Le nouveau Parlement libyen issu des élections du 25 juin se réunissait samedi pour la première fois, à Tobrouk (est), sur fond d'affrontements meurtriers dans le pays, que des milliers de personnes cherchent à fuir. Des élus ont annoncé que la réunion était informelle, précisant que la séance inaugurale aurait lieu lundi, également dans cette ville de l'extrême est du pays épargnée par les violences. Le Parlement va entrer en fonction au moment où le pays s'enfonce chaque jour un peu plus dans le chaos, les deux plus grandes villes Tripoli et Benghazi étant le théâtre de combats meurtriers. En deux semaines, les violences ont fait plus de 200 morts, dont 100 à Benghazi, et près de 1.000 blessés dans l'ensemble du pays, selon le ministère de la Santé. Les divisions entre islamistes et nationalistes, qui minent depuis des mois la vie politique, se transposent sur le terrain, avec des combats entre milices rivales. C'est le cas notamment à Tripoli, où les combats ont repris samedi autour de l'aéroport, après une journée de relative accalmie vendredi. Le bruit de tirs et d'explosions pouvait être entendu depuis le centre-ville. Les dernières violences ont poussé de nombreuses capitales occidentales à évacuer leurs ressortissants et diplomates. La Grande-Bretagne et la Pologne sont les derniers en date à avoir annoncé la fermeture temporaire de leurs ambassades. La Roumanie a indiqué de son côté qu'elle maintenait ouverte son ambassade mais a appelé ses ressortissants à quitter sans délai le pays. La Tunisie voisine faisait elle face à un afflux de milliers de ressortissants étrangers, en majorité égyptiens, qui ont tenté vendredi de forcer le passage, provoquant la fermeture temporaire du principal point de passage avec la Libye. Le seul espoir pour tenter d'enrayer les violences semble désormais résider dans le nouveau Parlement qui devrait entrer en fonction lundi à Tobrouk, à 1.500 km à l'est de la capitale. "Nous avons décidé de tenir notre séance inaugurale lundi. Celle d'aujourd'hui sera consultative", a déclaré le député Abou Bakr Biira, qui présidait la réunion de samedi, tenue à huis-clos. 'Unir la patrie' "Nous voulons unir la patrie et mettre de côté nos différends", a-t-il dit, affirmant que plus de 160 élus, sur 188, étaient présents à la réunion. Il n'était pas possible toutefois de vérifier ce chiffre avec source indépendante. Mais s'il s'avérait exact, cela confirmerait une victoire écrasante des "nationalistes" devant leurs rivaux islamistes aux élections, ces derniers boycottant la réunion. Signe en effet des profondes divergences au sein des autorités, Nouri Abou Sahamein, le président du Congrès général national (le Parlement sortant dominé par les islamistes) a maintenu, pour lundi également, une séance inaugurale du nouveau Parlement mais à Tripoli cette fois. La mouvance nationaliste accuse les islamistes de semer le chaos dans le pays en vue d'empêcher la prise de fonction du Parlement, après avoir perdu les élections. Sur le terrain, les pompiers s'activaient toujours samedi pour le septième jour consécutif à éteindre à Tripoli le feu faisant rage dans un dépôt de stockage d'hydrocarbures qui contient notamment plus de 90 millions de litres de carburant. Leur travail a été interrompu maintes fois à cause des tirs. Des roquettes tirées durant les combats à l'aéroport avaient provoqué dimanche le sinistre. Selon une source à la protection civile, l'incendie pourrait être maîtrisé "très bientôt". L'aéroport est fermé depuis le début, le 13 juillet, des combats et plusieurs avions ont été endommagés par les heurts entre milices d'ex-rebelles qui avaient combattu ensemble pendant huit mois le régime de Mouammar Kadhafi en 2011. Depuis près de trois ans, les autorités ne parviennent toujours pas à contrôler les dizaines de milices qui font la loi dans le pays en l'absence d'une armée et d'une police bien structurées et entraînées. A Benghazi, dans l'est du pays, la situation était relativement calme samedi, après plusieurs jours de combats à l'issue desquels des milices islamistes se sont emparées de la principale base militaire de la ville. Vendredi soir, des milliers de Libyens sont descendus dans la rue de cette ville ainsi qu'à Tripoli pour protester contre les violences et dénoncer le "terrorisme".