Chaque journée de championnat apporte son lot d'erreurs d'arbitrage. «C'est l'arbitre qui nous a fait perdre» ou encore «l'office de l'arbitre a été vicieux» sont des propos fréquemment tenus par les joueurs, entraîneurs ou bien présidents de club à la fin de chaque rencontre. La dernière déclaration fracassante en la matière émane du boss de la formation kabyle Mohand-Chérif Hannachi. Ce dernier, outré par la prestation de Farouk Houasnia lors du classique JSK-ESS (1-1) lancera à qui voulait l'entendre : «L'arbitrage est la honte du football algérien. Certains arbitres font comme bon leur semble sans pour autant se soucier de l'éthique encore moins du risque de se voir écarter de la mission d'arbitrer des rencontres puisque, certains sont privilégiés.» Pour disséquer le sujet, quoi de mieux que d'aller à la rencontre de Abderrahmane Bergui, ancien arbitre International et ancien président de la commission centrale d'arbitrage FAF. L'actuel président de l'association «Ouled Houma» tient à apporter sa contribution pour éclairer l'opinion sportive sur la situation très inquiétante de notre arbitrage «confronté à de réelles problèmes de favoritisme et de régionalisme», assure-t-il. Et d'asséner encore : «Les arbitres sont livrés à eux-mêmes et sont soumis à un système de gestion basé sur la loi de l'omerta en vue de bénéficier en retour des faveurs des responsables de l'arbitrage.» Bergui expliquera d'emblée, que «l'arbitrage est un élément indispensable pour le développement du football. L'arbitre joue un rôle très important pour le bon déroulement d'un match. Cela doit se dérouler dans un championnat respectueux, sérieux et crédible. Malheureusement, ce n'est pas le cas dans notre championnat où, à tous ses paliers, tout s'achète et tout se vend. On se rappelle bien des déclarations fracassantes faites la saison dernière par l'ex-président de l'USM Annaba qui a accusé ouvertement et nommément les responsables de l'arbitrage et certains arbitres, de corruption sans qu'il soit inquiété. Récemment, on a entendu parler d'un scandale au niveau de la Ligue régionale de Blida qui n'a pas encore dévoilé tous ses secrets. C'est la preuve concrète que notre football et l'arbitrage en particulier sont minés et gangrenés par la corruption. Ce n'est pas normal que tout le bureau exécutif de la Ligue régionale de Blida soit relevé par le Bureau fédéral de la FAF pour des raisons que tout un chacun connaît mais que personne n'ose énoncer. Aujourd'hui, notre football est menacé par la violence et la corruption», relève Bergui. Pour lui, la responsabilité de chasser le mal incombe à la fédération. «A mon avis, le président de la FAF Hadj Mohamed Raouraoua doit réagir et défendre l'image de marque de notre football. Certes, il s'est investi beaucoup pour l'équipe nationale pour laquelle nous souhaitons la qualification au Mondial. Par contre, au niveau national, notre championnat est discrédité car miné par les scandales. Ce qui se passe actuellement au niveau de certaines ligues et des championnats de divisions inférieures est un scandale à ciel ouvert», dénonce l'ancien arbitre. Ce dernier tient toutefois à défendre la corporation. « Nous avons d'excellents arbitres, malheureusement ils évoluent dans un environnement difficile et hostile. A mon avis, il ne faut pas trop les accabler car le mal de notre arbitrage réside ailleurs. Pour que tout le monde sache, un arbitre qui officie un match contraire à l'esprit sportif ne peut agir seul mais avec la complicité de ses responsables lui assurant impunité», révélera Bergui qui tient aussi à noter le paradoxe de nos sifflets internationaux durant les grandes compétitions. «Paradoxalement, l'arbitrage algérien au plan international est bien considéré à l'image des prestations de qualité fournies par Djamel Haïmoudi. Malheureusement, sur le plan national, cet arbitre est discrédité. Cela veut dire qu'il y a réellement problèmes», affirme-t-il. Pour Bergui «les raisons de ce malaise sont connues. A mon humble avis, l'arbitrage est géré comme un bien personnel. A aucun moment les responsables de l'arbitrage en Algérie ne se sont remis en cause pour améliorer l'arbitrage. Ce qui est bien inquiétant, c'est le cas de l'arbitre international assistant qui a été relevé de la liste internationale non pas pour insuffisance technique mais pour une grave affaire», note Bergui avant d'enchaîner : «Ces pratiques douteuses de certains arbitres connus pour leur comportement auraient pu être évitées si les responsables de l'arbitrage s'impliquaient davantage dans le travail du terrain pour veiller à la bonne marche de l'arbitrage. Malheureusement, ceux-ci gèrent les affaires de l'arbitrage à distance et avec l'esprit ailleurs. J'invite, à ce titre, le président de la DCA (Direction centrale de l'arbitrage), M. Lacarne, à faire un choix ou s'assumer pleinement sur le plan national et international. Sans remettre ses capacités en doute, je dois dire qu'il doit faire un choix pour l intérêt de notre arbitrage», estime Bergui. Pour soutenir les arbitres à accomplir leur mission avec justesse et dignité, le président de l'association Ouled El-Houma préconise leur prise en charge plutôt sur le plan psychologique «en vue de les remettre en confiance», tenait-il à conclure.