Ils sont nombreux à louer leurs appartements, villas et chambres aux milliers de vacanciers qui viennent de toutes les régions ainsi que de l'émigration. Houari, à l'orée de la retraite ne s'en inquiète pas. Depuis qu'il loue, ses revenus ont augmenté, en témoigne sa voiture récente qu'il ne pouvait se permettre avec son salaire mensuel de 30.000 DA. L'enquête commandée auprès de l'Institut Okba Com entre le 11 et le 16 juillet et menée sur un échantillon de 2 456 personnes, représentatif de la population algérienne âgée de 18 ans et plus, a révélé que «les deux modes de logement les plus prisés sont la location (31,1%) et l'hébergement chez un proche ou ami (25,8%). L'hôtel et le camping interviennent avec des proportions respectives de 16,1% et 15,8%.» En fait, l'étude confirme une tendance bien visible depuis quelques années. La formule de la location chez le propriétaire fait fureur parmi les familles. En face, les propriétaires sont tout aussi heureux de voir débarquer cette manne inespérée. Ils sont nombreux à y tirer profit. Sur le Net les petites annonces pullulent. «Mon F3 me rapporte l'équivalent d'une année de salaire.» Sans surprise, ce sont les appartements de types F2 ou F3, à défaut des studios, qui sont le plus recherchés, pratique et surtout pas cher, ils constituent bien souvent la première cible de recherche. C'est aussi ce qu'il y a de plus disponible sur le marché de l'immobilier. Rencontré au port de pêche de Salamandre du côté de Mostaganem, Houari B. (nom d'emprunt), gardien de nuit durant l'année dans un établissement scolaire de la commune, est l'un de ces heureux loueurs saisonniers à qui profite du succès estival de sa ville natale. Au début des années 2000, les autorités locales distribuent dans l'urgence un lot de logements sociaux érigés sur une parcelle qu'interdirait aujourd'hui la loi sur la protection du littoral. Ce n'est pas à quelques centaines de mètres de la grande bleue mais carrément les pieds dans l'eau. Houari fait partie des bénéficiaires. Il reconnaît volontiers que «durant ces années-là, où l'insécurité et la peur étaient encore présents, le site était dépourvu de toute commodité. Il fallait faire plusieurs kilomètres pour ramener de l'eau potable et durant l'hiver nous nous retrouvions isolés, sans transport. Il fallait voir dans quel état se trouvait le port de pêche. Un véritable nid de délinquants et tout le long de la côte livré à l'insalubrité et aux soulards. Il y avait aussi beaucoup de prostitution. Si j'avais le choix j'aurais refusé cet appartement sans la moindre hésitation.» Depuis, des années se sont écoulées et le littoral mostaganémois, Salamandre en particulier, a retrouvé son lustre tant chanté. A présent, Salamandre et les Sablettes compte plusieurs dizaines de restaurants qui font le plein en haute saison. Houari comme beaucoup de ces voisins a su tirer profit de cette manne. Ils sont nombreux à louer leurs appartements, villas et chambres aux milliers d'aoûtiens qui viennent de toutes les régions du pays ainsi que de l'émigration. Houari qui frappe à la porte de la retraite ne s'en inquiète pas car depuis qu'il a commencé à louer, ses revenus ont considérablement augmenté, en témoigne sa voiture récente qu'il ne pouvait se permettre avec son salaire d'à peine 30 000 DA par mois. «Cette année avec le mois de Ramadhan, j'ai craint une baisse de fréquentation mais dès la dernière semaine de Ramadhan le téléphone a commencé à sonner et plus fréquemment que d'habitude. Moi, j'ai loué pour 8 000 DA/nuitée. D'autres, dans mon entourage qui n'avaient pas cédé à la panique du manque de locataires, ont pu tirer jusqu'à 11 000 parfois 12 000 DA/jour.» Et le succès n'est pas près de se démentir. Houari dit avoir des réservations jusqu'à mi-septembre. «J'aurais pu aller jusqu'à la fin septembre mais la rentrée est pour bientôt et il doit rapatrier son épouse et les enfants partis chez des parents dans l'arrière- pays.» Mais à bien faire des calculs, Houari s'en tire plutôt pas mal. A raison de 8 000 DA/jour, il tire à peu de chose près dans les 37 millions de centimes, soit l'équivalent d'une année de salaire de gardiennage. Aucune déclaration, pas d'autorisation... donc pas l'ombre d'une garantie. Pour accueillir tout ce monde, la commune a lancé une vaste campagne de nettoiement et d'aménagement des espaces. Des employés communaux ont badigeonné les trottoirs et toiletté les lieux publics dont la chaussée du boulevard. «C'est un plus qui donne de la valeur au site» reconnaît Houari déjà ravi par le passage quelques mois auparavant du Premier ministre dans la localité et qui a obligé les autorités de la wilaya à s'investir dans l'embellissement du port pour les besoins d'une exposition. Sauf que dans ce tableau presque parfait, Houari le loueur oublie ou feint de le faire qu'il doit se faire déclarer et obtenir une autorisation auprès de l'APC comme le stipule bien une circulaire interministérielle. De but en blanc, il nie avoir eu vent de cette exigence. «De toutes les manières on ne me l'a jamais demandée, aucun locataire n'a exigé de contrat de location et je n'ai jamais reçu d'inspecteurs de la commune ou de la direction du tourisme.» Pourtant depuis juin 2012, une circulaire interministérielle signée entre le ministère du Tourisme et celui de l'Intérieur et des Collectivités locales cadre la formule «logement chez l'habitant». Le texte en question légalise, sous certaines conditions, la location entière ou partielle des habitations à des locaux ou à des étrangers pour une période déterminée. Le dispositif en question a un caractère administratif matérialisé sous forme d'une cellule installée auprès de la wilaya, composée des représentants des directions du tourisme, de la santé, de la Protection civile, et les services de sécurité ainsi que du représentant de la commune concernée puisque c'est justement de cette instance qu'il faut se rapprocher pour en obtenir l'autorisation. Si l'objet premier de ce système est d'assurer des conditions décentes de séjour aux vacanciers, les loueurs, eux, y voient d'abord une mesure destinée à les recenser pour les taxer. Or, pour l'instant aucune taxe n'est exigible et, paradoxalement, les assemblées locales ne profitent pas encore de ce flux d'estivants.