La troisième vague à laquelle est confronté le pays depuis plusieurs jours est sans doute plus ravageuse que les deux précédentes, a alerté le président de la Société algérienne d'immunologie, Kamel Djenouhat, jeudi dernier, lors de son passage à la Radio Chaîne 3. La propagation exponentielle du variant Delta qui se combine à sa forte charge virale fait qu'il est difficile à contenir, explique-t-il. À l'heure actuelle, il est impossible, selon lui, de dire si nous sommes encore loin ou proches du pic de cette nouvelle vague, tant il devient de moins en moins évident de cerner les mutations du virus. Massiva Zehraoui - Alger (Le Soir) - Les spécificités du variant Delta, souligne Kamel Djenouhat, résident essentiellement dans sa vitesse de propagation. Ainsi, «au lieu de contaminer trois personnes, le malade infecté par ce variant en contamine quatre», précise-t-il. Ce qui explique pourquoi nous nous sommes retrouvés avec un nombre de contaminations dépassant les 1 000 cas par jour en un laps de temps aussi réduit. Cette troisième vague, dit-il, a pris de court tous les spécialistes et experts, entraînant très vite la saturation de structures de santé qui se conjugue au manque d'oxygène médical. Autre élément qui accentue la dangerosité de ce variant est qu'il s'attaque directement aux poumons. «Les personnes qui se présentent au scanner ont des atteintes de poumons qui dépassent 50%», relève-t-il, ce qui amenuise les chances de nombreux patients de résister au virus. Le professeur Djenouhat attire l'attention sur le fait que le variant en question se transmet en à peine quelques minutes, et touche absolument toutes les tranches d'âge. «Aujourd'hui, nous constatons que ce virus touche aussi des nourrissons. En 15 jours, nous avons eu deux cas de nouveau-nés avec des poumons blancs», affirme-t-il, pour interpeller sur la gravité de la situation. Pour les autres patients atteints de Covid-19, ils nécessitent quasiment tous d'être assistés avec une importante quantité d'oxygène, signale encore Kamel Djenouhat. D'après lui, les choses se sont détériorées tellement vite que ça a fini par entraîner une anarchie totale dans les structures sanitaires. «Cette fois-ci, nous avons été pris de court», admet-il en insistant sur l'importance d'étendre la prise en charge des malades du Covid-19 aux établissements de proximité et aux EPSP, et de mobiliser tous les services en lien avec la santé. Interrogé sur les options qu'il nous reste pour bloquer la propagation du variant Delta, le Pr Djenouhat estime qu'en plus de revenir à la vigilance la plus extrême, la vaccination massive reste la seule alternative. Du moins, pour diminuer le nombre de décès. Il considère que la Covid-19 du début est aujourd'hui ce qu'on appelle aux Etats-Unis «la pandémie des non-vaccinés», à savoir «les personnes qui n'ont pas été vaccinées, celles qui n'ont pas contracté le virus et celles qui l'ont contracté puis ont perdu leur immunité». La vaccination de masse est nécessaire et même urgente pour Kamel Djenouhate. Dans la mesure où il est certifié que le vaccin évite les formes sévères du virus. Il étayera ses propos en se référant aux pays qui ont vacciné 70% de la population à l'instar de l'Angleterre. « Bien que le nombre de contaminations soit important ces derniers jours, le nombre de décès est en revanche insignifiant», assure-t-il. Par conséquent, il appelle les pouvoirs publics à faciliter l'accès de la population au vaccin, notant que depuis quelques semaines, «l'engouement est de plus en plus perceptible chez les citoyens qui cherchent à se faire vacciner». Sur l'efficacité des vaccins contre la Covid-19, il tient à rassurer qu'ils le sont tous. « Après, le degré d'efficacité varie d'un vaccin à un autre, mais tous préviennent les complications liées à l'épidémie .» En ce qui concerne les spécialistes de la santé qui expriment leurs réticences vis-à-vis du vaccin, Kamel Djenouhat juge qu'ils «devraient assumer leurs propos, si la situation sanitaire venait à s'envenimer davantage». Kamel Djenouhat s'est même dit favorable à l'instauration du principe de la « vaccination obligatoire», en argumentant qu'on ne peut «parler de liberté individuelle quand celle-ci impacte négativement la santé publique», soulignant qu'un débat est engagé à ce sujet. M. Z.