Au bout du calvaire, l'entraîneur du FC Barcelone Gerardo Martino, qui a peiné à assumer l'héritage de ses prédécesseurs, a logiquement annoncé son départ samedi après une dernière humiliation: le titre de champion remporté au Camp Nou par l'Atletico Madrid. "Je veux vous communiquer, d'un commun accord avec le club, que nous avons cessé d'être les entraîneurs du Barça", a dit sobrement en conférence de presse Martino à propos de lui-même et de son équipe technique. Ce départ laisse présager un été agité en Catalogne, où l'ancien joueur blaugrana Luis Enrique fait figure de favori pour succéder à "El Tata" Martino. Défaite en finale de Coupe du Roi contre le Real Madrid (2-1), élimination en quart de Ligue des champions face à l'Atletico (1-1, 1-0), carences offensives et défensives: le Barça version "Tata" a été moins dominateur, moins irrésistible que l'équipe qui a fasciné l'Europe sous Pep Guardiola (2008-2012) puis Tito Vilanova (2012-2013). Lèse-majesté "A aucun moment nous n'avons pu voir la meilleure version du Barça, sauf à certaines occasions très particulières, a déploré début mai l'Argentin de 51 ans. Il y avait une image de cette équipe avec un très haut niveau et un football exquis. Evidemment, pendant cette saison où je l'ai dirigée, nous avons été éloignés de ce football-là." Disciple du technicien argentin Marcelo Bielsa, son ex-entraîneur aux Newell's Old Boys de Rosario, Martino avait pourtant des principes communs à ceux du "toque" barcelonais: possession, jeu au sol et pressing intense à la perte du ballon. Mais il lui a été difficile d'ajouter des variantes au jeu catalan sans être accusé de lèse-majesté, comme lors de cette large victoire (4-0) sur la pelouse du Rayo Vallecano où Martino n'avait pas compris que la presse concentre ses critiques sur le fait d'avoir abandonné le ballon à l'adversaire. "Je n'ai pas pu aller au bout de mes intentions, a-t-il déploré. Tout au long de la saison, nous avons eu divers déficits: en attaque, sur les coups de pieds arrêtés, sur la cohésion défensive..." Martino, qui s'est fait un nom en Amérique du Sud comme sélectionneur du Paraguay puis comme entraîneur de Newell's, a également paru décontenancé par le ton de la presse européenne, en particulier celui des médias espagnols, aussi prompts à encenser qu'à blâmer. Victime de l'"environnement" A sa décharge, la barre était haute: il s'agissait de redonner de l'allant à une équipe qui venait en cinq ans de gagner deux Ligues des champions (2009, 2011) et quatre Championnats d'Espagne (2009, 2010, 2011, 2013). A sa décharge aussi, son compatriote Lionel Messi a été blessé pendant plusieurs semaines et n'a atteint son rendement habituel qu'au printemps. Enfin, ce qu'il a appelé l'"environnement" du Barça, très agité cette saison, n'a pas facilité son adaptation. L'institution catalane a notamment été ébranlée par les démêlés judiciaires autour du transfert de Neymar et une sanction d'interdiction de mercato appliquée par la Fifa pour des infractions sur les transferts de mineurs. "C'est une saison où nous n'avons atteint aucun des objectifs que nous nous étions fixés, a déploré samedi soir le président Josep Maria Bartomeu au micro de Canal+ Espagne. Mais tout continue, notre philosophie de contrôler le ballon et le jeu reste la même. Ce n'est pas la fin d'une étape mais la continuation, avec des changements profonds." La presse catalane juge déjà l'ancien joueur barcelonais Luis Enrique, qui vient de quitter le banc du Celta Vigo, favori pour lui succéder. "Parfois, on sent qu'on n'a pas été à la hauteur et qu'il n'est pas nécessaire de demander une autre chance, parce qu'on ne la mérite pas", avait philosophé Martino au début du mois. Peut-être que le costume a été un peu trop grand pour "El Tata".