établis sur de solides bases scientifiques, et utilisent les mêmes règles que celles en utilisation dans les autres pays musulmans. C'est-à-dire «totalement fiables et ne nécessitent aucune correction». M. K.