La déclaration de guerre, exprimée jeudi par le secrétaire général du parti marocain Istiqlal, Hamid Chabat, pour gravissime qu'elle est, a soulevé la réaction prompte d'Alger. Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Amar Belani, a condamné, jeudi, avec force la déclaration qu'il a qualifiée de «dangereuse et irresponsable» ça ne pouvait attendre et ça n'a pas attendu. Alger a réagi, de suite, à la déclaration du premier responsable du parti Istiqlal qui, s'exprimant sur le site marocain Lakom, a appelé à récupérer les territoires algériens de Tindouf et de Béchar. Le chef d'Istiqlal a dégainé une vieille rengaine marocaine pour réclamer ces deux parties du territoire algérien. Les Algériens ont en mémoire la tentative marocaine d'annexer Tindouf, alors que l'Algérie sortait à peine d'une longue et éprouvante guerre anticoloniale. A cette dérive langagière qui pourrait trahir des velléités belliqueuses inavouées du royaume marocain, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères oppose une réaction ferme. «La souveraineté, l'intégrité territoriale et l'intangibilité des frontières de l'Algérie ne sauraient, en aucune manière et sous aucun prétexte, faire l'objet de manœuvres partisanes ou politiciennes irréfléchies qui minent le bon voisinage», a réagi en effet M. Belani, dans une déclaration. Belani ne se résume pas cependant à cette dénonciation. Il somme le secrétaire général d'Istiqlal à se taire et à prendre garde contre toute éventuelle récidive. «Ce responsable, qui a déjà tenu des propos similaires dans un passé récent, serait bien avisé de ne pas persévérer dans la provocation et l'aventurisme, qui consistent à contester la convention relative au tracé de la frontière d'Etat établie entre la République algérienne démocratique et populaire et le Royaume du Maroc, signée le 15 juin 1972, qui comporte des cartes annexées à la convention et qui a fait l'objet d'enregistrement auprès du secrétariat général des Nations unies.» Mais s'agit-il, de la part du chef d'Istiqlal, au demeurant un habitué de ce genre de sorties, d'une simple provocation ? Il y a matière à se poser la question, puisque sa déclaration intervient au moment où le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, est hospitalisé en France, suite à un accident cérébral, présenté comme minime par ses médecins. Le choix fait de formuler la déclaration en ce moment ne semble pas fortuit, mais surtout pourrait ne pas procéder du simple dérapage. Le royaume marocain, qui a dû tressaillir profondément lorsque les Américains se sont rendus à l'idée d'étendre la prérogative de la Minurso à l'observation des droits de l'homme au Sahara occidental. Même si, au final, les Américains se sont abstenus de marquer jusqu'au bout leur proposition, dissuadés certainement par la France, les Marocains ont tout de même passé une mauvaise semaine. Des plus mauvaises, puisque non seulement ils ont senti l'échec de leur diplomatie mais encore ne peuvent plus s'innocenter, aux yeux du monde, des atteintes répétées aux droits de l'homme dans les territoires sahraouis occupés. Le rapport d'Etat américain sur les droits de l'homme dans le monde pour l'année 2013 épingle le royaume. Une diversion pour faire oublier son camouflet diplomatique sur la question du Polisario ?