Encore une fois, notre pays vit des moments tr�s difficiles qui nous montrent que 50 ann�es apr�s l�ind�pendance, l�Alg�rie se recherche encore. Comment se fait-il que le pays dont les investissements publics sont parmi les plus �lev�s au monde puisse conna�tre cela ? Cet �ni�me �pisode de m�contentement populaire m�rite � notre sens mieux que les explications surnaturelles de notre ministre de l�Int�rieur qui pense que ces troubles sont l��uvre de petits voyous sans v�ritable conscience politique. Pour m�moire, les �meutes d�Octobre 88 ont �t� aussi qualifi�es par un ambassadeur devenu ministre de la R�publique de chahut de gamins, la suite tout le monde la conna�t. Malaise g�n�ral, corruption. Emeutes � r�p�tition, jeunes et moins jeunes qui essayent de fuir le pays au p�ril de leurs vies, pourquoi tout cela ? C�est vrai que l�Alg�rie a de l�argent pour construire un million de logements et des autoroutes cl�s en main, malheureusement, ces dirigeants sont en panne d�id�es. Apr�s des ann�es d�un avant toute vers l��conomie lib�rale et des tentatives de privatisation tous azimuts avec les r�sultats d�sastreux que l�on sait, on assiste � une marche arri�re toute avec un retour vers l��conomie centralis�e et une tendance au protectionnisme d�antan. Le probl�me, c�est que cette politique d�une chose et son contraire a �t� et reste men�e par la m�me �quipe install�e au pouvoir depuis des d�cennies !!!. Schizophr�nie ? Non, c�est plut�t de l�incomp�tence et l�incapacit� d�avoir une vision et une strat�gie de d�veloppement globale, claire et juste. Pour ne pas �tre nihiliste, on dira que des r�alisations ont �t� certes r�alis�es, mais pour les axes les plus importants du programme pr�sidentiel, c�est l��chec. La d�pendance aux hydrocarbures reste totale, l��conomie est encore en panne, le ch�mage est devenu end�mique chez les jeunes, la corruption touche nos institutions les plus prestigieuses et les promesses de bonne gouvernance avec tout ce que cela sous-entend ont �t� compl�tement oubli�es . Pourquoi ce g�chis ? La raison est qu� aucun pays ne peut se d�velopper sans d�mocratie. Un pouvoir, aussi �clair� soit-il, ne peut fonctionner et �tre utile � son pays sans contre-pouvoir. Ce contre-pouvoir qui va titiller, contr�ler, alerter, discuter des programmes qui engagent le pays est repr�sent� par les partis de l�opposition, les �lus du peuple, la soci�t� civile, les syndicats, la presse libre, etc. Ce contre-pouvoir est une manne plus importante pour le d�veloppement d�un pays que les centaines de milliards de dollars investis dans des plans quinquennaux sans lendemain. Pour l�anecdote, lors des derni�res �lections dans un grand pays d�mocratique outre M�diterran�e, le parti au pouvoir avait lamin� le principal parti de l�opposition. A la question pos�e au leader de ce parti par les journalistes de savoir ce qu�il pensait de cette victoire �crasante, il eut la r�ponse suivante : pour le parti que je repr�sente, c�est une tr�s bonne chose, mais pour mon pays, c�est une situation tr�s dangereuse car la d�mocratie ne peut fonctionner sans une opposition forte. Je suis tr�s jaloux aussi quand je vois M. Erdogan, Premier ministre turc, monter � la tribune du Parlement de son pays et r�clamer plus de moyens pour l�opposition qui, � l�occasion, ne se privera pas de lui mener la vie dure !!! Nos dirigeants n�ont jamais compris ou accept� cela. Les Alg�riens veulent le droit et la libert� de cr�er des syndicats, des associations, des partis politiques, ils revendiquent aussi le droit de se r�unir et de manifester de mani�re pacifique. Les Alg�riens veulent l�alternance au pouvoir de mani�re pacifique pour que ceux qui �chouent partent en laissant la place � d�autres dans le respect des r�gles du jeu d�mocratique. Aucune manifestation ou r�union publique n�est autoris�e en dehors de celles de la famille r�volutionnaire, de l�UGTA ou des associations satellites du pouvoir. Que M. Louh, ministre du Travail et des Affaires sociales, qui est un ancien syndicaliste nous dise combien des syndicats ou associations ont pu obtenir leurs agr�ments depuis qu�il est � la t�te de ce d�partement. Les Alg�riens veulent une t�l�vision qui les repr�sente et non pas une institution qui consacre une page sp�ciale au Soudan avec des douktours import�s en occultant compl�tement les barricades et les fum�es des bombes lacrymog�nes qui pleuvaient sur la place du 1er-Mai et que le directeur g�n�ral de cette institution ne pouvait pas ne pas voir � travers la grande baie vitr�e de son grand bureau. Que reste-t-il aux Alg�riens pour s�exprimer de mani�re pacifique et participer � la vie de la cite � part le langage des pneus br�l�s et des �meutes violentes ? Et m�me si on ne peut que condamner les destructions et les actes de pillage, nous ne pouvons occulter que c�est la cons�quence logique de ce verrouillage syst�matique de la vie publique et politique. Les droits humains ne se r�sument plus aux droits � la sant� et au travail, les libert�s fondamentales en sont partie int�grante. Nous devons imp�rativement tirer des le�ons de ce qui se passe dans notre pays. L�ouverture du champ politico- m�diatique, le respect du droit syndical et associatif, une presse libre, une opposition forte et jouant pleinement son r�le sont les seuls garants pour qu�� l�avenir, les frustrations et les col�res puissent �tre canalis�es et exprim�es de mani�re pacifique et constructives pour notre pays. Voil� ce que veulent et revendiquent les Alg�riens. Malheureusement, nous avons l�impression que l�autisme de nos dirigeants a encore de beaux jours devant lui. A grands renforts d�experts et de syndicats maison, on veut r�duire cette �ni�me crise � un malentendu d� � la hausse des prix de quelques denr�es alimentaires de base ; funeste erreur. C�est faire insulte � l�intelligence du peuple alg�rien que de penser que ses enfants qui plus est seraient de petits voyous sont morts pour faire baisser le prix de l�huile et du sucre !!! Le propre de l�homme est d�oublier l�orage quand il fait beau, disait Machiavel, nos dirigeants auront-ils le courage et la sagesse de contredire cet adage en profitant de cette accalmie pour se remettre en question et redonner � notre grand pays la place qu�il m�rite dans le concert des nations ? Le peuple alg�rien a subi le socialisme, le lib�ralisme, le dirigisme, le populisme, l�islamisme avec les r�sultats que l�on conna�t. Et si on essayait tout simplement sur lui la d�mocratie ? Pr N. Djidjeli Syndicat national des enseignants chercheurs hospitalo-universitaires