Paysages d'automne, le dernier long-métrage de Merzak Allouache, a été projeté en avant-première à l'occasion du 10e Festival international du cinéma d'Alger. Voulu comme un thriller mettant en vedette Salima Abada dans le rôle d'une journaliste d'investigation, le film peine à convaincre. Nous sommes à Mostaganem. Houria, une journaliste en instance de divorce, vivant avec sa mère malade et hantée par le souvenir de son père, journaliste également, tué par les terroristes islamistes, se passionne pour une obscure affaire de lycéennes assassinées dont on retrouve les cadavres échoués sur les plages. Essayant en vain de soutirer des informations à son ami d'enfance, un policier, dont le père fut aussi tué par les terroristes (Khaled Benaïssa), Houria finit par découvrir le présumé chef d'un réseau de prostitution enrôlant des mineures ; le proxénète en question n'est autre qu'un célèbre homme politique islamiste (Hassen Ben Zirari) dont l'organisation tentaculaire compte parmi ses complices des responsables de presse et des fonctionnaires de l'Etat. Parallèlement, la journaliste, en compagnie d'une jeune collègue photographe, enquête sur les conditions de vie des réfugiés subsahariens bien que ce volet du film demeure secondaire. Depuis près de dix ans, Merzak Allouache s'offre une seconde jeunesse cinématographique en multipliant les films (un tournage tous les deux ans en moyenne). Optant pour des projets à petits budgets, dénichant parfois de talentueux acteurs inconnus et s'attachant souvent à deux ou trois comédiens qu'il sollicitera pour plusieurs films, le cinéaste a fait mouche à moult reprises, notamment avec l'audacieux Normal (2010), l'inoubliable Repenti (2012) et le déroutant Terrasses (2013). Avec Paysages d'automne, il refera appel à Salima Abada que l'on avait déjà vue dans le docu-fiction Enquête au paradis (2016), à Khaled Benaïssa (Le repenti) et à Adlane Djemi (Les terrasses, Madame Courage). Mais c'est sur Salima Abada que le film repose principalement tant la caméra ne la quitte quasiment jamais, usant de manière souvent excessive du plan serré. L'actrice est remarquablement constante dans un jeu à la fois sobre et émouvant tandis que Benaïssa incarne avec conviction le seul personnage secondaire relativement fouillé. Mais dans ses intentions de thriller, Merzak Allouache semble se départir d'une certaine rigueur qui avait marqué ses précédents films. Il n'est pas difficile, en effet, de déceler un dispositif narratif chancelant dont les fragilités et les approximations sont comblées par des « ameublements » dramaturgiques sans pertinence. Les tentatives de Houria d'enquêter sur les conditions de vie des réfugiés subsahariens avant que le sujet ne devienne celui de la jeune photographe Latifa, en sont un. On retrouve ce même recours à l'accessoire inconsistant dans la mise en scène où on ne compte plus les séquences d'ambiance urbaine, répétitives et lassantes, et les gros plans quasi-systématiques. Greffé à un contexte algérien avec une thématique inédite dans le cinéma national, le genre du thriller ne semble pas pour autant inspirer Allouache qui s'enlise dans des lenteurs injustifiées qui plombent le rythme et diluent l'intrigue à telle enseigne que le dénouement perd son effet de surprise et apparaît comme un final en queue de poisson. S. H.