A l�heure o� les Souk-El-Fellah et autres Monoprix mettaient, l�un apr�s l�autre, la clef sous le paillasson, de nouveaux commerces ont point� le bout du nez. Les sup�rettes. D�abord timide, leur apparition s�est g�n�ralis�e dans tous les quartiers de la capitale : Hydra, D�ly-Ibrahim, El-Biar, Husse�n-Dey, Bab-El-Oued... De nouvelles habitudes ont commenc� � s�installer chez les consommateurs. Finis les interminables aller-retour chez le boucher, le boulanger, l��picier, le droguiste du coin. Les sup�erettes, c�est du dix en un puisqu�elles offrent un large choix de produits. S�il est vrai que les clients y trouvent leur compte, les petits commer�ants de proximit�, eux, grincent des dents. Et pour cause, la plupart d�entre eux ont vu leur chiffre d�affaires chuter brutalement, comme nous le confie cet �picier du boulevard Mohamed V : �Avec l�ouverture de plusieurs sup�rettes dans le quartier, j�ai enregistr� une perte s�che.� Ouverts 7 jours sur 7, jusqu�� 22h, ces supermarkets regorgent de produits de large consommation. De la simple baguette de pain au fardeau d�eau min�rale en passant par les surgel�s, les l�gumes, les cosm�tiques et les produits d�hygi�ne, la m�nag�re n�a que l�embarras du choix. Certains sup�rettes proposent m�me des plats d�j� cuisin�s � emporter. Le rayon surgel� a �galement la cote, syst�me D pour de nombreuses femmes jonglant entre boulot et foyer. Et pour les accros des g�teaux traditionnels, pas de panique ! Makrout, cha�rek, sabl�s, ghribia dispos�s dans de jolies barquettes vous attendent. Idem pour la galette, beignet (kh�fef), m�hadjeb et autres gourmandises appr�ci�es par bon nombre d�Alg�riens. Superette Taba�n, boulevard Mohamed V. Un ex-parking transform� en supermarch�. Couleur dominante de cette enseigne : l�orange. M�me le personnel (caissiers, chefs de rayon ...) portent des uniformes dans ce ton. Talonn�s par le responsable de cette grande surface, nous p�n�trons dans cette antre de la consommation. Les clients portant d�j� un sac de provisions sous le bras sont pri�s de le laisser � la consigne. Chariots et paniers attendent � l�entr�e. Une dame s�empare d�un caddie. �Aujourd�hui, c�est jour de paye. Je fais le plein de produits alimentaires et d�entretien pour le mois�, lance-t-elle. Les rayons et pr�sentoirs bien achaland�s d�fi- lent sous nos yeux : droguerie, cosm�tique, viandes, charcuterie, surgel�s, alimentation g�n�rale, lait et d�riv�s, fruits, l�gumes, olives, �pices ... �C�est tellement pratique de faire toutes ses emplettes dans le m�me magasin, l�che un client. On gagne un temps fou !� C�t� prix, ils s�alignent sur ceux pratiqu�s dans les autres commerces, exception faite pour les fruits et l�gumes qui affichent une hausse sensible compar�s � ceux du march�. Lors de notre passage, un client a du mal � ronger son frein : �Les l�gumes et fruits co�tent jusqu�� 3 fois plus chers qu�� l�ext�rieur. Rien ne justifie cette hausse�, s�emporte-t-il. Mal � l�aise, probablement � cause de notre pr�sence, le responsable lui indique qu�il existe un cahier de dol�ances o� il peut consigner son coup de gueule. Passage ensuite par le rayon des surgel�s. La gent f�minine y joue des coudes. P�te feuillet�e, boureks d�j� far�is, quiches, poissons pan�s, pizzas pr�cuites, frites ... Tout un pannel de produits � mettre directement dans sa po�le � frire ou dans son micro-ondes. Plan de secours pour toutes ces femmes actives prises entre le marteau et l�enclume. T�moignage de Houria (fonctionnaire) : �Entre les 8 heures pass�es au bureau, les enfants � r�cup�rer de l��cole et les courses � faire, plus le temps � passer derri�re les fourneaux. B�ni soit celui qui a invent� les aliments surgel�s�, lance-t-elle. Une autre cliente happe la conversation au vol et rench�rit : �Moi, je ne suis pas d�accord, ces produits pr�cuits ont d�j� perdu la moiti� de leurs vitamines, en plus ils gr�vent s�rieusement le budget.� Avant de quitter cette sup�rette, nous remarquons la pr�sence de plusieurs cam�ras de surveillance. Par ailleurs, comme nous l�explique notre guide, certains produits co�tant cher, tels les cosm�tiques made in sont, truff�s d�anti-vols invisibles � l��il nu : �Tous les jours, plusieurs pickpockets sont appr�hend�s la main dans le sac, nous r�v�le notre interlocuteur. R�cemment, l�alarme du portique s�est d�clench�e au passage d�une femme. Elle avait dissimul� dans ses poches l��quivalent de plus de 4 000 DA de produits de beaut�.� Le M�li-M�lo Market, une autre grande sup�rette (environ 500 m2) situ�e en contrebas de la rue Claude-Debussy. De 9h � 19h30, cette enseigne accueille un flot incessant de clients, notamment les riverains. R�guli�rement, � l�instar de la plupart des commerces de ce genre, des ventes promotionnelles de produits y sont organis�es. �A l�approche des dates de p�remption, nous cassons les prix, quitte � r�duire la marge b�n�ficiaire�, nous informe Mohamed, le responsable. Quant � l�agencement des produits dans les rayonnages, il ob�it � des r�gles strictes, comme tient � le souligner notre vis-�-vis : �Chaque vendeur est responsable de son rayon. Il est tenu de le mettre en valeur, de g�rer les stocks et d�organiser les rayons en disposant les produits de fa�on attractive. � Plusieurs caisses sont en service. Pr�s de chacune d�entre elles, des barres chocolat�es, des chewinggum et autres confiseries : �C�est une strat�gie commerciale visant � inciter les clients � faire un achat de plus m�me si celui-ci n��tait pas port� sur leur liste�, indique notre guide. C�t� clients, m�me si la plupart se disent ravis par la disponibilit� et la vari�t� des produits, d�autres font la fine bouche. Un client nous dira : �Certains produits dont la date de p�remption est proche sont carr�ment immangeables !� Un autre pointera du doigt l�absence de parking : �J�aime bien faire mes courses ici, mais impossible de trouver une place o� me garer.� Un autre li�vre est soulev� par une dame : �Tr�s souvent, la petite monnaie fait d�faut, d�o� la formation d�interminables queues au niveau des caisses�. R�ponse du g�rant : �C�est la Banque centrale qui est responsable du manque de la petite monnaie et qui n�en fournit qu�aux petits copains. Alors, on se d�brouille comme on peut !� Devant la multiplication des sup�rettes, les g�rants redoublent d�imagination pour satisfaire leur client�le. La carte de fid�lit� ouvrant droit � un bonus au bout d�un certain nombre d�achats commence � se g�n�raliser. Si certains clients se laissent s�duire, ne manquant jamais de brandir leur carte au moment de payer, d�autres ont la dent dure contre cette strat�gie commerciale. �Pour obtenir un bon d�achat gratuit de 200 DA, il faut totaliser 400 points, l��quivalent d�environ 15 000 DA d�achats, une goutte d�eau dans l�oc�an, ironise un client rencontr� � la superette Khiar, rue Burdeau�. Une chose est ind�niable : apr�s les ann�es de p�nuries (70�s et 80�s), ces magasins de vente en libre service ont apport� une v�ritable bouff�e d�oxyg�ne aux consommateurs effr�n�s que nous sommes devenus, m�me si des imperfections sont relev�es, ici et l�. Sabrina Inal Email : [email protected]