Décidément, le week-end est loin d'être deux journées de repos pour les écoliers. «Cours particuliers de soutien» oblige, un phénomène qui devient une règle. A quoi sert l'école ? Une question lourde de sens dans le débat sur le rôle des établissements scolaires. Selon des données officieuses, à Guelma, pas moins de cinquante mille élèves suivent des cours de soutien. Evalué à des dizaines de millions de dinars par mois, un marché qui fait la part belle aux donneurs de cours non-déclarés, qui représentent aujourd'hui un pourcentage exorbitant. Faut-il engager une réflexion pour un passage au statut professionnel pour le soutien scolaire ? «C'est pour lui permettre de prendre un tant soit peu le pas sur les occupants informels de ce marché», déclare un spécialiste, en précisant que cette stratégie permettra de baisser le taux de chômage et à lutter contre l'informel. Il a été estimé qu'au 2e et 3e palier de l'enseignement public, un élève sur deux reçoit des cours payants de soutien scolaire. Il est vrai que ces vingt dernières années, ce phénomène a connu une remarquable progression. Cette tendance a été régulièrement confirmée par les donneurs de cours particuliers à Guelma, qui devient un service de consommation courante. Pour Malika, une sexagénaire, retraitée du secteur de l'éducation, «l'enthousiasme accru vis-à-vis de ce phénomène peut s'expliquer en partie par la considération qu'ont les parents pour l'encadrement offert aux élèves dans les établissements scolaires publics, qualifié d'inadéquat». Selon elle, il y a d'autres explications psychologiques, «certains parents pensent qu'ils sont obligés de recourir à cette solution par peur de représailles des profs, dont certains proposent leurs services, dès la rentrée scolaire, et à cela s'ajoute le phénomène de contagion et de concurrence déloyale». Fini donc le temps de l'individualisation de l'enseignement, où les cours de soutien étaient conseillés à des élèves bien ciblés, en s'appuyant sur des méthodes qui nous permettent d'identifier les lacunes de chacun en vue de lui transmettre les connaissances qui lui manquent. «Des cours réguliers avec des connaissances acceptables et une bonne assiduité de l'apprenant en milieu scolaire suffiront à le remettre au bon niveau. Toutefois, si des parents envisagent plus ou moins d'heures de soutien, c'est admissible», estime une ancienne directrice d'un CEM du centre-ville de Guelma. «Mais toujours est-il qu'avec une réglementation effective de cette activité, on finira par aider au changement de mentalité des parents d'élèves. Et la tendance pourra très vite s'inverser», comme l'explique cette sociologue qui exerce en milieu scolaire. «Le constat que nous faisons n'est pas reluisant, au vu des problèmes qui peuvent encore se poser aujourd'hui. Ce sont surtout les parents aux petits et moyens revenus qui semblent rencontrer le plus de difficultés. Un état de fait qui risque de voir les inégalités scolaires se creuser davantage.» C'est un disfonctionnement dans notre système scolaire, on y confond le développement intellectuel avec la réussite. Alors que les meilleurs esprits sont tombés d'accord qu'il fallait réglementer cette activité qui ne cesse de prendre de l'ampleur au détriment des valeurs de l'école publique. Noureddine Guergour