C'est aujourd'hui le jour le plus long de l'année. Mais depuis que le pays, à l'instar de toute la planète Terre, a été pris à la gorge par cette saloperie de virus sans lui laisser une minute de répit, des jours longs, on en a connu. Chaque jour a été le plus long, parfois le plus pénible de tous les autres passés. Mais ce n'est jamais évident que celui qui arrive sera moins angoissant, ni moins douloureux, ni moins inquiétant. Notre vie a basculé. Elle n'était déjà pas si rose, notre vie, mais ça n'atténue pas nos angoisses qu'une piètre consolation. Le désarroi est tel que nous avons même fini de décrocher de piètres consolations. Nous avons renoncé à beaucoup de choses, celles qui rythmaient nos jours dans l'ordinaire quand ce n'est pas le banal. Nous avons oublié les petits riens de gaieté, les rituels utilitaires, les gestes sans prétention et les élans sans façons. Les perspectives n'étaient pas claires et les jours d'après pas vraiment rassurants. Mais nous avons quand même attendu l'été. On l'a toujours attendu, l'été. Il nous faisait souvent miroiter des instants de liberté. Même parfois factice, on faisait semblant de scruter l'horizon, avant la désillusion. Pour autant, ces longs mois et leur succession de jours les plus longs n'ont pas été inutiles, ils nous ont appris beaucoup de choses, dont la plus retentissante est de découvrir combien la vie était belle et combien elle peut redevenir encore plus belle. Optimisme béat ? Oui, la béatitude n'est pas péjorative, même si nous avons fait qu'elle en soit ainsi. Nous avons attendu l'été. Les étés d'avant, tout le monde ne partait pas en vacances, cette année, personne ne partira. Le nivellement par le bas ou la justice immanente ? Ni l'un ni l'autre, nous sommes plutôt unis dans le malheur, à attendre l'été sans savoir pourquoi. Ou plutôt si, nous savons un peu quand même. L'été et ses grandes chaleurs devaient siffler le terme de la longue et coûteuse récréation de la saloperie. Rien de vraiment sérieux n'expliquait cette fin heureuse et miraculeuse mais il n'est pas interdit de s'accrocher à quelque chose, même dérisoire, quand on est au milieu de la tourmente. Les plages sont interdites mais on y va, c'est l'été. Le nombre de malades augmente mais les jours de la... maladie sont comptés. La bavette est obligatoire mais elle n'est pas si obligatoire que ça. Les regroupements de personnes sont défendus mais on est en déconfinement. Les taxis devaient reprendre avec une seule personne à bord mais ils exigent de reprendre comme avant. La vie est belle, les jours sont toujours aussi longs, comme en été. Ne demandez pas d'explication... c'est comme ça. Il y a danger. S. L.