La toute dernière tension «diplomatique» entre Alger et Rabat semble plaire au palais chérifien que la sagesse et la retenue dont fait preuve l'Algérie, loin de lui servir d'exemple, irritent au point de multiplier les maladresses et de prolonger, ainsi, un feuilleton qu'il a l'air d'«apprécier». M. Kebci - Alger (Le Soir) Mais cette dernière, commise mercredi dernier, prend l'allure d'un véritable cri de détresse à tel point que d'aucuns pensent que Mohammed VI rue tout simplement dans les brancards. A l'occasion de la commémoration de la «Marche verte», entreprise en 1975 par le royaume pour «récupérer» le Sahara occidental quand le roi Mohammed VI avait cru bon de «répliquer» à des propos du président de la République. Il a, en effet, estimé que Rabat n'avait pas à recevoir «de leçons» surtout de ceux qui «bafouent systématiquement les droits de l'Homme». Et de se vouloir plus «précis», soutenant que «quiconque souhaite surenchérir sur le Maroc n'a qu'à descendre à Tindouf, et observer dans nombre de régions alentour, les atteintes portées aux droits humains les plus élémentaires». Le souverain chérifien a, par ailleurs, accusé les «adversaires» du royaume de recourir «à l'argent» et à d'autres «avantages» pour tenter «d'acheter les voix et les prises de position de certaines organisations hostiles». «Ils dilapident de la sorte les richesses et les ressources d'un peuple frère, que cette question ne concerne pas mais se dresse plutôt comme une entrave à l'intégration maghrébine», ajoutera-t-il. Des aveux qui ne disent pas leur nom quant au lâchage du palais chérifien par ses ex-amis, notamment les Etats-Unis, et dont le projet de résolution du Conseil de sécurité de l'ONU du printemps dernier visant à élargir aux droits de l'Homme le mandat de la mission de l'ONU dans la région irrite encore au plus point Rabat. «Y a-t-il une crise de confiance entre le Maroc et certains centres de décision chez ses partenaires stratégiques, concernant la question des droits de l'Homme au Sahara ?», se demandera-t-il. Même si cette brouille entre les deux pays frères est ancienne, elle a enregistré son pic avec le discours lu, fin octobre, au nom du président de la République par le ministre de la Justice et garde des Sceaux, Tayeb Belaïz, lors d'une réunion de soutien à la cause sahraouie au Nigeria. Le chef de l'Etat jugeait «plus que jamais d'actualité» la mise en place d'un mécanisme international de surveillance des droits de l'Homme au Sahara occidental. Ce qui a courroucé Rabat. Mais de quel bafouement systématique des droits de l'Homme parle Mohammed VI, lui qui vient de se faire rappeler à l'ordre par la campagne Ecrire pour lire ? En effet, le palais royal fut récemment interpellé sur la liberté de correspondance pour les prisonniers politiques sahraouis et marocains. «Au nom de la campagne www.ecrirepourlesliberer.com, j'ai l'honneur de vous interpeller sur la question du droit à la liberté de correspondance, droit internationalement reconnu pour tout prisonnier, qui, selon nos observations, n'est pas appliqué dans les prisons marocaines», a écrit Mme Claude Mangin Asfari dans sa lettre au président du Comité national des droits de l'homme marocain (CNDH), Driss El Yazami. Et d'exhorter le président du CNDH de prendre en considération les «entraves au droit de la liberté de correspondance des prisonniers» et prendre les mesures nécessaires pour que cesse ce genre d'agissements, tout en l'appelant à s'assurer que les lettres des prisonniers leur soient remises. Une question des droits de l'Homme dont la revendication algérienne partagée par nombre de pays, notamment les Etats-Unis, de son inclusion dans le mandat de la Minurso dans les territoires sahraouis occupés, irrite plus que tout le souverain marocain. Ce dernier est loin de ne pas savoir qu'à ce rythme, elle finira par revenir inévitablement devant le Conseil de sécurité de l'instance onusienne. Et une telle perspective, celle de l'observation des droits de l'Homme par un mécanisme onusien permanent et impartial aura raison de la prétendue souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. Mohammed VI ne l'ignore point, bien au contraire, d'où sa «furie» contre l'Algérie.