Par Sarah Raymouche Quatre lettres et tout un monde l'entoure : des codes, des habits, des réflexes, des danses, des chansons, de la bonne humeur, de la positivité. C'est la K-Pop qui bouscule et fissure le quasi-monopole américain sur le marché de la musique pop. Elle compte à son actif des millions de fans de par le monde et une communauté de plus en plus importante en Algérie. Sarah, 11 ans, jeune adolescente, compte les minutes avant la diffusion mondiale du dernier clip de BTS. «BTS est le groupe coréen le plus important pour la K-Pop. J'aime leur musique et surtout leur danse. Je vais encore m'entraîner». Sarah est la parfaite illustration de comment atterrir dans cette musique. Après s'être intéressée aux mangas japonais, c'est tout naturellement qu'elle s'est orientée vers la culture asiatique, puis coréenne avant de découvrir la K-Pop. «L'accessibilité à l'information par internet et en plus avec le confinement, elle passe des heures devant son écran au point où maintenant, elle réfléchit à comment s'inscrire dans des écoles spécialisées en Corée, d'autant plus qu'il y a une forte communauté de fans algériens et qui donne plein de conseils», explique sa maman, Meriem, obligée de s'intéresser aux centres d'intérêt lui permettant de connaître ce genre musical. En fait, K-Pop, pour «Korean Pop», est un style musical originaire de Corée du Sud qui n'est pas seulement de la pop, mais aussi une multitude de genres musicaux qui ont tous un point commun: la langue coréenne. La K-Pop englobe la pop, comme son nom l'indique, mais également le rock, le R&B, le hip-hop et le rap, pour ne citer que les plus populaires. Des pages spécialisées ouvrent de plus en plus, notamment après le lancement d'une pétition nationale pour l'organisation d'un concours K-Pop en Algérie pour recruter des danseurs et chanteurs et décrocher une bourse vers le pays d'origine de cette culture. Une autre réalité bien visible également en termes d'offres commerciales. Des boutiques spécialisées voient petit à petit le jour à Alger et dans d'autres grandes villes à l'instar d'Oran. Meriem, sceptique et amusée, constate la transformation et les aspirations de sa fille : «Maintenant, elle s'est mise seule à apprendre le coréen et approfondir ses connaissances en anglais. Je me dis que c'est une bonne chose et que cela semble être un phénomène de mode et une lubie qui, je pense, lui passera. Dans le cas contraire, je l'encouragerais !» La plupart des parents restent dubitatifs face à cette culture venue d'un autre continent, inconnue pour eux, d'une langue aux sons sortants de l'ordinaire. D'autant plus qu'ils estiment qu'il n'y a pas de relations entre les us et coutumes algériennes et celles coréennes. Culture coréenne et algérienne : une corrélation ! Eh bien, oui, répondront les fans, surtout par rapport au respect d'autrui ! Les vidéos coréennes ne mettent pas en scène la drogue, très rarement l'alcool et les paroles de leurs chansons sont rarement vulgaires. M. Jihoon KIM, chargé d'affaire culturelle par intérim auprès de l'ambassade de Corée du Sud en Algérie abonde dans le même sens. Il explique : «Il y a beaucoup de points communs entre la Corée et l'Algérie, notamment ce qui a trait à la famille. Je pense que c'est grâce à cette ressemblance culturelle que l'intérêt des algériennes et algériens pour la K-pop a pu commencer à se propager. Je peux aussi mentionner le rôle d'Internet, bien entendu, comme il y a beaucoup de pages, vidéos, comptes, etc. que vous pouvez facilement trouver sur la Corée.» M. Jihoon KIM constate que l'intérêt que suscite la K-Pop n'est qu'un prolongement ou une conséquence d'un processus entamé, il y a de cela plusieurs années. «Il y avait un temps où on diffusait des séries coréennes sur la chaîne de télévision algérienne. Ce sont séries qui ont attiré, en premier, l'attention des premiers spectateurs. Et, ce sont ces mêmes spectateurs qui ont développé un intérêt pour la K-Pop en allant vers la musique, le taekwondo, les plats, le cinéma et même la langue.» Le programme culturel de cette ambassade est aussi riche en Algérie et a accompagné cet intérêt croissant. L'ambassade a inauguré la Semaine coréenne en septembre dernier. Les programmes étaient très variés, notamment le concours de la langue coréenne, la séance d'un film coréen, le concert de l'orchestre des jeunes de Busan, le concours de la cuisine coréenne, la calligraphie et le concours de taekwondo. En total, l'ambassade a reçu plus de 2 500 visiteurs lors de la Semaine. L'ambassade a initié ce programme depuis 2015 et on constate une forte croissance chaque année», note M. Jihoon Kim. Considérant l'émergence du nombre de plus en plus important de groupes de fans sur les réseaux sociaux, la représentation garde des contacts dans divers niveaux avec les fans de K-Pop à Alger. «En octobre dernier, des représentants de l'ambassade se sont rendus à Oran pour rencontrer 150 fans de K-Pop et ont inauguré des programmes comme une séance de dégustation de la cuisine coréenne, la diffusion d'un film coréen et une présentation sur la ville de Busan. L'ambassade envisage d'établir plus de programmes d'une telle envergure dès que la pandémie du Covid-19 s'atténuera considérablement», indique M. Jihoon Kim. S'agissant de l'apprentissage de la langue coréenne, de plus en plus demandé, l'ambassade organise le concours de la langue coréenne depuis 2015. Le chargé d'affaires culturelles par intérim relève : «Franchement, nous étions surpris par le niveau très élevé des participants algériens. Ce concours offre l'occasion pour les Algériennes et Algériens de présenter leur compétence de la langue coréenne.» Et il annonce qu'en novembre prochain, l'ambassade va programmer à nouveau le concours en ligne cette fois-ci. S. R.