Champion d'Allemagne et d'Europe, peut-être bientôt auteur d'un rarissime triplé s'il remporte samedi prochain sa coupe nationale, le Bayern Munich est au sommet mais s'apprête pourtant à changer d'ère avec l'arrivée dans un mois de Pep Guardiola qui, sans avoir le droit de faire beaucoup moins bien, aura du mal à faire mieux. Il y a des fins de cycle moins heureuses. Samedi à Wembley, Jupp Heynckes, 68 ans et qui sera peut-être à la retraite dans une semaine, a levé sa deuxième Ligue des champions, la cinquième pour le club bavarois à l'issue d'une enthousiasmante finale. A la reprise le 26 juin, Heynckes aura laissé les clés, et c'est Guardiola qui prendra les commandes du rutilant bolide allemand. Il y a un an, le technicien catalan quittait Barcelone, la meilleure équipe d'Europe, pour prendre une année sabbatique. Douze mois plus tard, il va retrouver la meilleure équipe d'Europe, mais à Munich. A New- York où il vit, Guardiola a sans doute regardé la finale et il aura, en effet, constaté qu'il n'y a pas grand-chose à changer dans ce Bayern qui a laissé Dortmund à 25 points en championnat et proprement démoli des équipes aussi fortes que la Juventus ou Barcelone en C1. Dès le mois de mars, Franz Beckenbauer, président d'honneur du Bayern, reconnaissait d'ailleurs que la tâche de «Pep» ne serait paradoxalement pas simple. «C'est sûr, il y a toujours quelque chose à améliorer, par exemple dans la disposition sur le terrain. Mais il est difficile d'en rajouter encore une louche. Et si Guardiola est champion avec seulement 15 points d'avance, tout le monde sera certainement déçu», avait estimé le Kaiser. Il y a, bien sûr, une grande curiosité qui entoure l'arrivée de Guardiola en Bavière. Quels seront les idées et les projets de l'architecte du grand Barça pour une équipe au collectif déjà aussi abouti ? Difficile à dire car depuis l'annonce à la mi-janvier de son arrivée, «Pep» est resté très discret. Inventer une coupe Il aura en tout cas à sa disposition un effectif très complet avec une ossature de premier plan: Neuer, Dante, Schweinsteiger, Martinez, Ribéry, Müller... Transféré de Dortmund, Götze va apporter encore un peu plus de potentiel offensif à une équipe qui pourrait être encore renforcée par l'arrivée de Lewandowski, lui aussi finaliste malheureux avec le Borussia samedi. La défense centrale apparaît comme l'un des rares et relatifs points faibles du Bayern et Guardiola pourrait chercher un renfort dans ce secteur. Même dans le jeu, Heynckes laisse à son successeur un produit fini, le Bayern ayant impressionné toute la saison par sa science du pressing, sa puissance, la variété de son jeu au milieu du terrain et l'efficacité d'un football direct, rapide et superbement équilibré. La mise en place d'un style «barcelonais» tourné à l'extrême vers la possession de balle semble très improbable, mais la vraie question est de savoir quelle sera la marge de manœuvre de Guardiola dans le temps. A priori, lui et les dirigeants du Bayern se sont engagés pour un projet de long terme. Mais c'était aussi le cas en 2008, quand ils avaient engagé (déjà en janvier) Jürgen Klinsmann. En avril suivant, l'ancien attaquant de la Mannschaft était licencié pour absence de résultats. En attendant, les joueurs eux-mêmes s'interrogent sur les horizons qui s'ouvrent à eux. «Avec Guardiola ? Je ne sais pas ce qu'on va faire de plus. On va peut-être inventer une coupe», plaisantait ainsi Ribéry samedi en zone mixte. Avant d'en inventer une, le Bayern en disputera une première au mois d'août, la Super-coupe d'Europe. Ce sera contre Chelsea, probablement entraîné par une vieille connaissance de Guardiola José Mourinho.