La question Arme conventionnelle versus non conventionnelle. Il nous faut examiner cette opposition qui prétend séparer deux natures du pouvoir destructeur (la littérature militaire écrit : pouvoir vulnérant) d'un certain armement en usage. Cette nature non conventionnelle, traditionnellement, se confond avec la notion «d'arme de destruction massive» mise en circulation dès le début des années quarante par l'ingénieur américain Vannevar Bush, un des architectes du Manhattan Project, et très écouté conseiller des présidents Roosevelt et Truman. Si cette destruction massive, à l'origine, n'a pu concerner que la célèbre triade «nucléaire-chimique-bactériologique», sa portée depuis s'est élargie aux armes sismiques, aux munitions thermobariques et aux armes climatiques ; un objectif comme le Programme Haarp y est inclus(1). Mais la destruction massive peut être le fait d'un armement classique. Les bombardements alliés durant la Seconde Guerre mondiale des deux villes allemandes de Hambourg (Opération Gomorrah) et de Dresde, ont causé presque autant de morts, de disparus et de blessés, que les deux explosions nucléaires sur les villes de Hiroshima et Nagasaki. L'éthique des traités internationaux de l'époque n'avait édicté aucune interdiction des bombardements stratégiques contre les cités et les civils. Mais les événements qui nous occupent, nous imposent de ne considérer que les bombes israéliennes qui tombent sur Gaza. Les bombes, c'est-à-dire tous les engins explosifs largués, projetés ou déposés. La panoplie de l'horreur est depuis quatre semaines entamées, toute déployée et culmine à plus de mille quatre cents morts. Des munitions interdites par la Convention de Genève étendue au Protocole III, signé le 10 octobre 1980 et entré en vigueur le 2 décembre 1983, ont pourtant été utilisées : des bombes thermobariques, des bombes au phosphore blanc, des obus à fléchettes, et la terrible bombe Dime. Il s'agit d'engagements délibérés contre des objectifs sans aucune valeur militaire, avec une présence de très nombreux civils attestée, soit par acquisition visuelle soit par renseignement. Les munitions utilisées lors des bombardements de Ghaza Les trois premières munitions ont déjà été utilisées-expérimentées, en Irak, en Afghanistan, lors de la campagne du Sud-Liban à l'été 2006, et lors de l'opération «Plomb durci» à Ghaza. Déjà. Une bombe thermobarique utilise le principe de deux charges explosives alternées et aux effets opposés : la première charge conventionnelle explose et amorce une deuxième charge qui disperse un liquide hautement volatil souvent à base de fioul, d'où l'appellation Fuel Air Explosiv, dans la terminologie de l'Otan) le souffle est tel que tout l'oxygène (l'oxygène est utilisé comme comburant dans la réaction explosive) de l'enceinte traitée est immédiatement aspiré après combustion, provoquant une rapide et importante dépression. Des traumas particuliers, toujours mortels, notamment pulmonaires et dans l'oreille interne, après les deux phases de surpression et de dépression, sont la signature des munitions thermobariques. Ces bombes sont montées autour de détonateurs FMU (Fuse Munition Unit) fabriqués par la firme américaine Raytheon. Les munitions incendiaires au phosphore blanc, délivrent à l'explosion, ajouté à l'effet de souffle, un nuage aérosol de phosphore enflammé qui se répand dans un rayon de 150 mètres et brûle tous les tissus et attaque même les os. En février 1945, la Royal Air Force a massivement bombardé la ville de Dresde avec «Willie Pete», qui a été abondamment utilisé à Falloudja, la Guernica irakienne, lors de l'attaque US du 8 mars 2004. La bombe CBU(2) -107 Passive Attack Weapon est une munition aérotransportée, parachutée et guidée non explosive. L'explosif contenu dans la bombe ne sert qu'à la projection et la dispersion dirigées de fléchettes en alliage d'acier et de tungstène de différentes tailles. Elle peut en contenir de 3 700 à 4 000 de 3,7 cm de longueur courante. Elles s'éparpillent dans un volume conique de 300 m de long et environ 90 m de large. Cet usage a été documenté par l'ONG israélienne B'Tselem qui se définit comme le centre israélien d'information pour les droits de l'homme dans les territoires occupés. La Paveway(3) a des caractéristiques balistiques identiques aux munitions à fragmentation CBU-103 ou CBU-105. Tout aéronef de guerre qualifié pour ces armes embarquer une CBU-107. L'US Air Force en mai 2003, recommande cependant, trois aéronefs : le B-52 Stratofortress, le F-15 Eagle et le F-16 Falcon. Utilisée pour la première fois lors de l'attaque du ministère irakien de l'Information, le 28 mars 2003, un total de 58 CBU-107 a été construit à ce jour. Mais cette munition se décline également sous forme d'obus, d'usage plus aisé et plus fréquent. Comme c'est le cas à Ghaza. En mai 2012, l'administration Obama a refusé un financement pour la poursuite du programme CBU-107. La munition Dime déjà utilisée par l'armée israélienne au Sud-Liban et à Ghaza durant l'été 2006 durant l'opération «Pluie d'été», puis en 2009 durant l'opération «Plomb durci», et maintenant «Bordure protectrice». Il faut convenir du ridicule de ces dénominations. Aujourd'hui à Ghaza, l'expérimentation porte sur des améliorations de Dime et sur une miniaturisation des obus à fléchettes. L'armée israélienne utilise une version améliorée de la munition Dime (Dense Inert Metal Explosive) tirée par des drones (Mazlat ou Heron) et qui a servi au Liban-Sud en 2006 et à Ghaza pendant l'offensive menée fin 2008, début 2009. Après les engagements américains dans les cités afghanes et irakiennes, les états-majors de la marine et de l'aviation réclamèrent un armement en bombes conforme à la «lutte antiterroriste dans les villes», que pudiquement on appelle guerre asymétrique. La firme Boeing (avec la collaboration de Israël Aerospace Industries) a remporté en 2003 l'appel d'offres pour le projet Small Diameter Bomb, munitions d'environ 100 kg et d'une longueur inférieure à 150 centimètres. D'importants crédits sont accordés par le département US de la Défense. Les premières bombes ont été disponibles pour l'expérimentation dès mai 2006, et dans les arsenaux de l'US Air Force en mars 2008. En septembre 2008, le Congrès autorise la vente à Israël sur une durée de 3 ans, d'un total de 1 000 bombes GBU (4) -39 Small-Diameter Bomb. La transaction inclut la formation des pilotes israéliens, la fourniture des simulateurs d'entraînement et la globalité de la maintenance. Le Jerusalem Post indique qu'une première livraison de bombes a été effectuée mi-décembre 2008, prête à la reprise des bombardements israéliens, le 19 décembre, après que le Hamas eut renoncé à la trêve en raison de la poursuite du blocus de Ghaza. La Dime, c'est le concept de létalité concentrée (Focused Lethality Munition) ; elle est bâtie autour d'une charge interne, mélange d'explosif brisant et d‘alliage de cobalt, de nickel, avec une prévalence de tungstène, insérée dans une enveloppe en fibres de carbone. Elle utilise la cellule de la bombe GBU-39. Elle libère, à l'explosion un nuage de poudre incandescente, dans un rayon d'environ 4 mètres. Outre la charge explosive, l'enveloppe en fibre de carbone se pulvérise en micro-particules, provenant de l'alliage. Le tungstène en fusion forme une nuée en expansion très rapide de micro-shrapnel, très destructrice. L'erreur circulaire probable, de GBU-39 est, selon le constructeur, de trois mètres. Mais au regard des destructions constatées, l'option avec un positionnement GPS (corrigé en temps réel par un équipement de plusieurs stations de mesure déployées au sol) n'a pas été retenue. Le chirurgien norvégien, professeur à Oslo, Erik Fosse, qui opère avec l'équipe de chirurgiens de l'hôpital Al-Chifa de Gaza City, (il y était déjà venu lors de l'offensive «Plomb durci» en 2008/2009) estime avec ses confrères palestiniens disposer de suffisamment de matière pour documenter une enquête internationale pour crimes de guerre. Les bombes de ce type occasionnent des dommages irréversibles sur la matière vivante et les tissus mous, derme, muscles et os, dans un rayon inférieur à 10 mètres, mais la contamination de l'organisme par ces métaux lourds favorise l'apparition de cancer chez les survivants. Le New Scientist de février 2005, rapporte que des tests réalisés dans un laboratoire militaire dans le Maryland ont établi une mortalité de 100% pour des cobayes exposés à des fragments de tungstène : ils développent tous dans une durée qui ne dépasse cinq mois la même forme de cancer, le sarcome Rhabdomyo. Nouvelles libertés pour les concepteurs d'armes Mais il est une situation inédite : une arme originellement, nativement non conventionelle, et reconnue comme telle, l'arme nucléaire, entame un chemin inverse pour confectionner, disposer et délivrer des munitions nucléaire redevenues conventionnelles. L'engagement pris par le président Jimmy Carter en 1978, de ne jamais utiliser d'armes nucléaires contre des pays agresseurs qui n'en possédaient pas, a été bien respecté par ses successeurs. La disparition de l'URSS en 1991, laisse les Etats-Unis sans ennemi structurant, et il ne reste plus qu'une«enfilade d'Etats voyous, grands pourvoyeurs d'armes de destructions massives». En 1995, l'US Strategic Command (Stratcom) édite un document destiné au peuple des think tanks, et qui est vite lu par Hans Christensen du Nautilus Institut de Berkeley. Sous la protection du Freedom Information Act, il en révèle le contenu : un engagement nucléaire américain peut désormais concerner n'importe quel agresseur et «il n'est pas souhaitable d'adopter le point de vue officiel du refus de la première frappe, il ne sert qu'à limiter considérablement les actions de la dissuasion nucléaire des Etats-Unis, sans contrepartie équitable... Et c'est trop s'affaiblir que de se présenter continuellement rationnel, et de jugement froid. Laisser croire que certains de nos éléments sont potentiellement incontrôlables, peut nous être bénéfique, en renforçant les peurs et les doutes chez des décideurs ennemis».(5) Deux ans après, la mininuke B61-11 développée par le Los Alamos Scientific Laboratory entrait officiellement en service comme munition dans les arsenaux américains, pour être délivrée par le bombardier furtif B-2 habilité à des missions nucléaires la même année. Les mininukes (ou low–yield bombs) sont des munitions nucléaires à base de plutonium, et de faible puissance. Elles sont affectées à l'Armée de l'Air, car depuis la Nuclear Posture Review de 1994, les bâtiments de surface de la Navy n'ont plus de capacité nucléaire. La terminologie du Pentagone en distingue plusieurs types : de «faible énergie», entre 1 et 10 kilotonnes, et de «très faible énergie», moins d'une kilotonne. En comparaison, l'autre bombe anti-bunker, GBU-28 avec 306 kg d'explosif tritonal délivre une explosion de l'ordre de 385 kg de TNT, soit près de mille fois moins que la B61-11, qui en très basse énergie est de l'ordre de 300 tonnes de TNT. Les pays «rogues» et ennemis des Etats-Unis ont aujourd'hui accès aux techniques et aux instruments modernes de forage profond (pour certains, à partir d'une expérience de producteurs de pétrole), qui leur permettent un enfouissement profond d'objectifs militaires (centres de commandement et de contrôle, usines de production d'armes, silos balistiques) pouvant être soustraits à une action dissuasive ou préemptive. Leur destruction ne serait possible qu'après une explosion nucléaire de forte puissance, mais avec d'inévitables et de considérables retombées. Ce type d'actions, jamais encore tentée, ne va pas sans réduire la crédibilité de l'ensemble de la dissuasion de l'attaquant. Besoin militaire émergent, la forte pénétration en milieu hautement durci, assurée par une mininuke, aura l'avantage de contenir l'explosion dans l'enceinte à détruire (de faible ampleur), et donc de réduire le volume des ses retombées. Mais cette ambition est à ce jour irréalisable(6), en partie à cause du faible pouvoir de pénétration de la munition B61-Mod11. Pour pallier ce handicap, l'Administration Bush lance en juin 2002 une large étude pour la construction de munitions sous le concept «Robust Nuclear Earth Penetrator» (RNEP). Le programme est amorcé par l'usage du cœur non modifié de la bombe stratégique B83. La publication de la Nuclear Posture Review élaborée et énoncée en 2002, appelle à «revitaliser le complexe de fabrication des armes nucléaires pour concevoir, développer, construire et certifier de nouvelles munitions nucléaires, destinées à des engagements opérationnels sur cibles mobiles, ou contre des bunkers profondément enterrés». En décembre 2002, le président G. W. Bush, précisait lors de son discours sur la stratégie nationale que «les agences civiles et militaires de notre pays doivent être en possession d'une gamme complète de possibilités opérationnelles pour contrer toute menace d'armes de destruction massive». Des solutions de type Theater Nuclear Planning qui préparent à l'utilisation non stratégique d'armes nucléaires sont en cours de définition au quartier général du Stratcom à Omaha. En novembre 2003, le Congrès cède et lève l'amendement Spratt-Furse (en vigueur depuis 1993), qui interdisait toute recherche sur des armes nucléaires de puissance inférieure ou égale à 5 kilotonnes.Pour l'année 2004, le Congrès libelle une enveloppe de 6,3 milliards de dollars pour l'ensemble des activités de recherche dans le domaine des armes nucléaires, et 7,5 millions de dollars sont alloués au seul programme Rnep. Dans cette enveloppe un chapitre est consacré au site d'essais nucléaires du Nevada, le montant ne sera pas utilisé pour sa décontamination, mais à la remise en fonction des installations et équipements afin de permettre de nouveaux essais nucléaires souterrains, il devient indispensable de passer par un tir réel, pour obtenir les certifications (7). Les Etats-Unis vont ainsi rompre leur adhésion au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE)(8). Cette reprise est également une violation majeure du TNP, en son article VI : les puissances nucléaires doivent s'engager à négocier la fin de la course aux armes nucléaires. Le 6 septembre 2005, le général Richard B. Meyers, chef d'état-major conjoint de l'armée des Etats-Unis, remettait au secrétaire à la Défense D. Rumsfeld, le rapport Doctrine for joint nuclear operation. Ce document émane d'une demande de la Maison- Blanche, concernant une réévaluation de la Nuclear posture de 2001. Le projet soumis à l'approbation présidentielle détaille quatre cas de réponse préventive : lorsqu'un ennemi à l'intention d'utiliser (contre les Etats-Unis) des armes de destruction massive, en cas d'attaque imminente avec des armes biologiques que seule une arme nucléaire peut préventivement détruire, des dispositifs militaires ennemis profondément enterrés et hors d'atteinte conventionnelle. Il était important de démonter la capacité des Etats-Unis à un usage effectif du feu nucléaire, pour une plus haute dissuasion. Le principe de la dissuasion est considéré comme irrelevant, il doit donc être abandonné pour une stratégie d'emploi d'armes nucléaires en première frappe, y compris pour un usage préemptif. Les puissances nucléaires en titre, mais aussi tous les autres détenteurs du feu nucléaire vont devoir abaisser le seuil de nucléarisation de leurs réponses en cas de guerre, par un emploi symétrique de mininukes. Jusqu'à présent, l'ultime décision de recours au feu nucléaire ne peut être prise qu'au plus haut sommet du pouvoir politique. Les seuils de réponse nucléaire considérablement abaissés vont exiger des prises de décision en des temps infiniment plus courts, c'est-à-dire se transformer en décisions techniques d'état-major, et il n'est pas exclu qu'elles soient même entièrement automatisées. L'usage du feu nucléaire sera alors du strict ressort de l'intelligence militaire. Certaines think tanks ont évoqué la possibilité de «premptive strikes» nucléaires, en usage tactique. A l'heure actuelle aucune doctrine militaire n'a encore su théoriser les règles d'un appui tactique nucléaire. Cette dérive, immanquablement, ferait perdre sa stabilité, et donc son sens à la dissuasion nucléaire. Cette suprême dissuasion, qui n'a de raison que dans son non-emploi, serait ainsi désanctuarisée et rendue au servum pecus militaire. La mininuke deviendra une arme nucléaire conventionnelle. Elle ne sera pas une arme de guerre mais de règlement de conflits. Le Startcom demande et obtient le remplacement du vocable «guerre» par celui de «conflit», ce qui lui permet une plus fine adhésion à la Charte des Nations unies, qui en toutes circonstances «recommande la prévention des conflits». Existe-t-il une responsabilité ? Depuis toujours, les guerres ont troublé les consciences de ceux qui ne les pratiquent pas. Des accords, des conventions, des règles édictées ont prétendu en humaniser l'exercice. Humaniser, c'est-à-dire administrer une mort connue, qui peut encore être représentée, et de peu d'étendue. L'effort est resté de faible écho, depuis les accords du Latran de 1139 qui voulurent prohiber l'usage de l'arbalète, de rendement létal jugé fort élevé. Mais qui peut alors outrepasser ces interdictions, toutes morales, sans risquer aucune sanction, jamais ? Un vainqueur tangible, resté éminemment puissant, après une victoire tangible, avec des effets durables, en des moments de grande lisibilité des événements. C'est largement le cas des Etats-Unis, puisqu' ils inspirent et orientent le droit international. Mais également, des alliés qui entrent dans la composition fine des intérêts de ce vainqueur. C'est le cas d'Israël comme «allié». Toutes les campagnes militaires de l'Etat hébreu permettent au Pentagone de vérifier les qualités «d'insertion» de l'armée israélienne : avant la première guerre du Golfe, elle était en situation d'alliance privilégiée, quoique supplétive, mais aujourd'hui, elle est finement intégrée dans le dispositif stratégique américain, y compris dans ses différents aspects opérationnels et logistiques. L'armée israélienne fonctionne comme la pointe avancée de l'alerte préventive américaine (avec l'installation du système antimissile Arrow) contre les menaces balistiques d'«états-voyous», dans le cadre de la Cooperative Defense Initiative. Certes, toujours amarré, Israël est le plus grand et le plus sophistiqué des porte-avions américains. Cela, permet aussi au Pentagone de tester en situation «relevante» toutes les innovations et modifications apportées aux munitions utilisées lors de l'invasion de l'Irak. Un exemple «d'expérimentation» A l'été 2006, durant l'offensive au Liban contre le Hezbollah, l'utilisation de la bombe «bunker buster» à forte pénétration, GBU-28 de Lockheed Martin à pointage par laser et pesant 2,3 tonnes. Délivrée par des chasseurs-bombardiers F-15, elle peut perforer une enceinte de 7 mètres de béton armé. La GBU-28 a été utilisée pour la première fois sur Bagdad lors de la deuxième guerre du Golfe. Le test porte sur des modifications introduites sur les senseurs laser et sur la centrale inertielle. Le deuxième test concerne des missiles dotés d'organe «Joint Direct Attack Munitions» pour un guidage GPS couplé à une centrale inertielle tout temps (GPS/INS) réalisé et conçu par la très vertueuse firme Boeing. Ces «expérimentations» relèvent toutes du Training and Doctrine Command (Tradoc), programme élaboré à la fin des années soixante dix par les généraux Creighton Abrams et Bill De Puy, et qui va concevoir les armes de la première guerre du Golfe (le char de combat Abrams, le véhicule de combat d'infanterie Bradley, l'hélicoptère d'attaque Apache, le missile antimissile Patriot, Le système lance-roquettes multiple MLRS). Les concepts Tradoc sont vérifiés au National Training Center à Fort Irwin, dans le désert Mojave, mais aussi au Joint Readiness Training Center à Fort Polk en Louisiane et qui forme aux opérations de basse intensité : lutte antiterroriste, contre-guérilla, et combat urbain, avec un sous-programme de confection israélienne, le Military Operations on Urbanized Terrain. Tout ce qui franchit un seuil connu est réputé non conventionnel. Truisme que cela. Une arme non conventionnelle est l'avenir souhaité d'une arme conventionnelle. C'est un interdit dépénalisé qui assèche les polémiques, et rend la paix aux praticiens. Le vrai danger non-conventionnel réside dans l'affranchissement des militaires des pouvoirs politiques et parlementaires, mais aussi de leur plus grande obéissance aux logiques et déterminismes des panoplies(9). Une arme confectionnée doit être expérimentée au plus proche de ses possibilités, c'est-à-dire dans une situation de guerre réelle. Elle commande des améliorations, des itérations, des suites, mais également une continuelle réorganisation du contexte logistique et technologique : un dialogue avec d'autres armes, une intégration plus poussée dans les schémas d'engagements, des chaînes de commandement raccourcies et plus efficaces, des mentalités retravaillées....La panoplie exige de se déployer sans contrôles. Irriguée par la finance et le renseignement, elle devient «complexe militaro-industriel». Un mot ancien venu de la théologie latine, l'acédie, peut encore en rendre compte. S. S. K. * Mathématicien, maître de conférences, Université III, Constantine 1. Le programme HAARP (High-Frequency Active Aural Research Program) est conduit conjointement par l'Us Air Force et l'US Navy en collaboration avec l'université de l'Alaska, qui a débuté en 1993 par la construction d'une station de recherche concernant les propriétés de l'ionosphère basée sur un site du Département américain de la Défense (DoD) à Gakoma. Il vise à développer une nouvelle génération d'armement dans le cadre de l'Initiative de défense stratégique (IDS) Il est question de construire un système de puissantes antennes capable de provoquer «des modifications locales contrôlées de l'ionosphère». L'élément central de HAARP est un émetteur HF qui génère un signal de grande puissance dirigé vers une région de l'ionosphère afin d'en élever la température localement, d'étudier les processus physiques complexes qui s'y produisent, d'observer les conséquences de cette perturbation, et de tenter de reproduire certains phénomènes artificiellement. En fonction d'intérêts économiques et stratégiques américains, il pourrait permettre de modifier de manière sélective le climat de diverses parties du monde et avoir pour effet de déstabiliser des systèmes agricoles et écologiques. Il convient aussi de mentionner que le ministère de la Défense des Etats-Unis a consacré d'importantes ressources à la mise au point de systèmes de reconnaissance et de surveillance des changements climatiques. La NASA et la NIMA (National Imagery and Mapping Agency) sont associées au programme HAARP. Le DoD qui doit remettre un rapport final d'étude au NEPA (National Environmental Policy Act) définit HAARP comme un «effort scientifique destiné à étudier les propriétés de base et le comportement de l'ionosphère avec un accent particulier sur la capacité à mieux le comprendre et l'utiliser pour accroître l'efficacité des communications et des systèmes de surveillance tant à des fins civiles que militaires». 2. Cluster Bomb Unit 3. Terme générique qui désigne les bombes guidées par laser, et pratiquement toutes les munitions air-sol américaines. L'essentiel des GBU sont des paveway. La recherche débute en 1964 dans les laboratoires de Texas Instrument. Aujourd'hui, Lockheed Martin et Raytheon sont les principaux fournisseurs de l' Armée de l'Air des Etats-Unis. Raytheon se réserve le droit exclusif d'utiliser Paveway comme le nom d'une marque de fabrique. 4. Guided Bomb Unit 5. Il s'agit de Essentials of Post-Cold War Deterrence. 6. Que l'on se rappelle l'accident de l'essai nucléaire français de nom de code Béryl, le 1er mai 1962, dans le désert algérien. La bombe a été déposée dans une galerie creusée dans une montagne en forme de spirale et obstruée par du béton armé et un treillis de poutrelles métalliques. Lors de l'explosion l'obturation cède et provoque l'ouverture d'une large cheminée, avec un important rejet de nuage radioactif. Toute la région de In Ecker fut contaminée. L'expérience Béryl peut s'apparenter à un tir nucléaire de destruction d'enceinte profondément enfouie. 7. Un des cahiers des charges impose d'effectuer un tir nucléaire dans les 24 mois qui suivent une «autorisation» de la Maison Blanche. Le délai actuel est de 36 mois. Mais le président Bush a permis la poursuite d'un programme de tirs «sous-critiques» ou froids : c'est le cas de détonations contrôlées, d'un explosif conventionnel autour d'une faible quantité de plutonium, mais qui ne déclenche pas de réaction en chaîne. Il s'agit de vérifier la permanence des paramètres d'utilisation de la munition. 8. Le Comprehensiv Test Ban Treaty, traité international a été signé en septembre 1996 durant la Conférence du désarmement, à New-York. Son article premier stipule : chaque Etat partie entreprend de ne pas effectuer la moindre explosion de test d'arme nucléaire ou d'autre explosion nucléaire, et d'interdire et prévenir toute explosion nucléaire de ce type en tout lieu de sa juridiction et sous son contrôle. 9. Nous avons précisé cette notion dans un précédent article «Un préalable électronique à toute guerre» paru dans le journal El Watan, jeudi 26 septembre 2013.