Le doyen des avocats d�Oran, le b�tonnier Abdelkader El Hassar, est mort mercredi 22 f�vrier 2012 � l��ge de 95 ans dans sa villa � Sainte Clotide, pr�s d�Oran. Il est n� � Tlemcen le 15 mai 1917 dans une ancienne famille de la petite bourgeoisie tlemc�nienne. Son pr�nom �tait Abdelkader mais tout le monde l�appelait Djillali et lui-m�me incitait � l�usage. Abdelkader Djillali, illustres pr�noms qui rappellent ceux du prestigieux saint patron de Baghdad. Son p�re Abdallah �tait brodeur d�or et d�argent. Son fr�re Mustapha a longtemps exerc� les fonctions de procureur de la R�publique pr�s le tribunal d�Alger puis celles d�avocat g�n�ral au tribunal supr�me. Son jeune fr�re Sa�d est professeur de m�decine. Le plus jeune de ses fr�res Sa�d est avocat. Il eut aussi pour lign�e son cousin Abdelhamid El Hassar, le premier pr�fet de Mostaganem � l�ind�pendance du pays. Le b�tonnier El Hassar appartient � une tr�s vieille famille qui donna � Tlemcen et � F�s au cours des si�cles beaucoup de jurisconsultes et de math�maticiens de renom. Un Abubakar El Hassar florissait au moyen-�ge. Son trait� de calcul �tait enseign� au Maghreb et en Europe. Apr�s avoir obtenu son baccalaur�at � Tlemcen, Abdelkader El Hassar entreprit des �tudes philosophiques � l�Universit� d�Alger. Le jeune philosophe se mit � fr�quenter le club des amis de l�URSS qui comptait beaucoup de militants politiques anticolonialistes dont Henri Alleg, l�auteur de la Question. Peu de temps apr�s, il quitta Alger et se rendit � Poitiers en compagnie de Mohamed Nekkache, l�ancien ministre de la Sant� sous le gouvernement Ahmed Ben Bella. Sans d�lai, il s�inscrira � la Facult� de droit de Poitiers. Il y a des liens �troits entre la philosophie et le droit. Le fond de leur objet d��tude est commun : la vie tout court. Aussi le jeune El Hassar manifeste-t-il le m�me engouement pour les �tudes de droit qu�il eut pour la philosophie. Ses �tudes de droit achev�es, il retourna � Tlemcen o� il entra, en 1949, au cabinet de l�avocat ma�tre Taleb Abdelhak, fils de l�avou� ma�tre Taleb Abdesslam. Dou� d�une intelligence brillante et pourvu d�une solide formation juridique, il s�av�ra un pr�cieux collaborateur de ma�tre Taleb Abdelhak. A cette �poque, le barreau de Tlemcen comptait dix avocats dont trois Alg�riens. Le prestige du b�tonnier Boukli Hac�ne Omar, inscrit au barreau le 22 d�cembre 1921, s�imposait alors � ses confr�res fran�ais. En 1961, ma�tre Abdelkader El Hassar fut �lu b�tonnier de Tlemcen. A la fin des ann�es 1930, le communisme faisait �poque en France et au Maghreb. Beaucoup d�intellectuels alg�riens avaient adopt� avec enthousiasme les id�es communistes, pour le bien du peuple alg�rien C�est � l�instigation de son ami El Yebdri Ahmed, ancien inspecteur du travail � Tlemcen, d�c�d� le 18 novembre 2007, que ma�tre Abdelkader El Hassar adh�ra au parti communiste dont le secr�tariat g�n�ral de la section de Tlemcen �tait assur� par un bijoutier juif du nom de Lachkar. Cependant, c�est un fait certain que les �crits de Trotski, Sedov, Victor Sage et principalement la publication du livre Retour de l�URSS d�Andr� Gide dessill�rent les yeux de nombreux communistes alg�riens. Aussi, comme beaucoup de ses camarades, Abdelkader El Hassar cherchait-il a y voir clair, � regarder sans �ill�res ce qui se passait en URSS. Le hasard des �v�nements voulait qu�il ne f�t pas constamment en accord avec certaines positions du Parti communiste et en l�occurrence, il n�eut pas froid aux yeux pour condamner l�intervention sovi�tique � Budapest en 1956. D�autre part, c�est au parti de Ferhat Abbas qu�il �uvra longtemps aux c�t�s de ses amis le docteur Sa�dane, le professeur Abdelkader Mahdad et d�autres intellectuels de son �poque En 1955, ma�tre Abdelkader El Hassar fut � appeler � professer la philosophie au coll�ge de Slane. Sa rigueur de pens�e jointe � sa passion pour l�enseignement firent qu�il compta parmi les meilleurs professeurs du coll�ge de Slane. A l�ind�pendance du pays, il fut nomm� membre de l�ex�cutif provisoire de Rocher-Noir dont le pr�sident �tait le notaire ma�tre Abderrahmane Far�s. C�est � la cause de la justice qu�il ne tarda pas � consacrer encore une fois ses talents de juriste. Le Journal officiel du 28 f�vrier 1964 publia un d�cret le nommant avocat g�n�ral pr�s la cour d�appel d�Oran et avocat g�n�ral � la Cour supr�me. Le m�me d�cret nomma ma�tre Mahieddine Chergui premier pr�sident de la cour d�appel d�Oran, en remplacement de ma�tre Benabed, mut� � Constantine. Le 2 mars 1964, le pr�sident de la R�publique M. Ahmed Ben Bella, accompagn� du ministre de la Justice M. Hadj Sma�ne, installa la Cour supr�me. Le temps de ses fonctions de chef du parquet g�n�ral � la cour d�Oran fut court mais fort bien rempli. Il faut rappeler qu�avant la r�forme judiciaire de 1966, la comp�tence territoriale de la cour d�appel d�Oran s��tendait sur l�ensemble de l�ouest du pays. Comme beaucoup de ses coll�gues, ma�tre Abdelkader El Hassar ne tarda pas � reprendre sa robe d�avocat. Le barreau d�Oran comptait alors une trentaine d�avocats dont six Fran�ais qui ne tard�rent pas � regagner leur pays. En 1971, ma�tre Abdelkader El Hassar fut �lu b�tonnier d�Oran. Que de souvenirs pr�cieux je pourrais �voquer ici de cette belle �poque des ann�es 1970 o� ma�tre Abdelkader El Hassar �tait dans tout l��clat de sa renomm�e. Je le vois encore le visage et les mains parsem�s d��ph�lides, l��il p�tillant, bombant la poitrine, haussant la voix et donnant libre cours � ses dons d�orateur. La salle du tribunal criminel r�sonnait alors de l�intonation de sa parole. Ma�tre Abdelkader El Hassar �tait un ami et un coll�gue de mon d�funt p�re. Personnellement, j�ai eu avec lui au cours des dix derni�res ann�es des relations d�affection. Il m�a fait l�honneur et l�amiti� de pr�facer mon deuxi�me ouvrage Tlemcen des saints et des savants. Toute la vie du b�tonnier ma�tre Abdelkader El Hassar fut guid�e par les valeurs de dignit�, de probit�, d��galit� et de justice. Sa mort me touche personnellement comme le d�c�s d�un parent proche. Son nom restera incontestablement � jamais fix� dans la galerie des grandes figures du barreau alg�rien. Me Rachid Benblal, avocat et historien