Après un semblant d'accalmie, les émeutes reprennent dans la vallée du M'zab. Trois jours d'affrontements ont suffi pour semer le désordre dans la ville, même les monuments historiques n'ont pas été épargnés. Les affrontements ont fait soixante blessés dont 8 dans un état grave, et quatre défigurés et brûlés au vitriol et autres produits acides. Cinquante-deux locaux ont été saccagés et pillés avant d'être incendiés, principalement dans la soirée de jeudi, dans différents quartiers de Ghardaïa. Ces violents affrontements, initiés par des jeunes, ont fait également plusieurs blessés dans les rangs des policiers. Tout a commencé, selon des sources bien informées, dans la soirée de mardi, après que deux bus de voyageurs appartenant à des Mozabites eurent été caillassés par de jeunes trublions dans le quartier Lobo, majoritairement habité par des Arabes. Dans cet incident, une femme se trouvant dans l'un des bus a été grièvement blessée par les jets de pierre. Ce qui a provoqué l'ire de la communauté mozabite, qui faisait l'objet de provocations depuis la fin des émeutes, soit le début du mois en cours. «La passivité des forces de l'ordre» et l'allégement du dispositif sécuritaire depuis le début de la semaine dernière, en raison du retour au calme, ont poussé les jeunes Mozabites à prendre les choses en main pour se venger. Ces derniers ont saccagé plusieurs bus dans le quartier de Daya, un quartier arabe. Et face à cette introduction non digérée dans leur territoire, les jeunes Arabes ont vite réagi, en incendiant dans la soirée de mercredi, deux à trois habitations et deux magasins. Mais les choses ont évolué et la violence a repris le dessus. Les affrontements se sont poursuivis jusqu'à vendredi entre les groupes de jeunes des deux communautés, et se sont propagés dans plusieurs quartiers, à savoir Theniet El Makhzen, Baba-Saâd, El Aïn, la place du marché (souk de Ghardaïa) et la place Andalous, avant de s'étaler dans la soirée de jeudi à Hadj-Messaoud et Melika qui sont le théâtre de jets de pierres, de cocktails Molotov et autres projectiles, où des scènes de vandalisme et de pillage ont été observées. Les forces antiémeute de la police appuyées par les unités d'intervention de la gendarmerie ont utilisé des bombes lacrymogènes pour disperser les antagonistes. Un rebondissement prévisible Le célèbre marché de l'artisanat n'a malheureusement pas été épargné, cette fois-ci, par ces actes irresponsables. On compte deux magasins de Mozabites incendiés dans ce lieu qui attirait jadis des milliers de touristes annuellement et qui abritait la célèbre fête du tapis. De loin, témoigne un sexagénaire, «la ville semble en pleine guerre». Aucun quartier n'a été épargné, hormis Metlili, Berriane et Grara, située à plus de 4 km de la ville de Ghardaïa. La ville est plus triste que jamais. «Le pavé des trottoirs et autres carreaux ont été défoncés pour être utilisés comme projectiles». Les unités de la Protection civile ont été obligées de faire appel aux unités limitrophes pour éteindre les différents foyers de feu, mais la plupart n'ont pas été entièrement maîtrisés, en raison des ruelles étroites, ne permettant pas le passage du camion des pompiers. «Un rebondissement prévisible après l'allègement de la présence des forces de l'ordre», estime un membre de la cellule de crise et de suivi (CCS), mise en place après le début des affrontements le 23 décembre 2013 et qui n'ont pris fin que trois mois plus tard, faisant 5 morts. La CCS redoutait justement la reprise des agitations, après la décision prise par Abdelghani Hamel, directeur général de la Sûreté nationale, relative à l'allégement du dispositif sécuritaire à Ghardaïa, et ce, en fonction de l'amélioration de la situation. Les unités des forces de l'ordre que compte actuellement la ville ont été, cependant, redéployées dans les différents quartiers dits «chauds» de la ville pour faire cesser les heurts et ramener le calme et la quiétude dans la région.