Parmi les éléments qui poussent à la réforme des retraites un peu partout dans le monde, la crise économique et le vieillissement de la population ne sont pas les seuls facteurs de réformes. Il faut aussi prendre en compte les nouvelles orientations économiques qui s'imposent de plus en plus, les transformations du travail et de la société, la pression des assureurs et autres fonds de pension ou encore les nouveaux modèles d'organisation des retraites forgés au niveau international. La comparaison des réformes nationales souligne qu'il peut y avoir plusieurs solutions au problème des retraites. Le choix de l'une d'entre elles est moins imposé par la démographie ou l'économie qu'il ne l'est par les institutions de retraite déjà en place. Mais ce choix est aussi politique, et implique des arbitrages importants en matière de redistribution entre les générations, entre les hommes et les femmes, entre les groupes sociaux. En même temps, l'étude des débats internationaux comme celle des tendances communes aux réformes nationales montrent que la plupart des décideurs se réfèrent à un nouveau et même modèle de système de retraite, promu par de nombreuses organisations internationales, fondé sur un système mixte de retraite, où la redistribution joue un rôle minimal, et la capitalisation un rôle croissant : mais ces tendances sont profondément et socialement inégalitaires et créent de l'exclusion de masse. Pendant longtemps, la vieillesse a été considérée comme un risque : celui de peut-être devenir un jour trop vieux pour pouvoir travailler et subvenir à ses besoins. C'est pour faire face à ce risque que divers dispositifs ont été mis en place, d'abord dans le but de réduire la pauvreté parmi les personnes âgées, puis de garantir un revenu de remplacement à tous ceux qui partent à la retraite et, enfin, de faire en sorte que ce revenu se rapproche des revenus d'activité. Malheureusement, en Algérie nous en sommes encore loin. Des réformes des retraites inadaptées Pour Colin Gillion, expert de l'OIT (Organisation internationale du travail) sur la Sécurité sociale, «toute pension qui ne permet pas aux gens de franchir le seuil de pauvreté n'est pas une pension raisonnable. Un revenu de vieillesse qui soit au moins au-dessus du seuil de pauvreté devrait être une question de principe. Le problème se pose surtout dans les pays en développement où les systèmes sont très faibles». En Algérie, comme en Afrique, la majorité des gens travaillent en dehors de l'économie formelle — la retraite est un avantage social dont très peu bénéficient. Si l'OIT considère que la couverture mondiale des retraites a progressé, elle souligne, cependant, que les prestations restent modestes. Pour elle, le droit à la protection sociale des personnes âgées n'est pas encore une réalité pour la plupart des habitants des pays à bas revenu. Dans beaucoup d'entre eux, moins de 20% des personnes âgées qui ont atteint l'âge légal de départ à la retraite touchent une pension. Dans ces pays, une proportion importante des personnes âgées dépend, en grande partie, de l'entraide familiale. Dans les pays à revenu élevé, dotés de systèmes de protection sociale matures et de populations vieillissantes, le principal défi est de maintenir un bon équilibre entre la pérennité financière des régimes de retraite et des pensions suffisantes pour les personnes âgées. «Les récentes politiques d'austérité ou d'assainissement budgétaire ont également affecté l'adéquation des pensions de retraite. Dans plusieurs pays, ces réformes ont été engagées dans une optique budgétaire, sans prêter suffisamment attention à leur impact social négatif, mettant en péril le respect des normes minimales de Sécurité sociale et érodant le contrat social. Par conséquent, la pauvreté des personnes âgées augmente dans plusieurs pays de l'OCDE», précise Mme Ortiz, directrice du Département de la protection sociale de l'OIT. «Les pays qui introduisent des réformes de leur système de retraite doivent trouver un équilibre optimal entre les objectifs de durabilité et les prestations de retraite afin d'accomplir la mission des systèmes de retraite», ajoute Fabio Duran-Valverde, responsable de l'unité de finance publique, actuariat et statistiques de l'OIT. LSR