Jeudi 12 décembre 2019, jour de vote, tous les constats sur le terrain sont unanimes pour démontrer que la wilaya de Sétif a été coupée en deux. Une partie qui a voté et l'autre qui s'est abstenue. En effet, au chef-lieu de wilaya et dans d'autres daïras comme El-Eulma, Aïn-Oulmane, Aïn-Azel, Aïn-Arnat…, les électeurs ont affiché de l'engouement pour cette présidentielle contrairement à la dernière élection présidentielle de 2014 ou les législatives de 2017 où l'abstention était énorme. Dès le matin, et à l'ouverture des bureaux de vote, les électeurs commençaient à affluer. Personnes âgées et jeunes se sont empressées pour accomplir leur devoir civique sous le regard désapprobateur des «hirakistes» qui se sont postés devant les centres de vote. Les services de sécurité présents en grand nombre ont dissuadé toutes tentatives d'entrave du scrutin, d'autant plus que la police a annoncé la couleur tôt le matin en procédant à l'interpellation de plusieurs personnes «anti-vote» présentes aux abords du centre de vote du lycée Mohamed-Kerouani qui fait face à la placette où se rassemblent chaque vendredi les manifestants du mouvement populaire. Le taux de participation dans la wilaya de Sétif a été estimé à 43,12%. Contrairement à Sétif-Ville et à d'autres daïras qui ont voté, toutes les localités du nord de la wilaya se sont abstenues. Aucun électeur de Béni-Ourtilane, Bouandas, Beni-Mouhli, Draâ Kebila, Aïn-Lagradj et autres localités dites berbérophones n'avait pris part au scrutin. D'ailleurs, aucun centre de vote ne fut ouvert pour la circonstance. Des incidents ont éclaté le mercredi soir dans la région de Béni-Ourtilane. En effet, selon les déclarations des habitants de cette localité, des urnes préalablement bourrées de bulletins auraient été acheminées de Sétif et entreposées au lycée Slimane-Amirat de Béni-Ourtilane. Mis au courant de cette tentative de «fraude», des milliers de citoyens, estimés à 30.000, soit la moitié de toute la population de la ville, se sont dirigés vers le lycée pour l'investir et récupérer des urnes déjà remplies ainsi que les listes des soi-disant votants. « Je n'ai jamais voté de ma vie ni possédé une carte d'électeur mais sur la liste, il est mentionné que j'ai voté. C'est de la fraude pure et simple. On m'a volé ma voix ainsi que celle de milliers de citoyens de Béni-Ourtilane et d'Aïn-Lagradj», dira un citoyen en colère. Les habitants se sont, par la suite, dirigés vers les sièges de la Sûreté de daïra et de la brigade de Gendarmerie nationale où ils ont organisé un sit-in. Devant cette situation qui risquait de déraper à tout moment, d'importants renforts des forces de sécurité ont été dépêchés vers Béni-Ourtilane. Des affrontements ont éclaté entre la population et les services de sécurité qui avaient fait usage de bombes lacrymogènes et de balles en caoutchouc. Des dizaines de blessés ont été enregistrés parmi la population. Au lendemain de ces affrontements, la situation restait très tendue dans toute la région et aucune opération de vote n'a été signalée. Notons, à la fin, que le nombre d'électeurs dans la wilaya de Sétif pour cette élection présidentielle est de l'ordre de 1.021.317. Le nombre de votants, quant à lui, a été estimé à 440.364, soit un taux de participation de l'ordre de 43,12%. Les électeurs sétifiens ont ainsi plébiscité le candidat Abdelmadjid Tebboune qui a obtenu 189.912 voix, soit un taux de 49,57%, suivi de Bengrina avec 72.537 voix (18,94%), Benflis avec 62.060 (16,20%), Belaïd avec 31.768 voix (8,29%) et enfin en dernière position, le candidat Azzedine Mihoubi qui n'a récolté que 26.792 voix, soit un taux de 6,99%. Imed Sellami