Il fait froid et il pleut sur de larges pans du pays. Il a même neigé sur certaines hauteurs à des altitudes tout à fait modestes. Nous sommes en hiver, c'est normal. Nous sommes même en janvier, le mois qui symbolise le plus la saison. Mais l'Algérie ne vit pas toujours… normalement ses saisons. Le rapport à la nature devient compliqué pour plein de raisons. Enfin, ce n'est pas toujours de nature qu'il s'agit mais des moyens qu'on s'est donnés pour vivre la symbiose de ses rotations. Il pleut un peu, il neige parfois et il fait froid par endroits. Question climat, le pays n'est pas vraiment inquiétant. Encore heureux, tellement les raisons d'angoisser ne manquent pas. Il paraît même que le monde entier nous envie sur ce plan. Il y a beaucoup d'exagération, de mauvais folklore et quelque fierté tirée par les cheveux, en l'occurrence. Mais la réputation n'est pas usurpée. Il y a la pluie, la neige, le froid et les images d'accompagnement. Nous vous en livrons quelques-unes. Un homme, un septuagénaire, est mort de froid à Belcourt, dans la vieille voiture rouillée qui lui servait de logis de fortune. Avant, il habitait avec sa famille dans un garage prêté par un homme du quartier. Le gars a récupéré son bien et la famille est repartie dans son douar d'origine. Le septuagénaire est resté, vaquant à ses occupations, quand il en a dans la journée et trouvant refuge le soir venu dans la caisse usée. On l'y a retrouvé mort ce vendredi. Mort de froid et certainement d'autre chose, surtout. Autre instantané : un véhicule toujours, le drame en moins. L'ami est dans sa voiture sur la route du littoral-ouest d'Alger. L'homme n'en a pas l'habitude, il vit à l'étranger depuis longtemps et, traditionnellement, c'est en été qu'il vient au bled. Il a commencé à pleuvoir, pas de quoi fouetter un chat. Là où il vit, quand il pleut, eh bien, il… pleut. Au bout de cinq minutes, il a commencé à se demander si quelque chose de grave ne venait pas d'arriver. Un bouchon dense et providentiel venait de se former devant lui en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Il a vu des conducteurs s'exciter, klaxonner, s'arrêter et descendre, il y en a même qui se sont mis à d'impossibles manœuvres pour faire demi-tour. L'ami a fini par s'inquiéter et demander ce qui se passe. La réponse qu'on lui a donnée, il n'en est toujours pas revenu : il pleut ! Une troisième et dernière image. Celle des habitants de l'intérieur du pays dont les localités viennent d'accéder au gaz naturel. Ils sont contents, c'est normal. Fini le calvaire des bouteilles de butane toujours problématiques. Le «gaz du mur», comme on l'appelle dans le pays profond, est disponible, pas cher et pratique. Le bonheur, quoi. Ça ne nous fait pas oublier le monoxyde de carbone pour autant, il est en train de tuer dans des proportions qui inquiètent. Surtout chez ceux qui n'en ont pas encore l'habitude pratique. On meurt de la chose et de son contraire, les saisons n'y sont pour rien. S. L.