La Sonatrach a procédé hier à la pré-qualification de la première société algérienne de géophysique pour la réalisation d'une partie du programme relatif à l'acquisition des données sismiques 2D et 3D. La société de géophysique, Algeoland, est affiliée au groupe du président du FCE, Ali Haddad, qui vient ainsi de gagner le pari de sa seconde société opérant dans l'activité parapétrolière. La pré-qualification de la société Algeoland a ébranlé les acteurs du juteux marché algérien, partagé ces dernières années par une poignée de compagnies étrangères (françaises, chinoises et américaines). En dehors du programme attribué à l'Entreprise nationale de géophysique (ENGEO, filiale de la Sonatrach), ces compagnies étrangères décrochent, auprès de Sonatrach et de ses associés, la modique somme annuelle de 100 millions de dollars. Cette décision de la Sonatrach de pré-qualifier la société Algeoland a redonné espoir à certains investisseurs originaires de Laghouat qui ont préparé leur projet depuis 2012, mais n'ont pu le concrétiser en raison de la politique d'exclusion pratiquée par le couple Zerguine-Yousfi. La Sonatrach exigeait, en effet, que le candidat à la pré-qualification ait une expérience de trois ans au moins pour être retenu dans la short-list des sociétés prestataires en acquisition sismique 2D ou 3D. D'autres investisseurs, originaires de Oued Souf, actifs dans les travaux publics à Hassi Messaoud, ont également manifesté leur intention de se lancer dans ce business de la géophysique. Fin d'un monopole Depuis une décennie, la branche exploration de la Sonatrach réalise annuellement une moyenne de 8 mille km de données sismiques 2 et 10 mille km carré de sismique 3D (Cf. tableau ci-dessous). Un volume énorme que la filiale de la Sonatrach, Enageo, ne peut assumer. C'est alors que des appels d'offres sont lancés à l'adresse des compagnies étrangères, avec des critères de sélection plutôt exclusifs à certains candidats. La dernière pré-qualification, datant du premier juillet 2014, avait donné lieu à la sélection des compagnies suivantes : 1) Services pétroliers Schlumberger : une société franco-américaine qui est dans une position prédominante depuis plus d'une décennie sur l'activité d'acquisition de données sismiques et leur traitement. Schlumberger agit parfois par le biais de sa filiale WesternGeco. 2) CGG : société franco-américaine, ayant quitté l'Algérie en 1992 par solidarité avec Total. Sur insistance de l'ancien ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, Abdelhamid Zerguine, alors P-dg de la Sonatrach, avait convenu avec cette société, en 2012, un traitement géophysique de l'offshore algérien. Un projet qui aurait coûté, inutilement, à la Sonatrach des dizaines de millions d'euros. Ce projet avait été avorté par Ouyahia, alors chef du gouvernement. 3) BGP Incorporation : filiale de la compagnie pétrolière publique chinoise (CNPC), BGP a réussi à arracher des parts de marché autrefois exclusives à certaines sociétés européennes et américaines. Depuis trois ans, cette société chinoise s'est placée en seconde position en termes de parts de marché. 4) Sinopec IPSC : bien qu'elle avance beaucoup d'arguments en termes de coûts et de délais, cette compagnie publique chinoise est loin de pouvoir rivaliser avec les grandes multinationales. La mauvaise expérience menée avec la Sonatrach sur le champ pétrolier de Zarzaitine (à la frontière avec la Libye) n'a pas beaucoup aidé Sinopec à améliorer son image et grignoter plus de parts de marché. Outre Algeoland de Haddad, la pré-qualification, mise à jour hier, comporte les noms de deux autres sociétés, Geofizyka Krakow SA (polonaise) et Agesco (émiratie). La Sonatrach a averti, par là même, que cette pré-qualification devra être mise à jour chaque année pour sélectionner de nouveaux prestataires et pour évaluer les performances des sociétés pré-qualifiées. Compte tenu du retard cumulé sur plusieurs années par rapport à la collecte des données sismiques, dans l'exploration et dans l'exploitation, ces sociétés nouvellement pré-qualifiées devraient bénéficier d'un énorme plan de charge. Autrement dit, de gros chiffres d'affaires quand on sait que le traitement d'un champ en 3D coûte entre 15 et 30 millions de dollars et que des dizaines de champs sont en attente de lancement d'opérations d'acquisition technique. Les enjeux des services pétroliers Dans la zone industrielle Irrara de Hassi Messaoud, la société de géophysique de Haddad est domiciliée dans la même base de vie qu'une autre société dénommée Sapcor, considérée comme la société-mère d'Algeoland. D'ailleurs, les deux sociétés ont le même general manager, en l'occurrence Mabrouk Tarfaoui, qui a capitalisé beaucoup d'expérience dans les activités de services à Hassi Messaoud. A travers plusieurs années d'évolution, Sapcor a développé son réseau de logistique pour le mettre au diapason avec la mise à disposition des engins spécifiques et surtout le transport des gros appareils, tels les rigs de forage. Haddad, comme beaucoup d'opérateurs établis au Sud, a compris les enjeux qui entourent les services parapétroliers et que les Algériens doivent impérativement investir pour rivaliser avec les petites sociétés étrangères qui amassent annuellement des milliards de dollars dans des activités bien maîtrisées par les cadres locaux. Pour sa part, la Sonatrach a récemment lancé des signaux en direction de ses sous-traitants locaux pour s'investir davantage dans des prestations de services directement liées à la production. A titre d'exemple, le parc de la Sonatrach en matière d'appareils de forage ne dépasse pas la centaine de machines, alors que les besoins sont de l'ordre de 300 appareil opérationnels. Ce déficit est, jusqu'ici, comblé par des prestataires étrangers qui imposent leur loi en termes de prix de location et services associés. Idem pour les services de Workover et d'outillage, des activités en Algérie, détenues à 100% par des opérateurs étrangers.