Trois matchs, trois victoires, zéro but encaissé. L'Egypte a réussi un sans-faute, du moins sur le plan statistique lors de ce premier tour. Solides derrière, efficaces voire «tueurs» devant, les Pharaons sont au rendez-vous, à défaut d'avoir été toujours souverains dans le jeu. Sérieusement secoués par l'Ouganda, les hommes de Javier Aguirre peuvent compter sur deux fers de lance offensifs de première qualité en les personnes de Mohamed Salah et de Trezeguet. Mais les hôtes du tournoi ne sont pas les seuls à avoir réussi pareille performance. L'Algérie, dans le groupe C, et le Maroc, dans le groupe D, ont également fait carton plein (sans encaisser le moindre but) durant ce premier tour. Avec, dans les deux, cas un gros collectif et des talents redoutables, Fennecs et Lions de l'Atlas s'affirment comme des prétendants au dernier carré. Pensez : la dernière fois que ces deux équipes ont remporté leurs trois matchs de poule, elles ont remporté la CAN (le Maroc en 1976, l'Algérie en 1990). Mais un nouveau tournoi, à élimination directe, commence maintenant. Les autres équipes qualifiées, aussi poussives aient-elles pu être pour certaines, n'ont donc pas forcément dit leur dernier mot. Les belles surprises : Madagascar, Ouganda Cela fait le charme des compétitions internationales en général, et de la Coupe d'Afrique en particulier : des équipes inattendues surprennent toujours agréablement, au point de changer de statut aux yeux des observateurs. Cette année, ce jeu du chamboule-tout est incarné en premier lieu par Madagascar et l'Ouganda. Avec sept points, les Barea ont pris la première place du groupe B. D'abord auteurs d'un nul spectaculaire et prometteur face à la Guinée (2-2), les partenaires de Faneva Andriatsima ont confirmé ces bonnes dispositions face au Burundi (1-0) avant d'affirmer leurs ambitions en donnant une leçon de football à un Nigeria dépassé et inquiétant (2-0). Eminemment collectif, alerte et vertical, le jeu malgache a charmé les observateurs. Même cause, même effet du côté de l'Ouganda. Les Grues, qui disputent leur deuxième phase finale de rang après une éclipse de 39 ans, ont commencé par cueillir à froid une RDC à côté de ses pompes (2-0). Après un match très accroché face au Zimbabwe (1-1), l'Egypte les a battus contre le cours du jeu (2-0). Ces deux grosses cotes ont pour points communs d'être dirigées par des techniciens français aux parcours atypiques : Nicolas Dupuis (51 ans) et Sébastien Desabre (42 ans). Rafraîchissant. 68 buts en 36 matchs 68 buts ont été inscrits en 36 matchs, soit une moyenne légèrement inférieure à 2 par match (1,88). Un total en léger recul par rapport à l'édition 2017 (50 buts en 24 matchs au premier tour, soit 2,16 par match). Si les rencontres de la 3e journée ont fait baisser la moyenne, les intentions de jeu sont plutôt positives. L'une des clés de cet état d'esprit réside peut-être dans la qualité d'ensemble des pelouses, nettement supérieures au standard habituel de la compétition africaine. Confrontée par ailleurs au défi de la sécurité, le pays organisateur n'en a pour autant négligé le terrain lui-même. C'est une excellente nouvelle pour le spectacle. De même que la bonne tenue de l'arbitrage : hormis l'oubli probable d'un penalty pour le Sénégal face à l'Algérie pour une faute sur Sadio Mané, les polémiques ont été rares. Serait-ce le cas jusqu'au bout de la compétition ? La question reste posée, d'autant plus que la VAR fera son apparition à partir des quarts de finale. Des «stars» qui polarisent trop l'attention Oui, pour que la CAN soit belle, mieux vaut qu'il y ait des stars. Encore faut-il que ces dernières ne monopolisent pas l'attention. Et disons-le, ce fut parfois un peu le cas lors de ce premier tour. Si le Ghana a désamorcé l'épineux problème Asamoah Gyan avant l'épreuve, le cas Naby Keita (‘'jouera, jouera pas ?'') alimente l'essentiel des discussions au sujet de la Guinée. Au point d'en oublier les autres joueurs du Syli national, pourtant chargés de faire oublier l'absence (ou la présence réduite) du meneur de jeu de Liverpool. Et que dire de Sadio Mané, dont le rendement fait tant jaser au Sénégal ? Ces débats sans fin sont-ils favorisés par des collectifs déficients, incapables de faire oublier le ‘'MVP'' de l'équipe ? Peut-être, si l'on en croit les situations de l'Egypte ou du Maroc, aptes à trouver des circuits préférentiels et susciter de nouveaux récits en dehors de Mohamed Salah ou de Hakim Ziyech ? Pour vivre heureuses, les stars gagnent elles aussi parfois à vivre cachées. Parmi leurs coéquipiers. Un dur apprentissage pour certaines équipes L'élargissement du plateau à 24 équipes n'a pas provoqué le nivellement par le bas redouté par certains oracles. Si la maturité tactique est à la hausse, toute disparité de niveau n'a pas disparu pour autant. Pour sa première CAN, le Burundi est apparu loin du compte. Avec trois défaites et zéro but marqué, les Hirondelles n'ont pas volé bien haut dans le ciel égyptien. De retour en phase finale après 39 ans d'absence, la Tanzanie a montré un peu plus de possibilités offensives, mais aussi une faiblesse défensive confondante. Un défaut que la Mauritanie sut corriger après avoir sombré d'entrée face au Mali (4-1). Enfin, si l'on examine la situation poste par poste, celui de gardien de but reste le plus pauvrement doté. Le Zimbabwe s'en aperçut à ses dépens quand les Warriors durent remplacer au pied levé George Chigova, blessé à l'échauffement, par le malheureux Elvis Chipezeze… Des stades souvent vides A l'exception notable des matchs des Pharaons, les rencontres de ce premier tour n'ont guère attiré les foules. Si l'Algérie, la Tunisie et le Maroc sont parvenues à drainer un nombre respectable de supporters, les équipes d'Afrique subsaharienne évoluent devant un petit carré de fidèles. L'éloignement de l'Egypte, le coût du transport et de l'hébergement voire les complications pour voyager (visas, etc.) expliquent ces maigres chambrées dans des enceintes de grande capacité (de 18.000 à 75.000 places). «Nous ne pouvons pas ouvrir les stades de manière aléatoire», s'est justifié le président du COCAN, Hany Abo Rida. «Pour la suite, nous allons voir avec le ministère de la Jeunesse pour que la foule soit admise dans les stades de façon sécurisée», a ajouté celui qui est par ailleurs président de la Fédération égyptienne de football (EFA).