La lutte contre la corruption est inscrite parmi les priorités de l'Etat qui a mobilisé les moyens nécessaires pour éradiquer ce fléau qui a pris des proportions alarmantes ces dernières années et porté atteinte à l'économie nationale. Depuis le déclenchement du mouvement citoyen Hirak le 22 février dernier, l'Etat a affiché sa détermination à répondre à la volonté populaire, notamment en ce qui concerne la lutte contre la corruption et le jugement de tous ceux qui en sont impliqués. Il s'agissait aussi d'assainir les institutions du pays de ce fléau qui a gangréné l'administration et porté atteinte à l'économie nationale. Cette volonté d'en finir avec ce phénomène a été marquée par les changements opérés au niveau institutionnel, à l'instar de la nomination, en mai dernier, d'un nouveau président de l'Organe national de prévention et de lutte contre la corruption (ONPLC), en l'occurrence Tarek Kour, en remplacement de Sebaibi Mohamed. L'ONPLC est une autorité administrative «indépendante», dont la mission est, entre autres, de «proposer et contribuer à animer une politique globale de prévention de la corruption, consacrant les principes de l'Etat de droit et reflétant l'intégrité, la transparence ainsi que la responsabilité dans la gestion des biens et des deniers publics». Doté de moyens humains et matériels nécessaires à l'accomplissement de ses missions, il est habilité à demander aux administrations, institutions et organismes publics ou privés ou à toute personne physique ou morale de lui communiquer tout document ou information qu'il juge utile pour la détection de faits de corruption. Les changements ont concerné également l'Office central de la répression de la corruption (OCRC), dont le directeur général, Mokhtar Rahmani, a été remplacé le même mois par Mokhtar Lakhdari. Cet organisme est chargé de constater les infractions dans le cadre de la lutte contre la corruption avec la possibilité d'intervenir dans un territoire de compétences élargi au niveau national. Parmi ses objectifs figure également le renforcement des outils de lutte contre la corruption et toute forme d'atteinte à l'économie nationale et aux deniers publics. Il est chargé aussi de procéder à des enquêtes sur des faits de corruption et d'en déférer les auteurs devant la juridiction compétente. … Avec résolution, avant et après la présidentielle En réponse à l'une des revendications du Hirak appelant à juger les corrompus, la campagne anti-corruption s'est soldée par la mise en détention provisoire ou sous contrôle judiciaire des deux ex-Premiers ministres, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, ainsi que d'anciens ministres et hommes d'affaires pour plusieurs chefs d'accusation dont «abus de fonction» et «dilapidation de deniers publics». Dans ce contexte, le ministre de la Justice, Slimane Brahmi, a souligné que la justice algérienne «est devant une responsabilité historique décisive» pour le «rétablissement de la confiance et la concrétisation des aspirations des citoyens». Il a mis en avant le rôle de l'autorité judiciaire dans la lutte contre la corruption, la protection des deniers publics et la récupération des fonds spoliés. A cet égard, M. Brahmi a exhorté les parquets généraux à superviser «minutieusement» les enquêtes préliminaires à travers un approfondissement des investigations pour démasquer les personnes impliquées dans les affaires de corruption, définir leurs avoirs illicites et situer les lieux où ils se trouvent. D'autre part, et selon Me Hind Benmiloud, avocate à la Cour suprême et au Conseil d'Etat, l'Algérie dispose de l'outil juridique pour rapatrier les fonds détournés et transférés à l'étranger, en s'appuyant sur la loi 01-06 relative à la lutte contre la corruption, laquelle est inspirée de la Convention internationale en la matière. De son côté, Mohamed Boukhari, expert financier, a révélé que l'Algérie avait enregistré une moyenne de flux illicites qui s'élève à 11 milliards de dollars en 2015, calculée sur la base d'un rapport onusien qui l'avait estimée à 8 milliards de dollars, contre 14 milliards USD pour le Fonds monétaire international (FMI) et se référant aux surfacturations et sous-facturations liées au commerce extérieur. En outre, l'Algérie avait enregistré, en 2017, pas moins de 1 239 déclarations de suspicions émanant de banques nationales ainsi que 180 rapports confidentiels de la part de certaines administrations, notamment des douanes, a-t-il ajouté. Il a expliqué que la possibilité pour l'Algérie de récupérer les fonds illégalement transférés à l'étranger est «conditionnée par l'existence de structures adéquates», indiquant que «pour qu'une personne soit mise derrière les barreaux, il faut des motifs raisonnables». Il est à rappeler, par ailleurs, que le général de corps d'armée Ahmed Gaïd Salah, vice-ministre de la Défense nationale, chef d'état-major de l'Armée nationale populaire (ANP), a appelé à maintes reprises à poursuivre le processus de lutte contre la corruption avec «résolution, rigueur et constance avant et après la présidentielle». «Aucun espoir que la corruption persiste dans notre pays. Point d'horizons aux corrupteurs et notre pays reprendra son chemin de nouveau sur des fondements solides où la loi règnera et la légitimité constitutionnelle prévaudra», a-t-il affirmé. Le chef d'état-major de l'ANP a appelé le peuple algérien à faire montre d'une «extrême vigilance» et à demeurer «solidaire» avec son armée afin d'empêcher les instigateurs de plans pernicieux de s'infiltrer dans ses rangs, «quelles que soient les conditions et les circonstances». Il a mis en avant «le défi majeur que constitue la lutte contre la corruption, qui possède aujourd'hui des ramifications politiques, financières et médiatiques, ainsi que de nombreux lobbies infiltrés au sein des institutions du pays». Pour Gaïd Salah, «la solidarité du peuple algérien avec la justice, dans ce sens, est une autre garantie essentielle lui permettant de poursuivre son rôle et d'accomplir son devoir national dans ce processus d'assainissement, et qui mérite de notre part, aujourd'hui, toute la considération et l'estime pour les efforts persévérants dans le traitement du nombre important de dossiers de corruption accumulés».