La justice tourne au ralenti depuis hier, premier jour de mise en application des mesures annoncées par le ministère pour faire face à l'épidémie de coronavirus. Abla Chérif - Alger (Le Soir)- Le tribunal de Sidi-M'hamed est passé d'une ambiance bouillonnante à un rythme de fonctionnement minimum. Du jamais vu dans ces lieux habituellement plongés dans des journées, des semaines, des mois interminables. Plus de défilés incessants de fourgons cellulaires en provenance d'El-Harrach, de Koléa, plus de présentation de nouveaux détenus… Aux portes du bâtiment, des policiers gantés et protégés de bavettes annoncent aux citoyens qui ne le savent pas encore le report de pratiquement toutes les audiences. La veille, le ministère de la Justice avait publié un communiqué annonçant la réduction de toutes les audiences «du tribunal criminel en première instance et en appel, des audiences correctionnelles dans les tribunaux et en cours, à l'exception de celles déjà enrôlées et déjà en cours et dans la mesure du possible la prévision de procédures de jugement à distance». Seules les affaires entamées avant la prise de ces décisions pourront donc se poursuivre. Le procès de l'affaire Hamel en fait partie. Le jugement avait débuté mercredi dernier et donc bien avant l'annonce de mesures radicales visant à endiguer la propagation du coronavirus. Dans la salle d'audience, où toutes les fenêtres demeurent désormais ouvertes, la situation exceptionnelle qui prévaut actuellement se fait cependant bien ressentir. La valse des avocats non concernés par ce dossier mais curieux d'assister aux témoignages de l'ancien patron de la DGSN et des membres de sa famille a cessé. Seule la défense constituée se trouve sur les lieux. Les autres salles sont vides, tout comme les couloirs. Il a été, en effet, décidé de suspendre également la réception du public dans les juridictions sauf dans des cas d'urgence laissés à l'appréciation des juges. Les audiences publiques sont également suspendues au niveau des tribunaux mais peuvent se tenir au niveau des cours, sans la présence des concernés qui seront représentés par leurs avocats. Les audiences en référé et administratives se dérouleront, elles aussi, sans la présence des parties. La charge qui pesait il y a quelques jours encore sur les juges d'instruction et les procureurs est, elle aussi, considérablement réduite, le ministère de la Justice ayant également suspendu «la sortie des détenus de prison à la demande des juges d'instruction, sauf en cas de nécessité absolue». Des avocats d'ex-ministres détenus nous ont déclaré hier qu'il était ainsi très probable de voir des instructions devant se tenir cette semaine (Djamel Ould Abbès était programmé pour ce mercredi) reportées. Les mesures mises en place concernent également les établissements pénitentiaires où les visites aux détenus ont été suspendues «tout en garantissant l'information aux familles». Les visites des avocats pourront cependant se poursuivre, mais elles se dérouleront par écran séparateur. Dans son communiqué, le ministère de la Justice annonce également la suspension «des régimes de semi-liberté tels que les ateliers externes». Il faut savoir enfin que le ministère de la Justice a publié un second communiqué hier. Cette fois, le texte sonne cependant comme une mise au point faite à l'Union nationale des ordres des avocats (UNOA) qui a dernièrement adressé au ministre de la Justice une missive dans laquelle elle lui demande «de prendre des mesures préventives pour lutter contre la propagation du virus». L'initiative a eu lieu en début de semaine. Le département de Zeghmati a réagi en déclarant que la demande du président de l'UNOA «relève des missions des pouvoirs publics qui, depuis l'apparition de cette pandémie, n'a eu de cesse de prendre toutes les mesures de prévention disponibles en vue de préserver la santé publique contre le coronavirus». A. C.