«Le général Benhadid risque de mourir parce qu'il a osé citer des noms de puissants». Me Khaled Bourayou a lancé un véritable cri d'alarme pour alerter l'opinion nationale sur la situation dramatique dans laquelle se trouve son client, en grève de la faim depuis mercredi. C'était lors d'une conférence de presse animée vendredi matin en compagnie des deux autres membres du collectif de défense, Mes Mecheri et Bouchachi. Visiblement inquiet de la tournure prise par les évènements, Me Bourayou a donc décidé de rompre avec la réserve à laquelle il s'était astreint jusque-là. Il maintient : «si le général Benhadid n'avait pas cité certains noms, il n'en serait pas là. Il a cité des puissants, il est l'otage de puissants. Ils seront cependant les premiers responsables de la dégradation de sa santé». L'avocat refuse de donner de noms, «tout le monde le sait», dit-il, bras croisés. «Tout le monde le sait» car la presse avait rapporté que le mis en cause avait en septembre dernier tenu des propos, pour le moins réprobateurs à l'égard du frère du président de la République et du vice-ministre de la Défense, accusés d'avoir mené l'Algérie à la faillite. L'interview se déroulait sur les ondes de la radio Maghreb M. Une semaine plus tard, le fils du général Benhadid, Nassim, était arrêté pour possession illégale d'armes à feu. Après environ un mois, il est jugé puis libéré. Entre-temps, son père est arrêté à bord de son véhicule par une escouade de gendarmes. L'homme est de retour d'un contrôle médical. Ses avocats dénoncent les conditions de son arrestation et prennent l'opinion à témoin sur le fait que celui-ci est interrogé de nuit par la chambre d'accusation. Transféré la même nuit à la prison d'El-Harrach, il y passe quatre mois sans qu'aucune procédure judiciaire soit entamée. Ce qu'ont dénoncé ses avocats à plusieurs reprises. «Ce que dénonce aujourd'hui le général Benhadid à travers sa grève de la faim», insistent ses avocats. En fait et selon le collectif de défense, le prévenu a pris cette décision pour deux raisons principales. «La première est connue, il n'a pas été interrogé sur le fond comme le veut la procédure. Cet acte de procédure est pour lui un privilège auquel il n'a pas accès. Et lorsque la justice agit sur des actes de privilège, elle n'est plus justice. Mon client se sent agressé, humilié et se trouve dans une situation intenable». La seconde raison est liée à sa santé. Selon ses avocats, le général Benhadid, 70 ans, souffre de plusieurs maladies dont une insuffisance cardiaque, une hernie discale et un diabète et a demandé à être transféré à l'hôpital Aïn Naâdja pour un check-up mais sa doléance est restée sans suite. «Aujourd'hui, le recours à une grève de la faim et à une suspension de son traitement est sa seule arme». «L'arme de tous les opprimés à travers le monde, ceux qui ont épuisé toutes les voies de recours», renchérit Me Bouchachi. Il s'interroge ensuite : «les autorités ont-elles décidé de traiter cet homme de cette manière pour le punir avant même de le juger, ou est-ce l'appareil judiciaire qui agit de la sorte par excès de zèle ? Par cette conférence, tout le monde saura ce qui se passe réellement». «Le ministre de la Justice, poursuit Me Mecheri, sera lui aussi responsable des conséquences d'une telle situation». Il tient particulièrement à rappeler que le général Benhadid a été accusé d'avoir porté atteinte à l'image de l'ANP à travers ses propos «or le ministère de la Défense n'a déposé aucune plainte. L'affaire relève d'un délit de presse sans plus». Me Bourayou se dit, quant à lui, attristé par le fait que ces évènements se déroulent à l'heure où l'Algérie vient de se doter d'une nouvelle Constitution qui garantit plus de justice et d'équité aux Algériens. «Ceux qui ont voté ce texte se soucient-ils du fait qu'un homme qui a servi l'Algérie toute sa vie croupit en prison depuis quatre mois sans avoir droit à une procédure normale ?». Enfin, il faut savoir que le général Benhadid entamera aujourd'hui son quatrième jour de grève de la faim. Selon ses avocats, il a uniquement reçu la visite furtive d'un médecin. Abla Chérif GRÈVE DE LA FAIM DU GENERAL BENHADID Hanoune en appelle à Bouteflika La secrétaire générale du PT invite le président de la République en sa qualité de premier magistrat du pays, à «faire quelque chose» pour ne pas laisser mourir le général Hocine Benhadid, qui a entamé, mercredi dernier, une grève de la faim et de soins dans la prison d'El Harrach. M. Kebci-Alger (Le Soir) - Louisa Hanoune, qui intervenait, hier vendredi à l'ouverture d'une session ordinaire du bureau politique du parti, trouve «inconcevable» que l'Etat reste sans agir face à ce «processus qui se poursuit jusqu'à l'irréparable». Et de s'interroger sur «autant de cruauté à l'endroit de ce maquisard qui a servi son pays avec loyauté et qui n'a jamais mouillé dans aucune affaire de corruption», s'interrogeant si le premier magistrat du pays était «capable de laisser mourir l'homme». Faut-il rappeler que le général Benhadid a entamé une grève de la faim, mercredi dernier pour dénoncer, selon ses avocats, «les lenteurs de l'appareil judiciaire dans la gestion de son dossier pour lequel il est incarcéré depuis la fin du mois de septembre dernier à la prison d'El-Harrach. Une option qu'il a dû reporter à maintes reprises avant de l'adopter donc et qui risque d'avoir de graves conséquences sur sa santé, lui le diabétique et souffrant d'une insuffisance cardiaque et d'une hernie discale. Parlant de la nouvelle Constitution adoptée le 7 février sans les voix des députés du parti qui a décidé de l'abstention, la patronne du PT s'est appesantie sur le fameux article 51 qui prive nombre de membres de notre diaspora de postuler à certaines hautes fonctions dans le pays. Pour elle, les arrière-pensées de cette disposition demeurent encore du domaine du néant, assurant, toutefois, que ledit article ne vise certainement pas notre émigration dans sa globalité mais bel et bien des personnes précises aussi bien ici dans le pays qu'à l'étranger sans pouvoir citer un quelconque nom. C'est comme si, lâche-t-elle, on avait agi dans la «précipitation» pour faire échec à une «opération à l'ukrainienne», affirmant que cette disposition et celle portant condition de dix ans de résidence dans le pays pour tout postulant à la magistrature suprême du pays, ne figuraient pas dans la mouture du projet de révision constitutionnelle discutée avec le directeur de cabinet du président de la République dans le sillage des concertations qu'il avait pilotées. Ce qui fait penser à Hanoune que ces deux dispositions, notamment l'article 51, ont dû être «ajoutées» en toute dernière minute pour contrecarrer une «velléité de l'ancienne puissance coloniale de faire de notre pays un de ses départements d'outre-mer». Pour elle, ce souci justifie la précipitation dans le «bouclage» du projet dont l'adoption, selon elle, n'était pas prévue de sitôt.